«Le départ de (…) Hafedh Caïd Essebsi du parti ne va pas arranger les choses».

Cette phrase –qu’il faut décrypter comme un non catégorique à ceux qui veulent déboulonner son fils de représentant légal de Nidaa Tounes- prêtée par Mosaïque FM au président Béji Caïd Essebsi, fondateur et président d’honneur de Nidaa Tounes, et tirée d’un échange avec des journalistes, au moment où le chef d’Etat quittait la Tunisie, est tombée mercredi 27 février 2019 comme un couperet.

Ces quelques mots, craints par certains et appelés de leurs vœux par d’autres, ont le mérite de clarifier –définitivement?- la situation et l’avenir du parti vainqueur des élections –législatives et présidentielle- de 2014 : son ex-directeur exécutif et actuel représentant légal et véritable maître n’est pas près d’en lâcher les rênes. Ce qui envoie un message tout aussi clair à tous ceux qui, adversaires ou partisans du fils du président de la république, s’accrochaient à l’idée, au rêve, à l’espoir –illusoire ?- de sauver Nidaa Tounes, que s’ils y tiennent encore, ils devront le faire avec Hafedh Caïd Essebsi, pas sans lui et, encore moins, contre lui.

Cette première clarification en entraîne une autre : il n’y aura pas, comme espéraient certains, de congrès démocratique dans lequel M. Caïd Essebsi fils se mettrait en danger en se présentant à de désormais improbables élections libres et transparentes destinées à désigner la nouvelle direction. Non, ce sera fort probablement un congrès sur mesure ; un congrès sans élections, sinon de façade.

Le chef de l’Etat a asséné ce verdict après avoir rappelé que «certains accusent des dirigeants de Nidaa Tounes d’avoir provoqué son éclatement alors que ce sont eux qui ont commencé à semer la discorde au sein du parti», et affirmé que «ceux qui ont créé Tahya Tounes faisaient partie de Nidaa Tounes et que leur retour à leur ancien parti est possible».

Autrement dit, le président Caïd Essebsi –et, très certainement, avec lui le représentant légal de Nidaa Tounes-, fait le pari que les dissidents ayant claqué la porte de cette formation et éparpillé entre différents partis vont finir par revenir “à la maison“.

Ce pari paraît hautement risqué. Pour deux raisons au moins. D’abord, il est très peu probable que Hafedh Caïd Essebsi retrouve un soupçon de légitimité aux yeux de ceux qui ont déjà claqué la porte de Nidaa Tounes ou sont aujourd’hui tentés de le faire –et risquent de le faire, après ces derniers développements- qui la lui refusent depuis que son père lui a remis les clefs de la maison, au lendemain de son élection à la présidence de la République.

Ensuite, le retour des dissidents à Nidaa Tounes, escompté par le président Béji Caïd Essebsi, a peu de chance de se produire, du moins de manière massive –la seule susceptible de rendre à ce parti son lustre, son poids et sa crédibilité perdus-, car le fondateur et président d’honneur a beaucoup perdu de son crédit et, donc, de son influence, du fait de la manière dont il a géré le parti qu’il a fondé pendant qu’il en tenait les commandes et, surtout, après qu’il les a cédés –du moins en apparence- à son fils.

Alors quel destin attend Nidaa Tounes -déjà fortement affaibli, voire mourant- après cette «clarification» ? Si cette tentation de passage en force se confirme, le parti présidentiel va au mieux continuer à péricliter lentement mais sûrement, ou, au pire, subir une énième hémorragie et être rayé, de ce fait, sinon de la carte politique à l’occasion des prochaines élections, du moins être réduit à une encore plus simple expression.