Budget : la France a peu de chances d’atteindre ses objectifs en 2010

 
 
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Le ministre du Budget Eric Woerth lors d’une conférence de presse, le 4 juillet 2007 à Paris (Photo : Stéphane de Sakutin )

[16/07/2007 17:21:57] PARIS (AFP) Le ministre du Budget Eric Woerth a mis la barre très haut en annonçant lundi qu’il faudrait à la France une croissance de 3% pour respecter ses engagements européens en matière de déficits et de dette publique, un objectif difficilement réalisable.

Si la croissance “est au rendez-vous et atteint 3%, le double objectif d’une dette inférieure à 60% du PIB et d’un équilibre des finances publiques pourra être atteint dès 2010”, a déclaré le ministre lors du débat d’orientation budgétaire à l’Assemblée nationale.

“Sinon, il sera décalé, mais au plus tard en 2012, pour peu que la croissance atteigne 2,25%”, a-t-il ajouté.

Le gouvernement de Dominique de Villepin s’était engagé en avril, aux côtés des autres pays de la zone euro, à réduire dès 2010, la dette de la France sous 60% du produit intérieur brut (PIB) et à annuler le déficit des finances publiques.

Mais le président Nicolas Sarkozy, élu début mai, a repoussé ce double objectif à 2012, suscitant l’ire de ses partenaires européens.

Il veut accorder la priorité à un programme de relance de la demande coûteux, axé sur un ensemble de réformes fiscales, dit “paquet fiscal”, dont le prix est estimé par le gouvernement à 13 milliards de dollars par an en rythme de croisière.

Alors que ce dernier table sur une croissance de 2,25 à 2,5% en 2007, et de 2,5% en 2008, il semble donc très hypothétique d’atteindre les engagements communautaires dès 2010.

L’Insee prévoit une croissance de seulement 2,1% pour 2007, et l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) anticipe 2,2% en 2007 et 2008.

Optimiste, l’Observatoire français des conjonctures économiques s’attend à une croissance de 2,9% en 2008. Mathieu Plane, économiste de l’OFCE, juge “réalisable” un niveau de 3% de croissance sur les trois prochaines années, rappelant qu’il a été atteint à la fin des années 80 et 90.

Il remarque toutefois qu’un rythme aussi soutenu nécessite qu’il n’y ait “pas de flambée des prix du pétrole, pas d’augmentation trop forte de l’euro, pas de politique trop restrictive de la part de la Banque centrale européenne (BCE)”.

Mais l’euro et le pétrole surfent à des niveaux jamais atteints et la BCE prévoit de poursuivre son tour de vis monétaire.

La plupart des économistes se montrent très circonspects. Chez HSBC, Natixis, ou BNP-Paribas, ils tablent sur une croissance très inférieure à 3%, comprise entre 1,8 et 2,1% entre 2007 et 2008, et jugent largement irréalisable l’assainissement des finances publiques en 2010.

Pire: plusieurs pronostiquent une détérioration.

“Je table sur une dégradation des finances publiques”, à cause du coût du paquet fiscal, d’une croissance inférieure aux prévisions gouvernementales et de taux d’intérêt qui augmentent, ce qui alourdit la charge de la dette, souligne Mathilde Lemoine, chef économiste d’HSBC.

“Le point de croissance qui manque manquera encore à l’issue des réformes présentées”, poursuit Jean-Christophe Caffet, économiste de Natixis, qui juge que “le paquet fiscal est destiné à stimuler la demande” alors qu'”en France c’est l’offre qui pose problème”.

Dans ces conditions, “les déficit publics pourraient franchir le seuil 3% l’an prochain, avec un ratio de dette qui passerait à un peu plus de 65% en 2009”, précise-t-il.

Le gouvernement table sur un déficit de 2,4% du PIB fin 2007 et sur une dette stabilisée à 63,7% du PIB pour 2008.

Le rapporteur général du budget à l’Assemblée, Gilles Carrez (UMP), l’a lui-même admis la semaine dernière: “à 2,5% de croissance, on passe, à 2% on aura des problèmes”.

 16/07/2007 17:21:57 – © 2007 AFP