Icesave : incertitudes et menaces planent sur l’Islande candidate à l’UE

[06/01/2010 16:04:14] REYKJAVIK (AFP)

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à Reykjavik (Photo : Olivier Morin)

L’Islande est entrée mercredi dans une période d’incertitudes politiques et financières, particulièrement vis-à-vis de l’Union européenne qu’elle souhaite rejoindre, après le véto présidentiel à la loi dite Icesave sur le remboursement des clients étrangers de la banque éponyme en faillite.

Le président islandais Olafur Ragnar Grimsson a refusé mardi, sous la pression populaire, de ratifier l’accord de remboursement prévu en faveur des clients essentiellement britanniques et néerlandais de la banque Icesave, et entend le soumettre à un référendum qui pourrait avoir lieu le 20 février.

L’idée doit encore être débattue au parlement vendredi, a déclaré à l’AFP un conseiller politique du Premier ministre social-démocrate Johanna Sigurdardottir. Ce dernier a mis sa démission dans la balance mais aucune décision n’a encore été prise, ouvrant une période d’incertitudes politiques.

La loi Icesave, adoptée à une très courte majorité par le Parlement dans la nuit du 30 au 31 décembre, est destinée à rembourser 3,8 milliards d’euros avancés par le Royaume-Uni et les Pays-Bas, pour indemniser plus de 320.000 de leurs citoyens lésés par la faillite de la banque islandaise.

Cette décision avait immédiatement provoqué une vive protestation populaire en Islande.

Quelque 60.000 personnes, soit le quart de l’électorat, ont signé une pétition de protestation contre cette loi, redoutant qu’elle ne plonge le pays dans deux décennies de pauvreté et appelé à un référendum.

Selon un sondage conduit mardi auprès de 877 Islandais et publié mercredi par l’institut de sondage MMR, 58% des personnes interrogées voteront contre la loi Icesave au referendum, et 42% la soutiendront.

A l’incertitude politique s’ajoutent les menaces financières. La décicion du président islandais a poussé l’agence Standard & Poor’s à placer sous surveillance négative la note souveraine de l’Islande, laissant entendre que cette note pourrait être revue à la baisse, “d’un ou deux points” d’ici un mois.

Fitch, l’une des trois autres grandes agences de notation, était allée plus loin mardi en annonçant avoir d’ores et déjà abaissé sa note de BBB- à BB+, rétrogradant ainsi l’Islande en terrain spéculatif. Moody’s, dernière de ces agences de notations, a affirmé de son côté mercredi que la décision du président islandais allait “compliquer” la situation, mais sans prendre aucune décision quant à sa propre notation.

Lourde de conséquences pour l’avenir européen de l’Islande, le véto présidentiel a jeté un froid à Bruxelles. La Commission européenne a ainsi laissé entendre mercredi que l’affaire Icesave pourrait avoir un impact négatif sur l’ambition de l’Islande d’adhérer à l’UE.

“L’avis que nous devons rendre (aux Etats de l’UE qui auront le dernier mot) tiendra compte de toutes les considérations pertinentes pour l’évaluation” de la capacité de l’Islande à remplir “tous” les critères d’adhésion, “y compris les critères économiques”, a déclaré un porte-parole de la Commission, Amadeu Altafaj Tardio.

“Et dans ce contexte, des questions comme l’affaire Icesave seront analysées de très près”, a-t-il ajouté.

Le porte-parole était interrogé sur une mise en garde adressée mardi soir par le secrétaire d’Etat britannique aux Finances, Paul Myners. Ce dernier avait averti que le blocage du remboursement des clients étrangers d’Icesave “devrait être pris en compte dans notre décision de soutenir ou non la candidature de l’Islande à entrer dans l’UE”.

M. Myners avait aussi estimé que l’Islande risquait de s’isoler au niveau international en se coupant “du système financier international” et en donnant d’elle l’image d’un pays avec lequel il est difficile de “faire des affaires”.

Reykjavik a dit espérer entrer dans l’UE à l’horizon 2012. L’Islande, membre de l’espace Schengen et de l’espace économique européen, applique déjà près des trois quarts des directives européennes.