Pour une bonne nouvelle, c’en est vraiment une. Le gouvernement (actuel) a décidé d’abandonner le projet de transfert de l’aéroport Tunis-Carthage en dehors de Tunis. En lieu et place, il opte pour sa deuxième extension comme le prévoit le Plan de développement de l’aéroport depuis son inauguration en 1972. La première extension a eu lieu dans les années 90.

Objectif de cette deuxième extension : porter la capacité de l’aéroport de 5 millions de voyageurs actuellement à 8 millions. C’est le ministre du Transport, Hichem Ben Ahmed, qui a fourni l’information, mardi 29 octobre 2019, sur les ondes de la radio privée Mosaïque.

Pour prouver l’engagement ferme du gouvernement à aller sur cette voie, Ben Ahmed a révélé que l’appel d’offres pour l’aménagement et l’extension de l’aéroport sera lancé en janvier ou février 2020. Mieux, le ministre a même promis de présenter, dans un délai de dix jours, la maquette du nouveau terminal.

Par-delà ces indications officielles, nous ne pouvons que nous féliciter de cette décision à plus d’un titre, ne serait-ce que compte tenu de son impact positif sur les finances publiques. Car en cette période de récession économique, le pays ne pouvait pas se permettre le luxe d’envisager la construction d’un nouvel aéroport international.

Haro sur ces ministres qui s’entêtaient à transférer l’aéroport

Nous ne pouvons qu’exprimer notre satisfaction d’autant plus que nous avons dénoncé, à plusieurs reprises sur le site webmnagercenter.com, les manœuvres spéculatives de deux anciens ministres du Transport (de Nidaa Tounes), en l’occurrence, Anis Ghedira et Radhouane Ayara.

Ces derniers avaient tout fait, durant leur mandat 2015-2018, pour accélérer les études de faisabilité technico-économiques du transfert de l’aéroport à 30 km de la capitale.

Forts d’une étude prospective sur le transport aérien en Tunisie à l’horizon 2040, les deux ministres avaient alors cherché à défendre, becs et ongles, le transfert.

Cette étude, commanditée pour la coquette somme de 2 millions de dinars tunisiens, a dégagé trois scénarios pour l’aéroport de Tunis-Carthage.

Le premier consiste en l’extension et l’aménagement de l’aéroport pour un coût global avoisinant les 2 milliards de dinars (estimations faites avant la chute du dinar depuis avril 2017).

Objectif : porter la capacité d’accueil de l’aéroport à 9 millions de voyageurs par an contre 5 à 7 millions actuellement.

Le deuxième scénario prévoit la construction d’un nouvel aéroport qui viendrait s’ajouter à celui de Tunis-Carthage.

Quant au troisième scénario, il porte sur la réalisation d’un nouvel aéroport qui viendrait remplacer l’actuel aéroport de Tunis-Carthage. Le nouvel aéroport serait opérationnel dans 10 ans et se situerait à 30 km du centre de la capitale. Trois sites seraient identifiés: Utique (gouvernorat de Bizerte), Borj Touil (gouvernorat de l’Ariana) et Bouhnach (gouvernorat de la Manouba).

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Malgré l’embarras du choix qu’offrent ces scénarios, les deux ministres se sont entêtés à plaider pour le transfert.

Anis Ghedira est allé jusqu’à retirer le projet d’extension de l’aéroport de Tunis-Carthage de la liste des mégaprojets proposés aux investisseurs étrangers dans le cadre de la Conférence internationale pour l’investissement “Tunisia 2020“ (29 et 30 novembre 2016 à Tunis).

Pour sa part, pour mettre tout le monde devant le fait accompli, Radhouane Ayara avait déclaré, à maintes reprises, qu’un appel d’offres sera lancé, durant son mandat, pour sélectionner l’entreprise qui construira le nouvel aéroport.

L’opposition des bailleurs de fonds au projet du transfert

Cet acharnement des deux ministres à défendre le scénario du transfert a suscité la curiosité des médias et des bailleurs de fonds.

L’Agence France Presse (AFP) a évoqué, à un certain moment, une affaire de spéculation foncière. Selon l’agence, des hommes d’affaires turcs et qataris seraient intéressés par le site de l’aéroport lequel s’étend sur 900 hectares d’excellente qualité et auraient mis la pression sur les deux ministres.

A leur tour, les bailleurs de fonds ont manifesté, discrètement, leur rejet du projet de transfert de l’aéroport.

Interpellée sur ce dossier lors d’un séjour de travail, en juillet 2017 à Tunis, une des équipes du Fonds monétaire international (FMI) avait déclaré que «ce serait une tentative maladroite de relancer l’économie par le biais de grands projets d’infrastructure… Un aéroport c’est extrêmement risqué en période d’austérité au regard de son coût élevé, son faible effet redistributif et sur l’emploi».

Et l’équipe du Fonds d’ajouter :”si l’Etat veut investir pourquoi ne pas commencer par la santé et l’éducation, ou alors dans les zones défavorisées, ce qui aurait un meilleur effet sur l’égalité des chances”. Sans commentaire.

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