Ces derniers temps, les bonnes nouvelles sur la relance de mégaprojets structurants en stand bye depuis des années, se succèdent et ne se ressemblent pas. Un mois après l’octroi, début janvier dernier, du marché du Pont fixe de Bizerte à une firme chinoise, un conseil ministériel a approuvé, le 6 février 2024, le projet d’extension de l’aéroport Tunis-Carthage.

Objectif à terme : doter l’aéroport d’une nouvelle capacité de 8 millions de passagers par an, ce qui portera la capacité totale de l’aéroport à 13 millions de passagers par an.

Dans le détail, ce projet d’extension comprend cinq principales composantes : construction d’un nouveau terminal aérien d’une superficie couverte d’environ 80 000 mètres carrés, remplacement et agrandissement du viaduc de l’aéroport, construction d’une nouvelle tour de contrôle, construction de la ligne de métro Lac de Tunis- Bhar Lazreg, construction d’une ligne ferroviaire à grande vitesse reliant les aéroports de Tunis Carthage Enfidha-Hammamet.

L’extension était un scénario parmi d’autres

Cette deuxième extension, tout comme la première qui a eu dans les années 90, sont prévues par le plan de développement de l’aéroport depuis son inauguration en 1972.
Elle est retenue par une étude du ministère du Transport visant à estimer les besoins de la Tunisie à l’horizon 2040 en matière d’infrastructure de transport, parmi trois scénarios pour l’aéroport de Tunis-Carthage.

“Le transfert de l’aéroport de Tunis-Carthage n’est pas défendable d’un point de vue économique.” – FMI et Banque Mondiale

Les deux autres scénarios prévoient la construction d’un nouvel aéroport qui viendrait s’ajouter à celui de Tunis-Carthage ou le transfert de l’aéroport en dehors de la capitale. Le nouvel aéroport serait opérationnel dans 10 ans et se situerait à 30 km du centre de la capitale. Trois sites ont été identifiés: Utique (gouvernorat de Bizerte), Borj Touil (gouvernorat de l’Ariana) et Bouhnach (gouvernorat de la Manouba).

Le transfert une option peu sérieuse pour les institutions de Bretton Wood’s

Lors de la décennie noire 2011-2021, des ministres de transport cupides, encouragés par des prédateurs immobiliers moyennant apparemment d’éventuelles juteuses commissions, ont fait flèche de tout bois pour faire passer le troisième scénario, c’est à dire le transfert de l’aéroport en dehors de la capitale, et ce, en dépit de l’opposition à ce projet des institutions de Bretton Wood, le FMI et la Banque Mondiale.

L’argumentaire de ces derniers est simple. Ils estiment que d’un point de vue économique, cette option pour le transfert n’est pas défendable à une période où l’économie tunisienne passe par une crise aiguë, et dans la mesure où des alternatives existent pour faire face aux pressions que pourrait connaître l’aéroport de Tunis-Carthage.

“De nos jours, les distances ne se mesurent pas en nombre de kilomètres mais en nombre de minutes.” – Sarra Rejeb

Parmi ces alternatives, ils citent la proximité de l’aéroport Enfidha (60 km de Tunis) qui pourrait résorber une partie de tout excédent du trafic. Pour eux, cette option a toutes les chances d’aboutir pour peu qu’on modernise la ligne ferroviaire Tunis-Enfidha et achète de nouveaux trains plus rapides. Le coût d’une telle infrastructure serait de loin moins élevé que celui que nécessitera la construction d’un nouvel aéroport (plus d’un milliard de, soit l’équivalent de plus de 3 milliards de dinars).

La nouveauté, le ferroviaire en complément de la logistique aéroportuaire

Aujourd’hui, l’approbation en conseil ministériel de l’extension de l’aéroport de Carthage met fin à toutes les spéculations sur le site de l’aéroport de Tunis-Carthage et son transfert à 30 Km de la capitale.

Mieux, cette extension prévoit une composante très intéressante, à savoir, la liaison ferroviaire électrique rapide entre l’aéroport de Tunis Carthage et celui d’Enfidha à 60 kms de la capitale.

Pour l’histoire, cette option de développer le ferroviaire en complément de la logistique aéroportuaire a été développée par l’ex PDG de Tunisair et ancienne secrétaire d’Etat auprès du ministre du Transport, Sarra Rejeb.

“La Tunisie a tout à gagner avec l’extension de l’aéroport de Tunis Carthage.”

Interpellée sur ce sujet par la magazine l’Economiste Maghrébin, elle avait considéré qu’il « serait plus judicieux et plus rentable pour le pays de développer le ferroviaire en complément de la logistique aéroportuaire que de construire un autre aéroport d’autant plus que nous sommes en surcapacité en matière d’aéroports. Car de nos jours, les distances ne se mesurent pas en nombre de kilomètres mais en nombre de minutes”.

Le message est clair, la Tunisie a tout à gagner avec l’extension de l’aéroport de Tunis Carthage comme l’avait prévu le programme national de l’aéroport depuis 1972. La logique est en quelque sorte respectée. Que cela déplaise aux détracteurs de cette extension lesquels, en dépit de l’approbation définitive par le gouvernement, continuent à radoter sur les réseaux sociaux et à défendre le transfert de l’aéroport de Tunis Carthage en dehors de la capitale.

Abou SARRA