Le tore et le travers

Pour les non initiés, la courbe qui représente la forme d’un pneu est le
tore et un pneu fait partie de la famille des 5 unités qui font que ce parc
de plus de 100.000 véhicules –y compris les véhicules étatiques- roule. Et
le pneu dont le coût reste marginal par rapport au coût du véhicule –entre 1
et 2%- est comme l’eau potable– qui, elle aussi, demande un budget
négligeable par an et par personne -15 à 20 DT– vital pour le fonctionnement
de l’économie. Mais il y a de grandes différences entre les 2 produits –la
desserte de l’eau est assurée par un monopole étatique, monopole qui se
justifie vu les contraintes d’investissement et de qualité– les pneus eux
posent un autre problème : où les trouver et dans quelles conditions
économiques ?

Prenons un exemple de quelqu’un qui dispose d’une voiture comme on en voit
beaucoup ; sur le marché, le remplacement de 5 pneus aurait demandé un
budget de 500 DT en moyenne, et peut aller par pneu jusqu’à 1000 DT pour des
gros camions. Dans le prix de vente sont inclus la TVA, les frais de douanes
et la marge du fournisseur et du revendeur. Un calcul rapide intégrant tous
ces paramètres montre que le coefficient multiplicateur est compris entre
1.8 et 2 par rapport au prix hors taxe qui, pour un pneu vendu auprès d’un
fournisseur patenté à 100 DT, arrive au port de la Goulette à un coût de 50
DT …. Et ce qui est curieux quand vous allez sur le marché dit parallèle
mais qui est extrêmement structuré et organisé, on retrouve le même pneu à…
50 DT. Comme quoi, les parallélistes seraient d’excellents économistes.

Imaginez que les 100.000 véhicules qui totalisent 500.000 pneus dont environ
20% doivent être changés par an, s’alimentent sur le marché parallèle, cela
fait en moyenne 5 millions de DT qui disparaissent dans la nature et qui ne
passent pas par le circuit normal de l’économie …. Si on extrapole à
beaucoup d’autres choses, on peut estimer que le chiffre d’affaires du
marché dit parallèle oscille entre une fourchette de 50 et 100 millions de
dinars ……… Est-ce une broutille ? Je n’en sais rien. Ce chiffre est-il
réel, vu que le marché est parallèle, c’est-à-dire que lui et les
conseillers fiscaux ne se rejoindront jamais ? Faut-il sévir ? Sert-il de
soupape de sûreté ? Faut-il baisser les taxes pour le juguler ? Faut-il,
faut-il …..

De par la nature, un pays dont l’indice de cote –rapport de la superficie à la
longueur des côtes et des frontières– devient inférieur à 1000 est très
sensible à ce phénomène surtout si les pays qui l’entourent présentent des
avantages économiques ….

Mes chers lecteurs et lectrices, qui avez ces temps-ci beaucoup critiqué mes
papiers sur le fond et la forme, voilà donc un papier sérieux qui sert à
réfléchir sur le marché parallèle comme je peux en faire et comme je peux
dérailler –je précise que les termes utilisés dans le dialogue de sourds ont
été dits et écrits par d’illustres personnages occidentaux– et aussi que de
par ma tâche de chroniqueuse qui est un peu à la recherche du temps perdu,
je pratique une langue spontanée et digressive ayant lu et relu tous les
livres de Frédéric Dard écrits sous le pseudonyme de San Antonio …