La Douane tunisienne négocie avec deux sociétés étrangères leur offre financière pour la réalisation du projet de digitalisation du dédouanement des marchandises. C’est ce qu’a déclaré le directeur général de la douane, Youssef Zouaghi, dans une interview accordée à l’agence TAP.

Ce projet devrait également servir de moyen de lutte contre la corruption que la douane demeure seule à endosser la responsabilité, selon Zouaghi, peu loquace sur l’affaire des 21 officiers de la douane écartés en mai dernier.

Juge au tribunal de première instance à Béja avant sa nomination à la douane en 2018, Youssef Zouaghi présente le bilan de la lutte contre la contrebande durant les huit derniers mois, marqués par la pandémie de Covid-19. 

Quel a été l’impact de la pandémie de Covid-19 sur le corps douanier ?

Youssef Zouaghi : La pandémie du coronavirus a porté un coup dur à tous les secteurs économiques, y compris la douane. Jusqu’à fin août dernier, la douane tunisienne a réalisé des recettes de l’ordre de 4,530 milliards de dinars au profit de la trésorerie de l’Etat, contre 5,341 milliards de dinars au cours de la même période de 2019, soit une baisse de 15%.

Malgré cette crise sanitaire, les efforts de lutte contre la contrebande et la fraude commerciale se sont poursuivis. Ainsi et jusqu’au 31 août dernier, les unités de la garde douanière ont effectué près de 18 mille patrouilles à l’issue desquelles, elles ont établi 3 981 procès-verbaux. La valeur des marchandises de contrebande saisies s’élève à plus de 150 millions de dinars.

Pour ce qui est de la fraude commerciale, la direction des enquêtes douanières a intenté des procès dont la valeur des produits saisis a dépassé les 103 millions de dinars.
Les agents de la douane ont également, réussi à saisir, jusqu’à fin août dernier, l’équivalent de 9 millions de dinars en devises dans les différentes zones frontalières.

En juillet dernier, la douane tunisienne a annoncé la mise en place d’un nouveau système digital qui va permettre d’écourter les délais de dédouanement des marchandises. Quand est ce que ce projet verra le jour ?

L’appel d’offres pour la mise en place de ce nouveau système d’information vient d’être achevé. Nous sommes en train de négocier l’offre financière avec les deux sociétés étrangères retenues suite à cet appel. Une fois cette étape finalisée, nous procéderons à l’exécution de ce projet.

Il convient de souligner que ce projet financé par la Banque mondiale à hauteur de 4,5 millions de dollars (l’équivalent de 12,6 millions de dinars), permettra non seulement de raccourcir les délais de dédouanement des marchandises, mais contribuera aussi, à la lutte contre la corruption et à l’instauration des principes de transparence et de bonne gouvernance.

Le secteur de la douane est toujours pointé du doigt lorsqu’il est question de corruption en Tunisie. Qu’en pensez-vous ?

La douane n’est pas le seul maillon de la chaîne de corruption, d’autres parties interviennent au moment du passage frontalier des marchandises, cependant, sur le plan médiatique, la douane continue à endosser la responsabilité de tout ce qui se passe aux points d’entrée. A cet égard, nous avons pu améliorer les délais de dédouanement des marchandises en Tunisie. En 2019, ce délai a atteint 0,58 j (soit l’équivalent de deux heures seulement), contre 0,74 j en 2016, c’est pour cela qu’il est impératif de mener une étude approfondie pour déterminer les responsabilités dans le processus de livraison des marchandises, repérer le point de blocage (retard ou corruption) et délimiter la responsabilité de chacun.

Par ailleurs, la douane tunisienne a été parmi les premières institutions à collaborer avec l’Instance Nationale de Lutte contre la Corruption (INLUCC) en mettant en place le programme ” îlot d’intégrité “.

Nous sommes résolus à poursuivre encore les efforts de lutte contre ce phénomène, notamment, à travers le lancement du système digital que j’ai mentionné précédemment. Avec ce projet, il y’aura moins de contact avec les agents douaniers, une traçabilité et par conséquent moins de corruption.

Revenons sur l’affaire de la mise à la retraite obligatoire, en mai dernier, de 21 officiers de la douane. A en croire l’INLUCC, ces douaniers seraient impliqués dans des affaires de corruption ?

La Direction générale de la douane n’est pas à l’origine de cette mise à la retraite. C’est l’autorité de tutelle qui a pris cette décision dans le cadre de son pouvoir d’appréciation souveraine.

Pour ce qui est des allégations selon lesquelles ces officiers seraient impliqués dans des affaires de corruption, elles n’engagent que leurs auteurs (INLUCC).