Tunisie – Economie : Le Cercle Kheireddine tire la sonnette d’alarme

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«Nous sommes tous préoccupés par la situation économique et sociale du pays. Le message que je veux lancer est que nous avons une dernière chance et une formidable opportunité à saisir» pour redresser la barre.

Dans son allocution d’ouverture, Afif Chelbi donne ainsi lors de la conférence «Situation économique de la Tunisie: défis et opportunités», organisée samedi 19 décembre 2015 par le Cercle Kheireddine dont il préside le Comité d’orientation stratégique: inquiétude mais un tant soit d’optimisme quant à la possibilité de redresser la barre.

Principal conférencier, Marouane El Abassi, senior economist à la Banque mondiale et son représentant en Libye, a accepté de prendre la parole à cette rencontre pour, selon M. Chelbi, «lancer un message d’alerte».

L’expert de la Banque mondiale dépeint un tableau guère reluisant de l’économie tunisienne. «On termine l’année avec un taux de croissance proche de zéro, un taux de chômage qui baisse mais reste élevé, notamment pour les diplômés de l’université –supérieur à 30%-, l’inflation est maîtrisée -4,2%- mais le pouvoir d’achat se détériore, la position extérieure reste fragile, les réserves représentent près de 3 mois d’importation mais c’est grâce aux financements extérieurs, le déficit budgétaire s’aggrave notamment à cause de la hausse des salaires qui représentent 14% du PIB, au-dessus des normes internationales, etc.».

Pour ce qui est des perspectives, le représentant de la Banque mondiale en Libye ne croît pas que «la croissance du PIB va dépasser les 2,5% en 2016» et qu’on n’atteindra ce palier qu’«à certaines conditions, puisque des facteurs internes et externes qu’on ne maîtrise pas, comme les attentats et la situation en Libye», peuvent ralentir la croissance.

Mais la Tunisie restera confrontée à des «défis structurels»: croissance à faible productivité, gains fragiles en termes de baisse de la pauvreté, disparités régionales dans l’accès aux servies publics, exclusion sociale, système de gouvernance favorisant les situations de rente, baisse de l’investissement intérieur et étranger, etc.

Aussi inquiet que Marouane El Abassi, Mustapha Kamel Nabli s’inquiète surtout pour le court terme. Et son inquiétude tient en particulier à l’évolution du déficit de la balance commerciale, un indicateur qu’il faut «surveiller de très près car il y a un risque majeur que la Tunisie entre dans une phase d’instabilité financière».

Ce risque provient, selon Mustapha Kamel Nabli, du fait que «notre capacité de financer le déficit n’existe plus» et que le financement extérieur sera d’autant plus difficile à avoir dans l’avenir que la Tunisie va commencer à rembourser en 2017 les prêts contractés en 2013 et 2014. Et la crise financière qui guette peut avoir pour conséquence «de nous empêcher de mener les réformes». Réformes qui, estime l’ancien gouverneur de la Banque centrale de Tunsiie, sont rendues très difficiles à mettre en œuvre par le système politique en place.

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Comment faire alors pour sortir de cette difficile situation? M. Nabli propose, pour ce faire, d’œuvrer «sérieusement» à la relance de l’investissement –privé et public- et de l’exportation qui continuent de reculer.