“Déposer tranquille“, le Fonds de garantie des dépôts bancaires vous protège. Une campagne nationale pour la promotion des fonds devrait pouvoir réconcilier les déposants avec leurs banquiers.

Jeudi 6 courant, le Fonds de garantie des dépôts bancaires (FGDB) fêtait son entrée sur la scène en organisant une réception, pour ses adhérents. A l’occasion, Jaafar Khatteche, DG du Fonds, recevait les PDG des 26 banques résidentes et des 6 autres banques non résidentes qui sont contributeurs au Fonds. Résultats de recherche
Résultats Web

Nizar Yaïche, ministre des Finances, invité et confirmé, s’est excusé, pour rejoindre un conseil des ministres de toute dernière minute.

Par contre, Marouane Abassi, gouverneur de la BCT, également invité d’honneur, prendra part à ce “Nice Gathering“ et en profitera pour glisser deux messages importants.

FGDB, c’est parti !

C’est avec beaucoup de soulagement que les dirigeants du Fonds étrennent leur activité. Décidé par la loi bancaire de 2016, diverses contraintes ont différé son entrée en service dont la dernière en date fut la Covid-19.

On comprend le souci des dirigeants du Fonds de se révéler à l’opinion et à la communauté des déposants bancaires à un moment où ils pensent réunir les conditions d’une audience maximale. C’est bien vu. A présent tout est au point. Le capital de 5 millions de dinars tunisiens, paritairement réparti entre l’Etat et la BCT est totalement libéré, et déjà un premier encours de liquidités est disponible avec l’alimentation du Fonds à partir des prélèvements sur l’exercice 2019. Et, par-dessus tout, les structures de gouvernance sont opérationnelles.

Jaafar Khatteche en fait un point d’honneur. Pour un fonds dont la vocation est de rassurer les clients déposants du système bancaire, la bonne gouvernance est la vertu cardinale.

D’ailleurs quand bien même le Fonds tunisien arrive avec un léger décalage par rapport à certains pays de la région MENA, ses dirigeants ont veillé à faire les choses dans les règles de l’art. Notre FGDB a déjà rejoint le Fonds mondial de garantie des dépôts bancaires. Et, pour sa part, Jaafar Khatteche n’écarte pas la possibilité de promouvoir une structure dédiée à l’échelle maghrébine et soutient qu’elle pourrait même être domiciliée à Tunis.

Les fonctionnalités du Fonds

A quoi sert le FGDB ? C’est une auto-assurance nourrie par un prélèvement de 0,3% sur le total des dépôts de toutes les banques résidentes de la place et des 6 autres non résidentes qui ont délibérément choisi d’y adhérer.

Ce total est calculé par la BCT au jour de clôture de chaque exercice et c’est elle qui opère le virement au profit du Fonds. Et ces avoirs seront destinés à couvrir, en premier, les dépôts des clients. Cette couverture s’entend à hauteur de 60 mille dinars pour chaque client particulier ou entreprise. L’opération s’étend aussi aux dépôts en devises à hauteur de la contre-valeur du même plafond de 60 mille dinars, également. Et l’indemnisation se fera de manière automatique sans besoin de recours de la part des clients. Le Fonds se charge de contacter les clients et de les rembourser dans un délai maximal de 20 jours.

En soi c’est une couverture tout à fait sécurisante et apaisante. En effet, les clients savent qu’il existe un trésor de guerre qui est disponible, et Jaafar Khatteche insiste pour rappeler que ce précieux pactole est sous bonne surveillance.

Alors “déposez tranquille“, semblait-il glisser à l’adresse des clients des banques. En reproduisant la configuration du système voulu par la loi bancaire de 2016, comme le précisera le gouverneur, le FGDB vient parachever l’enceinte de sécurisation du système bancaire.

En effet, le système de supervision, dont Marouane Abassi a fait l’un de ses principaux chevaux de bataille depuis son arrivée en 2018 à la BCT, est le premier élément du système. Il est destiné à prévenir toute dérive technique ou tout dysfonctionnement dans la gestion des banques. Et, le Fonds viendrait en bouclier pour endiguer les pertes des clients, en cas de survenue du sinistre. Par conséquent, la boucle de la prise en mains de la sécurité du système bancaire est bouclée.

Rappelons que le système bancaire est le levier fondamental du financement de l’économie et c’est lui qui garantit le fonctionnement du système de paiement. On l’a bien éprouvé lors de la crise de la Covid-19. Le système bancaire est resté en pointe évitant la survenue d’un shut down à l’économie.

Le Fonds agira également en secours des banques elles-mêmes. Le texte légal dit en résolution des banques. Cela reste à clarifier car on ne sait pas s’il s’agit d’une intervention en restructuration, c’est-à-dire d’une prise de participation au capital en renfort des fonds propres, ou d’une autre forme de sécurisation.

Cependant, ce ne peut être que réconfortant au vu de la vocation du Fonds, conçu en filet de sécurité. Et gare de croire que cela n’arrive qu’aux autres. Les deux économies les plus puissantes au monde ont été touchées. La Banque allemande Herstatt a connu une mésaventure, et l’on se souvient tous du naufrage de Lehmann Brothers lors de la crise des “Subprimes“.

Pouvoir faire face en toutes circonstances surtout en alignant des disponibilités sonnantes et trébuchantes prévient du risque de voir les banques trébucher. C’est un atout majeur dans l’appréciation de la bonne santé du système bancaire. L’on pourra s’en prévaloir auprès des bailleurs de fonds ainsi que des agences de notation.

Auparavant les experts citaient, comme digue à toute déconfiture financière, l’intervention de l’Etat. D’ailleurs elle était au rendez-vous lors de la recapitalisation des banques publiques. Mais cela ne rassurait pas, totalement.

A présent le système est auto-immune et c’est une perspective autrement plus solide techniquement. Ajouter que cette immunité serait vue comme un prélude à sa performance car, en toute bonne logique, la bataille pour la performance serait la prochaine manche étant donné que l’économie se met en posture de relance. Le moment est donc opportun.

Que ferait le FGDB de ses disponibilités ? Anticipant, une quelconque adjonction du ministère des Finances, comme c’est le cas avec les compagnies d’assurances, Jaafar Khatteche avance que le financement du trésor via les BTC ou les BTA viendrait en priorité, et de toutes les façons le Comité de surveillance, coiffé par Noureddine Ben Hassen, veille au grain.

Bon vent au Fonds

Nous voudrions signaler que la création du Fonds est un événement national étant donné l’ampleur de son champ d’intervention. Nous regrettons que son entrée en service intervienne à une période où le brouhaha politicien chahute la vie économique.

Nous espérons malgré tout que le Fonds gagne de l’audience qui lui est nécessaire auprès des déposants des banques. Ces dernières feront-elles au travers de leurs réseaux d’agence le travail de promotion nécessaire ? Ce serait une juste contribution de leur part, car cela rendra leur portefeuille clientèle captif.

A plein régime, le gouverneur laisse entendre que le Fonds disposera d’un total de dépôts de 2,5 milliards de dinars environ, et c’est en effet une masse critique pour faire contrepoids à toutes éventualités de risques. Toutefois, comme le précisera Jaafar Khatteche, le Fonds peut émettre des emprunts et donc agrandir le volant de ses avoirs, avançant qu’un partenariat avec KFW (la coopération financière allemande) est déjà finalisé.

A titre de curiosité, on aimerait savoir ce qu’aurait été l’apport d’un Fonds pour empêcher la mésaventure de la BFT. Nous poserons directement la question à Jaafar Khatteche lors d’une interview imminente.

Soucieux de l’expansion de son institution, le DG du FGDB a reçu le soutien franc du gouverneur qui a émis le souhait de défiscaliser ou au moins d’alléger la fiscalité qui frappe les contributions des banques. En effet, ces dernières doivent s’acquitter d’un IS de 25% sur leurs contributions majoré d’un taux de TVA de 19%, et cela rogne les recettes du Fonds.

Souhaitons bon vent au FGDB et souhaitons lui de persuader les épargnants/déposants de faire refluer leurs dépôts vers les banques car c’est là qu’ils leur seront les plus profitables car les plus utiles à l’économie.

Ali Abdessalam