«Je félicite les fonctionnaires du ministère des Finances pour leur grève qui dure depuis 10 jours. Je réclame le paiement de ces jours de vacances … Euh de grève. Grâce à leur mouvement, les Tunisiens ont pris conscience qu’ils sont gouvernés par des larves. La boutade de Chokri Mamoghli, ancien secrétaire d’Etat chargé du Commerce et universitaire.

La grève sauvage des agents des recettes des finances a lésé entreprises et citoyens devenus les éternelles victimes des caprices de syndicats de base qui pensent être les maîtres du monde, ne respectant même pas les décisions de leur centrale. La conséquence en a été la déclaration, qu’on peut qualifier de “courageuse“, de Noureddine Tabboubi, secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) qui a osé ce que ses prédécesseurs n’ont jamais eu le courage de faire. «Nous ne pouvons soutenir des actions syndicalistes illégales», a-t-il clamé lundi 11 décembre 2017 à Hammamet.

Mohamed Ali Boughdiri, membre du bureau exécutif de l’UGTT chargé du secteur privé, est allé dans le même sens que son SG en déclarant : «L’UGTT est une organisation nationale patriote respectueuse des lois. Elle défend ses adhérents en adoptant les moyens légaux et légitimes, et tous les syndicalistes sont tenus de se soumettre aux procédures observées par la centrale syndicale, à son règlement intérieur et aux décisions émanant du centre de décision. Tous les fautifs sont susceptibles de passer devant la Commission nationale du règlement intérieur ayant la latitude de prendre les mesures disciplinaires correspondant à la gravité des transgressions. Les sanctions pourraient être le gel du travail syndical des contrevenants».

Une première dans l’histoire de l’UGTT après le 14 janvier. Des déclarations prouvant l’engagement de la centrale à ne plus se soumettre aux actes irresponsables de certains syndicalistes inconscients des conséquences de leurs actes sur le climat socioéconomique du pays. L’UGTT paraît reprendre son rôle d’organisation patriote soucieuse de la stabilité d’une Tunisie fragilisée par un corporatisme aveugle. Une solidarité inconsciente qui en fait aujourd’hui un pays à hauts risques pour les investisseurs aussi bien nationaux qu’internationaux.

Fin de la politique de l’intimidation de la Centrale et de l’Etat ?

Les agents des recettes des finances qui avaient «perpétré» une grève du lundi 4 au vendredi 8 et qui ont décidé de la reconduire lundi 11 seront sanctionnés. D’ores et déjà, le ministère des Finances a annoncé la couleur. 7 jours des salaires des grévistes sauvages seront coupés pour le mois de décembre, même chose au mois de janvier s’ils reconduisent la grève cette semaine.

Réalisant que l’UGTT ne les couvre pas et que le ministère n’hésitera pas à appliquer les sanctions stipulées par la loi, on a observé mardi 12 décembre 2017 une reprise progressive du travail.

L’UGTT a également menacé de geler les activités syndicales de 12 activistes de la Fédération des finances. D’autant plus que, estime la centrale, les revendications des agents du secteur financier ont été prises en considération et que les négociations n’ont jamais été rompues avec les autorités de tutelle.

Dans un pays en pleine débâcle économique, les temps sont venus de mettre fin à la politique de l’intimidation de la centrale syndicale et de l’Etat. Il ne s’agit plus de rapports de force entre les dirigeants et les bases, il s’agit de réinstaurer le respect des lois.

Les agents des recettes des finances bénéficient, rappelons-le, de primes de recouvrement et d’indemnités sur les dossiers restés en suspens, sans oublier leurs primes de rendement. Ils sont soumis au régime de la fonction publique pour tout ce qui concerne les nominations, les promotions, etc. Ces agents appellent aujourd’hui à bénéficier d’un statut particulier alors que le gouvernement est en train de mettre en place un Comité des impôts et des recouvrements qui regroupe 4 directions générales concernées par la fiscalité et qui jouira d’un régime spécial.

Il s’agit de la Direction générale du contrôle fiscal, la Direction générale de la comptabilité publique et du recouvrement, la Direction des études et de la législation fiscale et de la Direction générale des avantages financiers et fiscaux.

Le but de la manœuvre est d’optimiser particulièrement l’efficience des deux premières directions, une meilleure coordination et plus de fluidité dans les échanges des informations entre elles.

«Il faut savoir terminer une grève»

L’obstination des agents des recettes de finances à vouloir bénéficier d’un statut particulier et qui tourne aujourd’hui à l’obsession est nocif et inconsidéré d’autant plus qu’ils vont être soumis à un régime spécial.

Nocif, parce qu’à ce train-là, chaque corps administratif pourrait exiger un statut particulier et nous entrerons dans un cercle vicieux. Et, inconsidéré, parce que lorsqu’on est des patriotes, on ne tape pas sur un pays en réanimation et un peuple déprimé par trop de grèves et trop d’abus administratifs.

L’Etat, qui a été pendant des années géré par les peurs et qui s’est distingué par un laxisme révoltant face aux dépassements de certains syndicats et administrations, doit assumer la responsabilité de remettre les choses dans l’ordre d’autant plus que l’UGTT –version Tabboubi- n’est plus dans le corporatisme aveugle.

Trop, c’est trop ! La Tunisie doit sortir de ce cercle vicieux des chantages aux grèves ou des grèves de zèle.

On ne peut avoir le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la fermière ! Tout le monde prétend vouloir la démocratie, il y a un prix à pays et notre pays l’a payé trop cher car renvoyé, à cause des racketteurs des droits, 40 ans en arrière sur le plan économique.

La trêve sociale n’est pas un luxe, c’est une nécessité, si les révolutionnaires d’aujourd’hui ne veulent pas payer pour leur arrogance et leur absence de patriotisme demain !

«Il faut savoir terminer une grève dès que la satisfaction a été obtenue. Il faut même savoir consentir au compromis si toutes les revendications n’ont pas encore été acceptées mais que l’on a obtenu la victoire sur les plus revendications essentielles», dixit Maurice Thorez, patron du PCF, dans un discours tenu le 11 juin 1936 à Paris à l’attention des ouvriers pour leur demander de reprendre le travail.

On devrait s’en inspirer !

Amel Belhadj Ali