Fitch Ratings a abaissé la note de la Tunisie de B- à CCC, les raisons en seraient le risque accru de la non-disponibilité de liquidités, notamment en devises étrangères ainsi que les retards accusés dans l’accord sur un nouveau programme avec le FMI même après les changements politiques de juillet 2021, accord nécessaire pour profiter de prêt en provenance de bailleurs de fonds internationaux.

L’instabilité sociale, les frictions permanentes avec les syndicats ainsi que leur force de frappe limitent la capacité du gouvernement à adopter des mesures fortes pour l’assainissement budgétaire et l’engagement de réformes structurelles.

Parallèlement à la hausse des prix des produits de base, la lenteur de la mise en œuvre des réformes pourrait conduire à une situation où le rééchelonnement de la dette deviendrait nécessaire même dans le cadre d’un programme du FMI. Ceci alors que le gouvernement a assuré qu’il n’envisageait pas une restructuration de la dette et que la Tunisie ne s’est jamais déclarée pour un possible accord dans le cade du Club de Paris.

Déficits budgétaires importants

Fitch Rating estime que le déficit de l’administration centrale restera élevé à 8,5% du PIB en 2022, contre 7,8% en 2021. Ceci étant, l’agence prévoit une hausse des revenus en 2022 avec l’expansion de l’économie, mais ces revenus serviront à couvrir les subventions aux prix du carburant, du gaz des céréales et des taux d’intérêts croissants.

La masse salariale conjuguée aux taux d’intérêt élevés absorberont près de 70 % des revenus de l’Etat et continueront à limiter considérablement la flexibilité budgétaire malgré le gel des embauches.

Le déficit en hausse !

Fitch prévoit que le déficit se réduira à 6,9% du PIB en 2023, en grande partie grâce à la baisse des dépenses en subventions énergétiques et alimentaires alors que les prix internationaux deviendront plus modérés. «Nous prévoyons que la dette par rapport au PIB atteindra 84,0% en 2022 et 84,7% en 2023».

Les besoins de financement du gouvernement restent élevés en raison du déficit important et des échéances de la dette qui seront de 9,2% du PIB en 2022 et de 8,9% en 2023.

Un nouvel accord avec le FMI est essentiel, selon Fitch Rating, pour le financement extérieur, car la Tunisie a perdu l’accès aux marchés internationaux. Bien que l’engagement des bailleurs internationaux pour aider la transition démocratique de la Tunisie et contenir les flux migratoires à travers la Méditerranée reste fort, le soutien financier de nombreux partenaires est lié à un accord du FMI.

L’accord avec le FMI suppose qu’un programme du FMI sera mis en place d’ici le milieu de l’année et que la Tunisie reçoive environ 4 milliards de dollars de financements extérieurs. «Notre scénario de base suppose un accord sur un programme du FMI avec des décaissements conditionnés à l’adoption de certaines réformes … Nous nous attendons à ce que la Tunisie continue à compenser le financement extérieur en empruntant massivement auprès de sources nationales».

Pour ce qui est du programme du FMI et malgré les progrès réalisés pour rapprocher les points de vue entre le syndicat et le gouvernement sur le programme de réformes, il y a une forte opposition sociale aux réformes fiscales, sans oublier les échéances politiques dont le référendum constitutionnel prévu en juillet 2022 et les élections législatives de décembre 2022. Cela signifie qu’un accord pourrait ne pas être réalisé et que le gouvernement pourrait avoir du mal à mettre en œuvre les réformes convenues requises pour les décaissements prévus du FMI.

La Tunisie n’a pas été à la hauteur de ses engagements avec le FMI dans les deux accords précédents, les rapports du dernier programme relevant constamment de longs retards et une annulation anticipée pour non-conformité.

La restructuration de la dette non exclue

La restructuration de la dette n’est pas exclue, estime le FMI, car à moins qu’un programme de réforme solide et crédible ne soit adopté avec un large soutien, rien ne pourra se faire. En l’absence de réformes structurelles réelles, la Tunisie devrait recourir au Club de Paris avant d’être de nouveau éligible à un financement avec ce que cela peut impliquer comme conséquences sur les débiteurs du secteur privé.

La dépendance croissante de la Tunisie à l’égard du financement intérieur et les prix mondiaux élevés des produits de base ont toujours entraîné, selon Fitch Rating, une hausse de l’inflation, qui devrait atteindre en moyenne environ 8% en 2022, une partie de la hausse des prix étant absorbée par les subventions gouvernementales.

Et alors que la Tunisie risque de voir ce qui est resté de son économie s’effondrer et une crise sociale sans précédent se déclencher dont la révolte des affamés, l’UGTT hausse le ton et oppose des niet systématiques à toute réforme, le gouvernement est totalement absorbé dans la lutte contre la spéculation et investit des efforts énormes pour que la consultation nationale réussisse ; des efforts qui, eux aussi, exigent de l’argent et du temps.

Mais ce n’est pas grave, du moment que le président le plus populiste de toute l’histoire nationale, qui n’y comprend rien mais prend des décisions déterminantes pour l’économie nationale, croit dur comme fer qu’il pourra sauver le pays à coup de discours hautement démagogiques où il distille sa haine à peine voilée pour les hautes compétences du pays et les détenteurs de richesses potentiellement des investisseurs.

Amel Belhadj Ali + communiqué Fitch rating en Anglais