Inutile de trop s’y attarder : les médias tunisiens ou la plupart d’entre eux sont à l’agonie. Ils vont très mal. Le coronavirus est passé par-là. Mais pas que.

Pourquoi le gouvernement Chahed, puis celui de Fakhfakh n’ont-ils pas pris au sérieux les problèmes auxquels sont confrontées les entreprises de presse tunisiennes ? Pourquoi Elyès Fakhfakh n’a-t-il pas décidé des mesures concrètes et urgentes financières en faveur des médias comme celles décidées par le gouvernement chérifien pour les médias marocains? A qui la faute ?

En tout cas, l’Association marocaine des médias et des éditeurs (ANME –à ne pas confondre avec notre Agence nationale de maîtrise de l’énergie), pourtant d’une création très récente (24 juin 2020), semble avoir obtenu, 48 heures après sa création, des mesures concrètes de soutien à la presse de la part du ministère de la Culture en charge de la communication.

En effet, selon un communiqué de l’ANME, une rencontre s’est déroulée le 26 juin dernier, entre ledit ministère et l’Association marocaine des médias et des éditeurs.

Ayant à sa tête Abdelmounaïm Dilami, les dirigeants de l’ANME ont pu rencontrer Othmane El Ferdaous, ministre de la Culture, et ce en vue de «… mettre en place des mesures urgentes en faveur de la presse, secteur aussi vital pour toute démocratie que lourdement impacté par la pandémie du coronavirus ».

Résultat : «… il a été décidé d’octroyer une aide publique de 75 millions de dirhams (environ 22 millions de dinars tunisiens) aux entreprises de presse». Par la suite, lisez un détail important : « cette somme sera consacrée aux salaires du personnel de ces entreprises pour les mois de juillet, août et septembre 2020 ». Oui, vous avez bien lu : cette somme est destinée aux salaires du personnel des médias.

Et ce n’est pas tout, car il est indiqué qu’«à cela s’ajoute une subvention de 75 millions de dirhams (22 MDT) qui sera allouée aux prestataires des entreprises de presse en plus de 15 millions de dirhams qui seront débloqués en faveur des imprimeries et autant pour la société de distribution Sapress. Les radios privées seront également soutenues », précise le communiqué de l’ANME.

Le ministère marocain de la Culture et de la Communication prévoit un plan d’action d’urgence destiné à relancer le secteur de la presse. Pour y parvenir, une enveloppe de 205 millions de dirhams (l’équivalent de 61 millions de dinars tunisien) va être débloquée dans les prochains jours par le gouvernement chérifien.

Aujourd’hui, Hichem Mechichi et son gouvernement accepteront-ils de prendre –ils le peuvent- de telles mesures ? Autrement dit, Mechichi va-t-il être ce héros qui sauvera la presse tunisienne ? C’est ce qu’on espère. Mais, dans tout ça, ce sont les employés des entreprises de presse qui paient les frais. Les malheureux!

Et pourtant, au-delà des médias et des journalistes, c’est la démocratie –balbutiante- qui risque gros.

Tallel BAHOURY

Pour rappel, le Décret-loi n°2020-30 du 10 juin 2020 – JORT n°54 du 10 juin 2020, relatif à l’attribution de subventions conjoncturelles au profit du secteur privé des médias, qui en partie concerne en réalité le financement d’un budget de communication Covid-19 de l’Etat tunisien et non d’une subvention, est à ce jour et depuis trois mois en attente d’un décret d’application pour pouvoir être activé.

Article 8
1) Sont alloués des crédits dans la limite d’un montant de 5 millions de dinars imputés sur le budget de l’Etat pour l’appui du plan de communication de l’Etat destiné à faire face aux répercussions de l’application des mesures de prévention de la propagation du Coronavirus « Covid-19 », ainsi qu’à l’appui du secteur privé des médias, affecté par l’application de ces mesures.

Sont éligibles audit appui, les établissements médiatiques nationaux, régionaux et associatifs relevant du secteur privé soient les journaux, les radios et les télévisions.
Les conditions et les procédures pour le bénéfice de cet appui sont fixées par décret gouvernemental.

2) Il est créé un mécanisme de financement du programme de mise à niveau du secteur privé des médias pour promouvoir sa transition numérique. Des ressources dans la limite de 5 millions de dinars imputées sur le budget de l’Etat sont réservées à ce mécanisme.
Les conditions et les procédures pour le bénéfice de ce mécanisme sont fixées par décret gouvernemental.