En cet été caniculaire, les signaux d’alerte se multiplient. La Californie brûle, le Portugal brûle, la Suède aussi. Les scientifiques alertent encore et toujours, mais ils ont beau hurler de plus en plus fort dans les micros qui leur sont tendus, leur message semble ne pas retenir l’attention de ceux qui décident, sur un plan politique et économique.

Interrogé sur La Première, Van Ypersele, climatologue belge et ancien président du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), témoigne de cette surdité des politiques : “Je sais que je dis presque la même chose depuis 40 ans. C’est lassant de voir à quel point le niveau d’action par rapport au changement climatique est toujours extraordinairement faible“.

Pourquoi tant d’apathie face à ce qui devrait constituer un avis de mobilisation générale sur toute la planète ?

  1. Une guerre d’intox sur la réalité du phénomène

Le fait que des climatosceptiques puissent diriger la démocratie américaine crée du doute. Il est renforcé par des messages troublants comme celui venu de Pologne où sera organisée la COP 24 cette année. Les principaux syndicats de l’industrie du charbon y organisent jusqu’au 12 août une conférence pour présenter leurs ambitions énergétiques. Axées sur la défense de l’emploi dans le secteur du charbon, elles semblent difficilement compatibles avec le respect de l’Accord de Paris. Pire, le climato-sceptique américain William Harper est l’un des invités et pourra diffuser ses thèses controversées !

  1. Le changement climatique n’est pas intégré à la guerre économique actuelle

Les principaux bénéficiaires d’un modèle économique reposant sur les énergies fossiles, largement responsable de la catastrophe annoncée, sont aujourd’hui en capacité de protéger leurs intérêts. Ils utilisent pour cela une communication qui mélange intérêts économiques, protection de l’emploi et alliance objective avec des dirigeants populistes qui malmènent la démocratie. Le démantèlement des réglementations environnementales américaines ou la bataille brésilienne sur l’autorisation de diffusion massive des pesticides en sont deux exemples.

Cela est très bien montré dans Woman at war, ce film islandais poétique et déjanté sorti cet été. Une guerrière des temps modernes affronte seule la compagnie extractive Rio Tinto et son usine d’aluminium. Elle détruit les pylônes électriques qui alimentent un projet intéressant les Chinois pour provoquer un débat public dans le pays. Pour faire taire “cette femme des montagnes”, tous les éléments de la guerre moderne sont utilisés par le gouvernement islandais : drones, détections thermiques des cibles et campagne d’intox dans les médias où l’héroïne est assimilée à Al Quaida et Daesch.

  1. Les citoyens ne prennent pas la part qui leur revient dans ce combat

Cyril Dion, cofondateur du mouvement des Colibris et auteur du “Petit manuel de Résistance contemporaine”, rappelle dans une tribune au Nouveau Magazine Littéraire que “ce ne sont pas les rois qui font les révolutions” et qu’il “nous revient désormais d’engager la bascule et de faire souffler le vent du côté de l’écologie et du respect des êtres humains. Alors seulement les partis politiques, les entreprises et les lois suivront”. Nous avons le pouvoir de choisir nos combats. C’est le message que viennent nous rappeler ces acteurs engagés dans la torpeur de l’été !

Anne-Catherine Husson-Traoré, directrice générale de Novethic

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