En Asie, le tourisme devient outil de protection de l’environnement

photo_1300795880097-1-1.jpg
île de Palawan, aux Philippines, le 18 février 2011 (Photo : Noel Celis)

[22/03/2011 12:20:59] PUERTO PRINCESA (Philippines) (AFP) Abner Abrigo se délectait autrefois de tortue et de dauphin en marinade, jusqu’à ce que ce pêcheur réalise que ces espèces pouvaient lui permettre de gagner sa vie, comme attractions touristiques.

Sa recette préférée était l’adobo de dauphin, une marinade d’ail et de soja d’inspiration espagnole, très populaire chez les Philippins.

Aujourd’hui, lorsqu’ils aperçoivent des cétacés en mer, les pêcheurs de l’île de Palawan, aux plages de sable fin enchanteresses dans l’ouest des Philippines, signalent leur présence aux bateaux de touristes. Ils gagnent alors 25 pesos (40 centimes d’euros) par passager.

“Parfois ils ont plus de 20 passagers, et c’est le jackpot”, sourit ce mince pêcheur de 28 ans. “L’argent que nous tirons de ces excursions fait une grande différence”.

Le tourisme est devenu parfois un outil majeur dans la protection de l’environnement en Asie, des mangroves des Philippines aux tortues de Malaisie, en passant par les produits “bio” vendus aux touristes par la minorité Qiang dans les montagnes du sud-ouest de la Chine.

photo_1300796033684-1-1.jpg
île de Palawan, aux Philippines, le 16 février 2011 (Photo : Noel Celis)

En Indonésie, des “éco-lodges” guident les visiteurs sur la trace des orangs-outans, menacés de disparition par la déforestation et l’exploitation minière.

L’industrie touristique et les gouvernements s’adaptent à la demande en plein essor de tourisme vert.

Les tour-opérateurs proposent désormais à leurs clients d’acheter des crédits carbone pour compenser leurs déplacements en avion, ou de séjourner dans des hôtels combinant luxe et souci de l’environnement.

“L’écotourisme reste une niche, mais elle suscite de plus en plus d’intérêt”, explique à l’AFP John Koldowski, haut responsable de l’Association du tourisme dans la région Asie Pacifique (PATA).

Le Cambodge est devenu récemment le premier pays d’Asie du Sud-Est à adhérer aux principes du Conseil mondial du tourisme durable (GSTC), qui, sous l’égide de l’ONU, veut promouvoir un tourisme respectueux de l’environnement et assurer aux communautés concernées plus de retombées économiques.

Le gouvernement, les ONG et la population développent l’éco-tourisme dans l’île de Palawan, qui abrite parmi les plus belles plages d’Asie et deux sites classés au patrimoine mondial de l’Unesco. Des excursions pour voir des dauphins et baleines sont organisées depuis deux ans dans le cadre du programme Bayanijuan.

photo_1300796212985-1-1.jpg
évrier 2011 (Photo : Noel Celis)

Le maire de Puerto Princesa Edward Hagedorn a depuis longtemps la vision que la protection de la nature est aussi un gagne-pain.

Lorsqu’il a interdit les coupes de bois et l’activité minière en arrivant au pouvoir au 1992, il avait la conviction que la protection de l’environnement attirerait des touristes et à long terme ferait vivre ses administrés.

Le nombre de touristes est passé de 12.000 en 1992 à 425.000 en 2010. “Maintenant que le nombre de visiteurs augmente, les revenus s’accroissent pour la population. Mais si nous avions laissé faire la déforestation et l’exploitation minière, ces emplois ne seraient que temporaires”, explique Edward Hagedorn.

Pendant de longues années, Edwin Bermejo, 43 ans, a utilisé dans la spectaculaire Honda Bay des filets raclant les fonds marins, destructeurs, comme la dynamite et le cyanure, pour les coraux et la biodiversité. “On ne comprenait pas les conséquences de nos actions”, confie-t-il aujourd’hui.

Les stocks de poissons s’amenuisant, lui et d’autres pêcheurs ont utilisé leurs embarcations pour transporter les touristes d’île en île.

Ils coopèrent aussi avec le gouvernement local pour prohiber des techniques de pêches destructrices, patrouillent les mers et dénoncent les infractions aux autorités.

“Les stocks de poisson ont commencé à augmenter. Cela ne serait pas arrivé si on avait continué comme avant”, explique Bermejo.

Et sa nouvelle activité marche tellement bien que la petite communauté envisage d’emprunter pour doubler sa flotte de 66 embarcations et faire face à l’afflux récent de touristes.