Chadly Ayari explique la dépréciation du dinar tunisien…

chedly_ayari-2013.jpgA force de monter au créneau pour gérer des situations «chaudes», inhérentes aux difficultés naturelles du processus de transition, Chadly Ayari ressemble de plus en plus à un pompier. La énième intervention de la Banque centrale de Tunisie –qu’il dirige depuis juillet 2012- a eu lieu cette semaine et visait à éteindre l’«incendie» de la soudaine accélération de la baisse du dinar, notamment par rapport à l’euro et au dollar.

A partir du 8 mai 2013, le dinar a vu sa valeur se déprécier par rapport à ces deux monnaies qui ont atteint respectivement un «pic» de 2,220 dinars et 1,690 dinar. La BCT a réagi en injectant des devises –près de 1,6 milliard de dinars- ce qui a permis non pas d’enrayer la «glissade» du dinar mais d’en réduire l’ampleur. De fait, une semaine après le début de la «poussée de fièvre», le dinar a commencé à se stabiliser, cotant respectivement 2,130 contre l’euro et 1,650 contre le dollar. «C’était là notre objectif et pas de faire réapprécier le dinar», commente le gouverneur de la BCT. Qui s’est abstenu de prendre la parole rapidement à ce sujet parce que ses services, explique-t-il, lui ont dit de ne pas «s’exciter». Aussi, a-t-il décidé «d’attendre de voir comment le marché allait réagir à l’injection de devises par la BCT» pour s’exprimer sur le sujet».

Au sein de cette institution, on impute l’emballement du marché des devises à une série de facteurs: des facteurs «non-économiques» -situation politique et sécuritaire notamment- «pas favorables», et détérioration des facteurs économiques, comme le taux de croissance durant le 1er trimestre 2013 –2,7%- inférieur aux prévisions, l’investissement –tant national qu’étranger- et un tourisme en berne, une inflation -6,4%- qui «résiste aux thérapies», selon le mot de M. Chedly Ayari, et, enfin, une forte demande d’achat de devises (Tunisiana –pour transfert des dividendes-, STIR, STEG, ETAP, etc.) totalisant près de 350 millions de dollars. Ce qui a constitué «un choc dans une économie pas riche en devises».

En outre, le patron de la «mère des banques» est convaincu que la spéculation a également joué un rôle. Toutefois, la BCT n’entend pas, du moins pour l’instant, «faire la chasse aux spéculateurs». Car «pour tuer la spéculation, il faut en tuer les causes. Ce qui implique que toutes les devises disponibles dans le pays soient ramenées à la BCT. Personne ne doit avoir de “positions longues“ -c’est-à-dire au-delà de trois mois- en devises».

Mais après avoir –dans un mouvement «de libéralisation excessive autorisé de 100% des devises chez les exportateurs»- il est difficile de faire marche arrière, avoue le gouverneur de la BCT. Qui reconnaît, néanmoins, que la question a été «longuement débattue» et qu’il a été décidé de se donner «encore un moment pour réfléchir» sur la mesure à prendre et de garder, entretemps, «toutes les options ouvertes».