On le savait depuis l’apparition, en janvier 2020, de la Covid-19, que cette pandémie allait être pour le tourisme tunisien une catastrophe. Mais on espérait aussi qu’elle pourrait constituer une opportunité. Malheureusement, une année et demie après, au regard des résultats, le secteur n’a récolté que les externalités négatives de la pandémie. Il a raté l’opportunité de se restructurer à des fins de résilience aux crises.

Abou SARRA

La Covid-19 était perçue comme une catastrophe pour le tourisme dans la mesure où les touristes, par l’effet du confinement général dans les pays émetteurs, allaient se faire rares. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, ce scénario catastrophiste s’est aggravé par trois grosses bourdes des gouvernants du pays : la mise en place d’un  programme de vaccination, l’ouverture sans contrôle strict des frontières en 2021 aux émigrés et touristes sous prétexte que la Tunisie n’a été exposée qu’à une simple vaguelette et une récente gaucherie de l’actuel ministre de la santé Faouzi Mehdi.

Inconséquence…

Ce dernier avait déclaré, début juin dernier, que la Tunisie s’apprête à connaître une 4ème vague de la pandémie du coronavirus, à la mi-juin 2021, avec un pic au cours du mois d’août prochain. Il était allé jusqu’à annoncer que cette vague du coronavirus pourrait entraîner 4 000 décès supplémentaires.

Réagissant à cette déclaration, la présidente de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), Dora Miled, l’a qualifiée de « suicidaire » et révélé qu’« elle a d’ores et déjà causé l’annulation des réservations pour la haute saison ».

Faisant un parallèle avec les gouvernants d’autres destinations concurrentes, Dora Miled, qui s’exprimait dans le cadre d’une interview accordée à quotidien d’expression arabe de la place, avait expliqué que les gouvernements du Maroc et d’Egypte ont été plus responsables dans leurs déclarations, ce qui a contribué à l’amélioration de leur activité économique.

Dans le même contexte, une destination concurrente comme la Grèce a commencé, depuis le mois de mars 2021, à vacciner en priorité les habitants des sites touristiques les plus visités par les touristiques. Le but étant de rassurer les touristes et d’encourager les tours opérateurs à les programmer pour la période estivale 2021.

Le tourisme intérieur, un levier de résilience

Au rayon des opportunités, la pandémie aurait pu être une occasion pour les professionnels pour entreprendre des travaux d’entretien nécessaires pour la durabilité de leurs équipements, et surtout pour s’adapter aux nouvelles normes exigées par la nouvelle classification des hôtels.

Ces normes, dont l’application entrera en vigueur en principe à la fin de cette année, sont axées, en plus de l’offre de commodités de viabilité, de sécurité et d’hygiène quotidienne (entretien de la chambre, fourniture du linge, espace adéquat des chambres…), sur l’immatériel, l’information (internet) et la qualité de service.

Côté administration, la pandémie aurait pu constituer une opportunité pour le ministère en charge du secteur du tourisme pour structurer sur des bases solides le tourisme intérieur.

Conscient de cette donne, l’actuel ministre du Tourisme, Habib Ammar, a déclaré à maintes reprises que « ce produit (tourisme intérieur, ndlr), considéré à tort comme une 5ème roue de la charrette et réduit à des réductions de prix pratiqués par les hôtels en périodes de vaches maigres ou de crises, est appelé à représenter une part importante du marché… A cette fin, il importe de le réinventer sur de nouvelles bases solides, l’objectif étant d’en faire un levier de résilience aux crises exogènes qui surviennent de temps à autre ».

Effectivement, une bonne partie des 2 millions de vaccinés, d’ici fin juin 2021, auraient pu constituer une clientèle-alternative aux touristes étrangers. Seulement, selon nos informations, rien n’a été fait pour courtiser cette clientèle (absence de campagnes de sensibilisation) et pour créer des produits adaptés à ses besoins.

Espérons que ce n’est que partie remise.