Salon de l’Agriculture : la vitrine festive d’un secteur inquiet

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évrier 2015 à Paris (Photo : Stéphane de Sakutin)

[20/02/2015 13:55:20] Paris (AFP) Veaux, vaches, cochons et produits du terroir déferlent sur Paris samedi pour le Salon de l’Agriculture, vitrine festive d’un secteur inquiet, toujours plus high-tech et industrialisé, qui rapproche dix jours durant les citadins de leurs campagnes.

Du 21 février au 1er mars, après une inauguration en fanfare à l’heure de la traite par le président François Hollande, plus de 700.000 visiteurs sont espérés Porte de Versailles pour admirer les 4.000 animaux exposés dont 1.200 bovins et goûter aux saveurs régionales.

Dans le contexte des attentats de Paris et Copenhague et pour ne pas risquer de voir la fête gâchée, cette ferme gigantesque de 39.000 m2 sera fortement gardée, avec des effectifs de sécurité en hausse de 20% par rapport à 2014, soit quelque 300 vigiles en tenue et en civil dans les allées.

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ée du parc des expositions le 19 février 2015 à Paris (Photo : François Guillot)

Comme tous les deux ans, à partir de dimanche, se tiendra simultanément à Villepinte au nord de Paris le Salon international du machinisme agricole (Sima), un marché estimé à 134 milliards de dollars dans le monde, dont l’Europe est le premier producteur, avec des tracteurs au prix d’une Ferrari et des engins rutilants, bourrés de capteurs et d’électronique, pilotés par drone et GPS.

Car le secteur, bien qu’attaché dans l’imaginaire populaire à la vision bucolique et champêtre de la ferme d’antan, est en réalité une puissante mécanique soumise à une doublecontrainte: nourrir une humanité de bientôt 9,5 milliards d’individus en 2050 et contribuer à la lutte contre le changement climatique.

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énérale en date du 24 février 2013 Salon international du machinisme agricole (Sima) à Villepinte (Photo : Patrick Kovarik)

L’agriculture est responsable d’environ 20% des émissions de gaz à effet de serre en France dont celles de l’élevage, estimées au niveau mondial à 15% du total. Pour cette raison, ce 52e Salon international de l’agriculture (SIA) est placé sous le signe de l’innovation, alors que Paris accueillera en décembre la conférence des Nations unies sur le changement climatique.

Les bonnes pratiques sont porteuses de solutions, affirme le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll, promoteur de l’agroécologie, qui veut montrer “qu’on est capable de trouver par l’innovation les solutions au défi climatique”.

– Un terroir survendu –

La tendance de l’agriculture moderne est d’ailleurs à la précision: la délivrance du bon dosage – d’engrais, de pesticide ou d’eau – directement sur la plante tandis que le développement de la robotique finira par garder l’exploitant loin du champ. “Ce n’est pas qu’on va se passer de la main d’oeuvre qui existe mais plutôt résoudre ainsi l’absence de main d’oeuvre disponible”, nuance Jean-Marc Bournigal, président de l’Irstea, l’Institut de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture.

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agriculture (Photo : L. Saubadu/A.Bommenel, -)

Car malgré l’importance des chiffres – l’agriculture fournit 70% des besoins de l’agroalimentaire, premier secteur industriel de France avec 160,5 milliards de chiffre d’affaires en 2013 – le monde agricole est en crise permanente. L’effondrement du cours a plombé en 2014 de 40% les revenus des céréaliers, jusqu’alors considérés comme les “nantis” du secteur.

Avec 11.500 euros par an, ils se classent désormais en queue de peloton, derrière les arboriculteurs (13.400 euros) et les éleveurs bovins (14.500 euros). L’embargo russe décrété contre les produits européens a contribué à la crise. Et la fin du système des quotas européens, programmée au 31 mars par Bruxelles, en fait craindre une autre pour les éleveurs laitiers.

“Ce n’est pas une ambiance festive cette année” avec des “marchés mondiaux très dégradés”, l'”embargo russe”, les “charges” et “un niveau de réglementations et normes qui n’a jamais été aussi excessif”, énumère pour l’AFP Xavier Beulin, président du puissant syndicat agricole FNSEA.

Tous savent que l’agriculture folklorique a fait long feu, même si la France a su, contrairement à ses voisins du nord de l’Europe, préserver un modèle familial. Et même si les grandes enseignes présentes sur le Salon se battent à coup de produits “de nos régions” et survendent le “terroir”.

Signe des temps, le Salon ouvre ses portes cette année à l’enseigne Lidl, ex-championne du hard-discount et qui s’affiche en pleine révolution culturelle du Made in France.

Au Salon, son stand sera d’ailleurs organisé “comme une place de village”, annonce le directeur des achats Michel Biero. Un village de dimension planétaire.