L’Argentine verse une échéance de dette à Buenos Aires, malgré un avertissement

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à ses partisans après une cérémonie à Buenos Aires le 30 septembre 2014 (Photo : Juan Mabromata)

[01/10/2014 05:30:48] Buenos Aires (AFP) L?Argentine a déposé mardi une échéance de sa dette souveraine sur un fonds spécial à Buenos Aires, une man?uvre expérimentale visant à assurer le remboursement d’une majorité de ses créanciers, jugée illégale par un juge américain.

Dans un communiqué, le ministère argentin de l’Economie a précisé que le versement était de 161 millions de dollars et que la 3e économie d’Amérique latine réaffirmait ainsi “son engagement inébranlable à honorer ses obligations envers ses créanciers”, trois mois après le blocage à New York de la précédente échéance de 539 millions de dollars.

Ce changement controversé de lieu de paiement de la dette a été validé par le Parlement argentin.

Un tribunal new-yorkais a estimé lundi que l’Argentine avait usé de voies “illégales” pour contourner un précédent jugement, l’enjoignant de rembourser en priorité une minorité de créanciers, des fonds “vautours”, pour pouvoir continuer à payer ses autres créanciers, qui représentent 93% des détenteurs de bons.

Le juge Thomas Griesa a agité la menace de sanctions si Buenos Aires continuait d’ignorer une décision judiciaire américaine de juin 2014.

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ésidente après une cérémonie au palais du gouvernement à Buenos Aires le 30 septembre 2014 (Photo : Juan Mabromata)

Lors d’une intervention télévisée mardi soir, la présidente argentine de centre gauche Cristina Kirchner a réaffirmé la volonté argentine de payer ses dettes et a annoncé le versement le 31 décembre, sur un fonds à Buenos Aires, d’une avance de 100 millions de dollars aux fonds spéculatifs qui refusent toute restructuration depuis dix ans (7% des créanciers), dont les fonds “vautours”.

Mme Kirchner s’est ensuite moquée de la décision “du juge municipal Thomas Griesa”, “un juge sénile” (il a 82 ans, ndlr).

“Jusqu’où iront-ils ? Vont-ils me mettre en prison la prochaine fois que je vais à New York” avant de lancer, “s’il m’arrive quelque chose, ne regardez pas vers l’Orient, regardez vers le Nord”, après avoir dit la semaine dernière qu’elle avait reçu des menaces des djihadistes de l’Etat islamique.

Buenos Aires estime que les Etats-Unis sont responsables de leurs institutions et du pouvoir judiciaire, même si la justice est indépendante.

– Sanction symbolique –

Pour l’économiste argentin Nicolas Dujovne, “la désobéissance ou un outrage, c’est une sanction symbolique, une amende quotidienne qui peut être élevée pour un particulier, mais faible pour un Etat”.

Fin juillet, les agences de notation ont déclaré l’Argentine en “défaut de paiement partiel” après que la précédente échéance de la dette argentine, de 539 millions de dollars, a été bloquée fin juin à New York sur décision du juge Griesa.

Les fonds d’investissement détenteurs de créances restructurées vont-ils se prêter à l’initiative de l’Argentine d’être payés à Buenos Aires, dans une man?uvre de contournement de la justice américaine ? Peu probable. Même si le milliardaire mexicain David Martinez a d’ores et déjà fait savoir qu’il ne voyait pas d’inconvénient à se présenter au guichet ouvert à Buenos Aires.

Les créanciers peuvent également demander à être payés à Paris, selon une loi votée récemment. Cela ne figure pas dans la loi, mais la présidente argentine a promis de payer sur la place financière que le créancier déterminera.

Mercredi dernier à la tribune de l’ONU, Mme Kirchner, a dénoncé le “harcèlement” des fonds “vautours” dans le litige sur sa dette et accusé le système judiciaire américain de “complicité”, tout en réitérant la volonté de son pays d’honorer l’échéancier convenu avec 93% des créanciers de l’Argentine, qui touchent 30% de leur mise initiale, plus des intérêts.

En quête de soutiens internationaux, Mme Kirchner s’était rendue au Vatican samedi, où elle dit avoir reçu le soutien du pape François dans son bras de fer avec les fonds “vautours”.

Le processus de désendettement argentin est fragilisé depuis le jugement favorable aux fonds “vautours” détenant moins d’1% de la dette souveraine, en contradiction à la clause RUFO figurant dans les contrats signés avec les créanciers restructurés, qui stipule que l’Argentine ne doit pas faire une meilleure offre aux détenteurs de bons ayant refusé tout allègement de dette (7%).

La clause RUFO expire le 1er janvier et d’ici là Buenos Aires cherche à gagner du temps avant de sceller un accord d’indemnisation avec les fonds “vautours”, selon des sources officielles.