Olivér Várhelyi, commissaire européen à la Politique du voisinage et à l’Elargissement, s’est adressé aux médias après son entretien avec le président de la République, Kaïs Saïed, au Palais de Carthage, mardi 29 mars 2022. Du moins qu’on puisse dire, il est plus optimiste que le plus optimiste des Tunisiens. Que les pessimistes et autres oiseaux de mauvais augures se taisent!

 Ci-après le discours intégral.

« Je suis venu en Tunisie en ami, un ami de la Tunisie, et je porte aussi l’amitié de l’Europe en Tunisie. Comme vous savez, les amis sont là dans les temps difficiles – les temps difficiles en Tunisie et aussi en Europe, dans le contexte de la guerre en Europe, la guerre cruelle et jamais vue depuis la Deuxième Guerre mondiale.

Les liens entre l’UE et la Tunisie sont historiques et uniques, et sont d’autant plus importants dans une situation comme celle que nous voyons aujourd’hui – nous avons eu le COVID-19, maintenant nous avons cette guerre et toutes ses implications aussi pour cette partie de notre continent.

Un nouveau chapitre avec nos partenaires du Sud

Il y a un an, nous avons ouvert un nouveau chapitre avec nos partenaires du Sud avec le Nouvel Agenda pour la Méditerranée et son plan économique et d’investissement. Cette vision a proposé une série d’actions visant à rapprocher nos rives en facilitant les échanges, en stimulant les investissements d’avenir, en renforçant l’économie et les sociétés du Sud de la Méditerranée, y compris la Tunisie.

Avec ce Nouvel Agenda, l’Europe a pris pleinement en compte la dimension méditerranéenne, et nous avons renforcé notre participation et rendu notre contribution encore plus pertinente en développant tout ça ensemble avec la région.

On aimerait apporter des choses pour vous et avec votre gouvernement nous avons développé des idées – on aimerait apporter des choses concrètes qui sont réelles et qui pourront changer la vie de la population en Tunisie.

Dans cet agenda, la Tunisie joue un rôle clef. Nos économies sont déjà étroitement liées. Avec nos pays européens qui sont déjà les plus importants investisseurs, nous avons toute la possibilité et la capacité de faire augmenter notre contribution et d’accélérer le développement en Tunisie au niveau social et économique.

Dans cet agenda, la Tunisie joue un rôle clef. Nos économies sont déjà étroitement liées.

À cet égard, nous sommes prêts à mobiliser autour de €4 milliards pour des investissements, pour ramener ‘growth & jobs’, travail et croissance économique et sociale. Pour focaliser l’économie sur le nouveau plan qui donnera des énergies renouvelables pour la Tunisie, pour amener une haute économie digitale et aussi faire augmenter votre connectivité avec nous et la possibilité de faire davantage d’échanges avec l’Europe.

Nous avons vu aussi, en particulier, que la Tunisie montre un intérêt très important et profond pour participer à la vie quotidienne de l’Europe, c’est à dire à nos programmes européens qui étaient réservés aux États membres. Nous voyons déjà que la Tunisie fait partie d’Erasmus +, la Tunisie fait partie de Creative Europe et aujourd’hui nous avons signé pour Horizon Europe qui va contribuer au futur de la Tunisie parce que ce programme doit vous donner la possibilité d’accélérer votre secteur de la recherche qui donnera la croissance économique directe et de nouvelles possibilités pour l’économie tunisienne.

la Tunisie montre un intérêt très important et profond pour participer à la vie quotidienne de l’Europe

Bien sûr que ces trois programmes que j’ai mentionnés contribueraient à un futur direct pour la jeunesse de la Tunisie, la jeunesse de la Tunisie qui est la plus grande force et la plus grande réserve de la Tunisie pour son futur. Avec la jeunesse, vous pouvez arriver à tout, mais il faut bien créer les possibilités économiques et sociales, ici, pour votre jeunesse pour que celle-ci puisse ensuite travailler pour le pays.

En 2011, la Tunisie s’est engagée sur une voie démocratique, un processus certes difficile et avec des obstacles, mais elle a déjà parcouru un chemin très important. Et nous voyons un nouveau chapitre à cet égard, un nouveau champ de réformes qui arrive, profond, et nous sommes bien sûr absolument prêts pour accompagner la Tunisie dans cette nouvelle vague de réformes.

Bien sûr il est très important, comme nous l’avons discuté avec le Président, d’amener tout le monde dans ce chemin de réformes et pour cela je salue Monsieur le Président pour la « roadmap » qu’il a présentée et qui a renforcé encore une fois aujourd’hui notre échange et je suis absolument prêt à annoncer à toute la Tunisie que nous sommes là pour vous aider, pour y arriver avec tous ces dates qui ont été déjà annoncées et tous ces points de décisions qui sont très importants à maintenir.

nous sommes bien sûr absolument prêts pour accompagner la Tunisie dans cette nouvelle vague de réformes

Et j’ai un bon sentiment que la Tunisie va réussir avec une réforme profonde qui vous donnera des institutions encore plus fortes, encore plus capables de livrer des résultats. Parce que ce n’est pas seulement le processus qui compte, mais aussi le résultat auquel vous pouvez arriver avec un Parlement qui fonctionne et qui est capable de prendre toutes les décisions nécessaires, par exemple pour toutes les réformes liées au plan économique et d’investissement.

Bien sûr, dans toutes ces réformes, il est impératif de garder tous les principes liés à l’État de droit et l’indépendance judiciaire est une autre priorité et principe absolu. Mais comme je le vois, le pays a déjà commencé à livrer des résultats. Il faut continuer ce travail, en incluant la population.

Bien sûr nous voyons aussi les difficultés économiques et financières en ce moment. C’est à cause du COVID, à cause de la guerre en Europe et bien sûr, nous voyons toutes ces difficultés.

Nous avons discuté avec Monsieur le Président de tous ces sujets et je suis ravi aussi de vous annoncer que, bien sûr, la Tunisie pourra continuer à compter sur l’Europe. L’Europe est là, et l’Europe est là avec des choses très concrètes, donc ce n’est pas un soutien de généralités mais un soutien qui pourrait être, dans ce moment, crucial. Nous allons travailler déjà, et nous avons payé déjà 50 millions d’euros d’aide budgétaire il y a quelques semaines et nous sommes prêts à continuer à cet égard.

Bien sûr nous voudrions que le cycle de réformes continue, mais je suis confiant qu’on pourrait déjà faire une autre partie de notre paiement d’ici quelques semaines de 150 millions d’euros et nous avons préparé encore un autre de 100 millions d’euros pour des reformes liées à l’Agenda, qu’on pourrait dépenser d’ici la fin avril. Et nous sommes prêts absolument aussi, voyant les progrès faits avec le FMI, à mobiliser notre soutien macro-financier de 300 million d’euros.

Nous avons discuté avec le Président de tous ces sujets et je suis ravi aussi de vous annoncer que la Tunisie pourra continuer à compter sur l’Europe

Donc, nous sommes-là, nous sommes là dans les moments difficiles. Et j’espère que cela va être utile aussi pour la Tunisie pour se concentrer sur les tâches essentielles. Et peut-être un dernier mot sur l’impact direct de la guerre en Europe sur la Tunisie. Nous voyons l’augmentation du prix du blé, l’augmentation du prix des céréales, des huiles pour cuisinier, donc tous les essentiels au quotidien des gens. Et nous voyons l’impact potentiel, social aussi, de tout ça.

Et donc nous avons réfléchi à comment l’Europe pourrait aider, pas seulement la Tunisie, mais la grand région du Maghreb/ Machrek, et donc nous avons alloué, nous avons mis de côté 200 millions d’euros pour vous aider à arriver à couvrir cette différence quand même importante de prix. Cela ne va pas tout couvrir, mais je pense que ce que nous avons en tête vous aiderait quand même d’une façon importante. Parce que cela sera un signal pas seulement financier, mais aussi un signal politique.

Nous voudrions vous aider avec un autre 20 million d’euros pour parvenir à ce que les gens aient du pain sur la table, même pendant le Ramadan et après. Parce que sans le pain, il n’y a pas de vie, donc il faut ramener le pain à table ».

Source : ec.europa.eu