Atef Boutej
Atef Boutej

La première formation sur la cicatrisation des plaies du pied diabétique a été dispensée au mois de février 2023 et a touché des dizaines de professionnels de santé venant de plusieurs pays africains. La deuxième en direction de médecins dont des professeurs en médecine en provenance de la Guinée Conakry et de la Côte d’Ivoire, a eu lieu au mois de mars 2023 la troisième est en cours et concerne des médecins, pharmaciens, professeurs CHU et chirurgiens venant du Maroc et la quatrième aura lieu au mois de juin et verra la participation de plus de 60 chirurgiens orthopédistes et pharmaciens algériens.

On ne réalise peut-être pas, pour le moment, l’importance de la chose mais le tourisme médical en Tunisie entame une nouvelle ère. Celle de la formation des professionnels de santé allant du Pr en médecine à l’infirmier et passant par le chirurgien et l’orthopédiste venant de différents pays d’Afrique et du Maghreb et ce sans aucun appui de l’Etat.

C’est l’Association tunisienne des Plaies (ATPC) fondée en 2012 dans le but d’apporter son expertise dans le domaine de la cicatrisation des plaies à tous les professionnels de la santé, qui a pris cette initiative en offrant des formations sur la cicatrisation des plaies du pied diabétique.

La formation, pour rappel, est conçu de bout en bout par Dr Ramy Ben Salah, professeur en chirurgie plastique, réparatrice et esthétique. Grâce à lui et à son association, la Tunisie peut se prévaloir d’abriter le premier centre pilote africain dédié à la formation des professionnels de santé dans le domaine de du traitement du pieds diabétique, des escarres et autres problèmes de cicatrisation dont les brûlés graves. Il a été appuyé dans son entreprise par les laboratoires Lohmann and Rauscher (L&R), un des leaders mondiaux dans le domaine des dispositifs médicaux et des produits d’hygiène de pointe de haute qualité.

« Le tourisme médical ne doit pas se limiter à la prise en charge de patients qui choisissent de se soigner en dehors de leurs pays parce que la prise en charge et la qualité des soins est meilleures. Nous estimons que la formation est un plus car permettant d’harmoniser les approches thérapeutiques entre corps médicaux appartenant à la même aire géographique et leur facilitant l’accès à des technologies de pointe sans qu’ils aient à traverser tout le continent africain pour se rendre en Europe ou aux Etats-Unis » estime Atef Boutej directeur général de Lohmann and Rausher Tunisie qui a exercé pendant 16 ans dans le domaine de la promotion médicale des dispositifs et des équipements médicaux.

Pr Michel Kodo
Pr Michel Kodo

Il est agréé par Pr Michel Kodo orthopédiste traumatologie, chirurgien et vice-président de la Faculté Alassane Ouattara « Il faut féliciter le Pr Ben Salah et son équipe pour avoir organisé cette formation pour d’autre région d’Afrique. Nous sommes deux pays représentés, la Guinée et la Côte d’Ivoire et cette formation répond à des besoins urgents dans nos pays. La cicatrisation des plaies du pied diabétique est une préoccupation majeure pour nous et pour tous nos patients qui souffrent de complications dues à des maladies chroniques. Nous avons suffisamment appris et abordé les différentes facettes des problèmes encourus par nos patients. Nous avons aussi réalisé que pareilles complications requièrent plusieurs compétences allant des plasticiens aux orthopédistes et passant par les infectiologues ».

En fait, qui peut nier l’importance des formations qui rendent plus aisées l’accès aux ressources scientifiques et aux nouvelles sciences de la santé, favorisent l’échange d’expérience et d’expertises entre médecins venant de différents pays et ayant des backgrounds variés ? La formation offre une interface permettant l’interaction entre formateurs et apprenants.

« Après la formation du groupe des médecins ivoiriens et guinéens, notre bilan de la première session est positif. Il s‘agit d’une réussite sur tous les plans, bien sûr, organisationnel, nous y veillons à travers le choix des participants lesquels, rappelons-le reçoivent des formations gratuites mais aussi éducationnelle puisque assuré par des compétences 100% tunisiennes pionnières dans les nouvelles techniques de cicatrisation en Afrique. Les participants ont apprécié la qualité et le contenu des cours ainsi que le niveau des formateurs, et se sont dit prêts à renouveler l’expérience et dupliquer le même concept dans leur pays, ce qui, pour nous autres Tunisiens est un motif de fierté. Il faut rappeler que pareil projet pilote aura un impact direct dans le domaine de la santé et du social aussi. C’est pour cette raison que nous comptons diversifier les thèmes de formation, multiplier les cessions et avoir le plus de participants tunisiens et africains » précise Atef Boutej.

La complémentarité et la richesse des approches entre médecins venant de disciplines et d’horizons différents et peut jouer un rôle important dans la dynamique pédagogique de la formation. Pour Atef Boutej l’expérience de la formation des professionnels de santé pourrait être généralisée à tous les pays Maghrébins, à l’Afrique francophone et tout le continent : « Cette initiative améliore le niveau du capital humain, la qualité des soins et les bonnes pratiques en se référant aux pays développés. Le volet éducationnel est très important et le laboratoire LR conscient de son importance l’appui sans modération ».

Les temps sont peut-être venus pour que l’Afrique ait ses propres références dans nombre de domaines dont la médecine car même si les approches médicales valent pour tous, il y a des caractéristiques socioculturelles et mêmes génétiques qui différent d’un pays à un autre.

Approches multidisciplinaires, différents horizons

« Parce que nous sommes des professeurs en médecine, nous estimons que toute formation utile pour nos patients et disciples doit être suivie. Cela nous permet d’améliorer certaines pratiques et d’optimiser la qualité des soins offerts aux patients. Grâce à pareilles formations, nous pouvons revoir nos pratiques pour pouvoir les améliorer surtout de nouvelles méthodes de faire les pansements pour le pied diabétique dont la prise en charge est multidisciplinaire. Nous avions déjà lu dans les revues scientifiques et la littérature à propos de l’utilité des techniques des cellules souches dans le processus de la cicatrisation mais là, le Pr Rami Ben Salah nous a montré comment nous devons en user. Il y a aussi les technologies qui accompagnent ces nouvelles méthodes dont nous ne disposons pas aujourd’hui mais nous espérons en pourvoir nos établissements de santé car nous avons vu comment le processus de la guérison est accéléré grâce à la formation que nous avons reçue » a pour sa part déclaré Pr Yao Loukou, maitre de conférences agrégé en chirurgie orthopédique et traumatologique.

VALÉRIE DJE BI DJE-ASSI
VALÉRIE
DJE BI DJE-ASSI

La cicatrisation des plaies du pied diabétique n’est pas du ressort des chirurgiens orthopédistes ou des podiatres professionnels, les chirurgiens esthétiques sont autant concernés par cette pathologie. C’est ce dont est convaincue Valérie DJE BI DJE-ASSI, maitre de conférences agrégée en chirurgie plastique : « La chirurgie plastique nous permet de réparer les dégâts différents subis par une personne dont le pied diabétique.  Nous avons ainsi la joie de lui permettre de revivre à travers la reconstruction du pied mais il y a aussi les brûlés, les accidentés de la voie publique ou les personnes atteintes de maladies congénitales. Grâce à la chirurgie esthétique réparatrice, nous aidons des gens qui ne se sentent pas bien dans leur peau à mieux se sentir. Quelquefois mettre ces deux profils face à face leur permet de réaliser les chances chacun de pouvoir être ce qu’ils veulent ou doivent être grâce à la chirurgie et aux soins que nous leur inculquons. La formation que nous avons reçue nous a permis de découvrir de nouvelles techniques dont nous avons entendues parler mais que nous n’avons pas pratiquées. Ce qui est encore plus rassurant est de savoir que nous n’avons pas besoin d’aller plus loin. Nous sommes dans un pays africain où nous pouvons profiter de nouvelles approches dans le traitement des plaies et des cicatrices, et comme nous appartenons à plusieurs disciplines, nous avons pu profiter d’autres points de vue et expliquer à nos confrères et même à des paramédicaux certaines méthodes de soins que nous exerçons ».

Le centre pilote de cicatrisation des plaies sis en Tunisie est le premier en Afrique, peut-être qu’en appuyant pareilles initiatives et qui plus est conduites par des associations, le gouvernement tunisien pourrait œuvrer au développement d’une panoplie complète de services à offrir dans le cadre du tourisme médical.

Amel Belhadj Ali