En quelques jours –trois, plus précisément-, le dossier –hyper sensible- de la santé de nos dirigeants politiques a refait surface pour s’imposer à «La Une» des journaux, sites web et autres radios et télévisions.

Les ennuis de santé ont frappé en même temps deux des plus importantes institutions du pays, en l’occurrence l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) et la présidence de la République.

Le premier personnage de l’Etat à être hospitalisé est Abdelfattah Mourou, premier vice-président de l’ARP, qui a été, mercredi 19 juin 2019, victime d’un malaise ayant nécessité l’intervention d’un député-médecin, Dr Béchir Lazzam, puis celle d’une équipe médicale externe.

Trois jours plus tard, on apprend que le président de l’ARP, Mohamed Ennaceur, a lui aussi eu un ennui de santé, dont on ne connaît pas la date exacte, et révélé après coup, samedi 22 juin 2019 par Hassene Fathalli, responsable de l’information à l’ARP. Qui assure que «le président de l’ARP a eu un problème de santé passager, qu’il a surmonté et se porte bien maintenant». Puis d’annoncer que M. Ennaceur reprendra son activité lundi 24 juin en prenant part, dans la matinée, aux cérémonies marquant le 63ème anniversaire de la création de l’Armée tunisienne et, l’après-midi, une réunion des chefs des groupes parlementaires pour préparer la plénière du mardi 25 juin durant laquelle les députés doivent procéder à l’élection de l’Instance de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.

L’ARP s’est ainsi retrouvée –presque totalement- «décapitée», obligeant Faoudha Ben Fedha, deuxième vice-président, à en prendre les commandes.

Vendredi 21 juin aussi a été révélée l’hospitalisation du président Béji Caïd Essebsi à l’Hôpital militaire. Comme d’habitude, l’information a été dévoilée par une source externe à la présidence de la République –les réseaux sociaux, en l’occurrence- qui n’est intervenu qu’après coup.

En effet, après que des sources anonymes de la présidence ont démenti à El Hiwar Ettounsi et à la radio Mosaïque FM les «rumeurs» sur les informations alarmantes colportées à ce sujet, Saïda Garrach est monté au créneau pour abonder, en deux temps, dans le même sens, sur son compte Facebook.

En effet, la porte-parole de la présidence de la République a voulu, d’abord, «rassurer tous que le président de la République se porte bien, qu’il a juste subi quelques examens ordinaires à l’Hôpital militaire».

Puis, revenant à la charge, Mme Garrach a réitéré que «le président se porte bien, il n’y a pas lieu de s’inquiéter», et apporter l’explication qu’elle n’a pas donnée dans sa première intervention, à savoir que s’il «a subi quelques examens ordinaires», c’est «à la suite d’une léger malaise sans gravité».

Avant d’être hospitalisé, le chef de l’Etat a disparu de la circulation pendant cinq jours. En effet, sa dernière activité remonte au jeudi 20 juin (deux audiences accordées respectivement à Madeleine Albright, présidente du conseil d’administration du National Democratic Institute –à l’occasion de la tenue de sa réunion annuelle en Tunisie-, et à Nabil Bafoun, président de l’Instance supérieure indépendante pour les élections –ISIE).

Avant cela, il faut remonter au 14 juin pour trouver trace d’une activité, officielle du moins, du chef de l’Etat (audience à une délégation d’EuroMed Droits, le réseau méditerranéen des Droits de l’Homme).

La situation que vient de vivre la Tunisie n’a rien d’étonnant. Elle résulte de la conjonction de deux éléments, l’un conjoncturel -la situation politique tendue (plus tendue que d’habitude) dans le pays en général et à l’ARP en particulier- et d’un autre structurel : l’âge très avancé de deux des trois personnages de l’Etat (93 ans pour le président de la République en novembre prochain et 85 ans pour le président de l’ARP depuis mars 2019). Un élément négligé par la nouvelle Constitution –qui ne fixe pas de limite d’âge pour l’accession à la présidence de la République, et fait de la Tunisie une véritable gérontocratie-, qui ajoute à la fragilité du système politique et du pays, et qui devra être discutée le jour où un amendement de la loi suprême est mis sur la table.

Moncef Mahroug