Cultiver la truffe noire du Périgord, une affaire de “passion” et de patience

 
 
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Michel Liabot travaille en compagnie de sa chienne Souria, le 20 décembre 2007 dans sa truffière à Proissans. (Photo : Patrick Bernard)

[22/12/2007 12:20:20] PROISSANS (Dordogne) (AFP) Accompagné de Souria, une border colley “un peu bâtarde” et chahuteuse, Michel Liabot, agriculteur retraité en Dordogne, est fin prêt pour récolter le fruit de son labeur: tournevis et Opinel en main, il va “caver” ses truffes noires  du Périgord.

Sur les hauteurs de Sarlat, M. Liabot a planté 1,5 ha de chênes verts, essence qui favorise le mieux l’apparition, toujours un peu mystérieuse malgré les recherches scientifiques, de la Tuber Melanosporum, autrement connue sous le nom de truffe noire du Périgord ou “truffe mélano”, la perle des truffes françaises.

Si aujourd’hui, 95% des truffes produites en France sont issues de truffières cultivées, explique Jean-Marc Olivier, coordinateur national de la recherche sur la truffe à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), elle ne s’offre pas pour autant au premier venu.

“Il faut de la patience, un bon terrain et de la patience”, résume Michel Liabot, qui a planté ses premiers plants mycorhizés – inoculés avec des spores de truffes, selon une méthode développée par l’INRA dans les années 70 – il y a une quinzaine d’années, pour assouvir “une passion” transmise par un grand-oncle et “transmettre un savoir-faire à (ses) petits-enfants”.

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Michel Liabot montre une truffe à Souria, le 20 décembre 2007 dans sa truffière à Proissans, (Photo : Patrick Bernard)

La culture et le cavage (ramassage) avec un chien truffier de la “mélano” est une “passion” donc, mais jamais au grand jamais “une activité”. Tout au plus un passe-temps offrant “un complément de revenu”, sorte de 13e mois pour agriculteurs aux maigres retraites, concède M. Liabot, qui lui, préfère carrément offrir sa récolte.

Il est vrai qu’avec des tarifs au détail flirtant avec les 1.000 euros le kilo pour de la mélano “qualité extra”, on peut s’attendre à voir pousser les vocations comme les champignons après la pluie.

C’est sans compter sur les aléas entourant la culture du précieux tubercule.

Depuis que l’INRA s’est penchée sur la question dans un contexte de chute de la production, la recherche a certes obtenu deux résultats majeurs: “Une cartographie des sols au potentiel truffier” et “la mise au point des arbres mycorhizés”, mais pour autant, “l’irrégularité” de la production n’est toujours pas maîtrisée, explique le chercheur Jean-Marc Olivier.

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Michel Liabot hume le parfum de sa truffe (Photo : Patrick Bernard)

“Nous nous attachons a définir un mode d’emploi des truffières”, poursuit-il. Avec des résultats encourageants: selon des professionnels périgourdins, dans de bonnes conditions, on peut parvenir à 20% d’arbres producteurs sur une plantation, qui en revanche ne donnera pas tant que les plants n’ont pas atteint une petite dizaine d’années.

La France compterait 20.000 ha de truffières, pour une production officielle (hors auto-consommation ou vente de la main à la main) de 40 à 50 t par an, selon l’INRA.

Mais l’objectif n’est pas d’atteindre un niveau de production industrielle, seulement de “rentabiliser des terrains qui autrement seraient en friche”, assure M. Olivier. A ce titre, les plantations sont d’ailleurs subventionnées par les collectivités locales.

Dans un milieu où le secret entoure parfois des méthodes de culture frôlant la superstition, Michel Liabot lui, ne jure que par la méthode “naturelle” et l’observation: “Vous voyez, là, le brûlé (zone où l’herbe ne pousse pas au pied d’un arbre truffier, NDLR) ? Ca veut dire qu’il y en a. Mais ça n’est pas obligé…”

Et enjoint à la patience: “Les meilleures se ramassent en janvier ou février”.

 22/12/2007 12:20:20 – © 2007 AFP