Le président directeur général de la Société “Tunisie Autoroutes”, Badreddine Lahbbaiel, a indiqué dans un entretien accordé à l’Agence TAP, que le gouvernement a décidé d’augmenter, en 2019, le capital de la société de 180 millions de dinars (MDT), une enveloppe transférée par l’Etat dans le cadre de la stratégie du financement des projets.

L’objectif est d’achever respectivement les autoroutes Sfax-Gabès, Gabès-Médenine et Médenine-Ras Jedir, dont les travaux devront prendre fin au début de 2020.

Il a ajouté que le glissement de la valeur du dinar a aggravé les pertes de la société suite au remboursement de ses crédits en devises. Ainsi les pertes enregistrées en 2018 oscilleraient entre 40 MDT et 42 MDT.

Le gouvernement a décidé une augmentation du capital de 180 MDT dans le budget de 2019, Pourquoi?

Badreddine Lahbbaiel: L’objectif de la création en 1992 de la Société Tunisie Autoroutes était seulement l’exploitation des premières autoroutes dans le pays, à savoir : Tunis-Hammamet, et Hammamet -Msaken. Toutefois, la modification du statut de la société a prévu un autre rôle pour la société, celui relatif à la réalisation des autoroutes et leur exploitation.

Ainsi, en 2003, la société a réalisé sa première autoroute à savoir Tunis-Bizerte, puis celles de Msaken-Sfax, et Tunis-Mdjez El Bab-Oued Zargua, puis Sfax-Gabès, Gabès-Médenine et Médenine-Ras Jedir, dont les travaux s’achèveraient en 2020.

Les travaux de réalisation des autoroutes sont financés par des crédits extérieurs et à travers le budget de l’Etat qui assure le transfert des montants alloués, sous forme d’augmentation du capital de la société.

Nous avons convenu avec le ministère des Finances, après la fixation des dépenses nécessaires à l’accomplissement des travaux des autoroutes en cours, d’allouer 180 MD en 2019, qui seront transférés sous forme d’augmentation de capital, tel que prévu par le statut de la société.

Peut-on considérer que vous recourez à l’aide de l’Etat pour réaliser vos projets ?

Il ne s’agit pas d’une aide de l’Etat car les sommes allouées à l’augmentation du capital sont prévues dans le cadre d’une stratégie de financement des projets, et le sont, selon le calendrier d’avancement des projets de réalisation des autoroutes, à savoir celles de Sfax-Gabès (les travaux ont démarré en 2010), Gabès-Médenine (Début des travaux en 2014) et de Médenine -Ras Jedir (lancement en 2013)

Comment expliquez-vous le blocage de la réalisation des autoroutes dont certaines remontent à l’année 2010 ?

Ce blocage est expliqué par les mouvements de protestations de citoyens, enregistrés en 2011, lesquels citoyens ont refusé d’être indemnisés pour expropriation d’une partie de leurs terres au profit de l’intérêt public, sous prétexte que la valeur des indemnisations est insuffisante et sachant qu’il leur était impossible, lors du régime déchu, d’exprimer leur refus des indemnisations offertes. Je rappelle cependant que cette problématique a été réglée depuis 2014.

Par ailleurs, nous constatons des dépassements des délais de réalisation par les promoteurs, certains ayant obtenu des marchés en 2010 mais ne les ont parachevés qu’en 2017 ou 2018, au lieu des deux ans prévus dans le cadre des contrats conclus.

La société dispose-t-elle d’un plan pour réaliser de nouveaux projets ?

Non, nous ne disposons pas de programmes de construction de nouvelles autoroutes et nous nous contentons de parachever celles programmées, donc nous n’avons pas l’intention de nous endetter davantage.

Le dernier crédit contracté par la société Tunisie Autoroutes date de 2014 et l’a été auprès de l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA). D’une valeur de 15 millions de yens (411 MDT) il sert à la réalisation de l’autoroute Gabès-Médenine.

Le total des crédits à long terme (échéance 2040) obtenus par la société, s’élève à près de 2 milliards de dinars. En outre, la société a des crédits à court terme qui sont remboursés mensuellement au profit du Fonds koweïtien pour le développement économique (FKD), de la JICA, de la Banque européenne d’investissement (BEI) et de la Banque africaine de développement (BAD).

Quelles sont les pertes subies par la société suite à la dépréciation du dinar et en prévoyez-vous d’autres?

En réalité, la société vit de grandes difficultés financières suite au remboursement de ses crédits en devises. En 2017, les pertes ont atteint près de 37 MDT, dont 17 MDT proviennent du glissement du dinar.

La valeur des recettes a atteint, au cours de la même année, près de 90 MDT et nous estimons qu’elles attendraient 100 MDT en 2018, sauf que les pertes demeureraient toujours en hausse, pour osciller entre 40 et 42 MDT

Les difficultés financières de la société étaient prévues depuis 2010 lorsque nous avons signé le crédit relatif au financement de la route Sfax-Gabès. Ainsi, les études réalisées, à ce moment là, ont montré que la société souffrait de difficultés financières, en raison de l’augmentation de ses charges de gestion et celles des coûts des travaux ainsi qu’à cause de la détérioration de la valeur du dinar.