“Je ne suis pas un facteur, avec tous mes respects pour les postiers, mais il ne faut pas compter sur moi pour jouer ce rôle entre le gouvernement et l’ARP”, a déclaré Béji Caïd Essebsi, lors d’une conférence de presse surprise décrétée jeudi 8 novembre au Palais de Carthage par le président de la République.

Le chef de l’Etat a estimé que les temps sont venus de remettre les choses dans l’ordre et d’éclaircir des points cruciaux à l’opinion publique.

“Je n’ai rien contre le chef du gouvernement. De par la Constitution, il me revenait de droit de désigner le chef de gouvernement. Je l’ai fait tout comme j’ai la latitude au vu de ses réalisations et de son exercice et de leurs impacts sur la vie de nos concitoyens de le prier de se présenter devant l’ARP pour un nouveau vote de confiance”.

BCE s’est dit étonné du déroulement des faits précédant le remaniement ministériel. “Le chef du gouvernement m’avait informé qu’il y avait nécessité de prolonger l’état d’urgence en raison d’un contexte particulier dans le pays. Je l’ai approuvé en concertation avec le président de l’ARP. C’est comme cela qu’on gère un Etat, par le dialogue et l’échange. Mais y avait-il péril en la demeure pour décider aussi rapidement du remaniement ministériel?”

Le chef du gouvernement avait remis au président de la République une liste des ministres qui allaient être nommés: “Il y en avait que je connaissais et les 5 autres Nahdhaouis que je ne connais pas. Et cela soit dit en passant, un Nahdhaoui peut porter un nœud papillon. Ils ne sont pas tous des barbus. Je voulais avoir une idée plus claire sur les nouveaux ministres et secrétaires d’Etat, et je m’attendais à ce que l’annonce soit faite après le retour du chef du gouvernement de Mauritanie. J’ai été surpris par la précipitation du processus. Et il faut que l’on sache que je ne suis pas un bouton sur lequel on appuie. Je suis le président de la République et je suis au dessus de la mêlée”.

Béji Caïd Essebsi a déploré que la liste définitive des ministres nouvellement désignée ait été soumise directement à l’ARP sans passer par lui pour information et appréciation.

“Il s’agit de l’Etat et on ne gère pas les affaires de l’Etat de façon aussi peu cavalière».

Les non-dits de la conférence de presse du président de la République sont beaucoup plus éloquents que les déclarations directes. Il a affirmé de façon claire, nette et précise que le pouvoir est aujourd’hui entre les mains d’Ennahdha.

Par ailleurs, juste après la conférence de presse de Carthage, on annonce une autre à La Kasbah. En même temps, un communiqué est diffusé par la direction de Nidaa Tounes appelant tous les ministres en poste à démissionner au risque de se voir limogés du parti.

Une crise politique sans précédent pèse de tout son poids sur une Tunisie qui traverse, déjà, une grave crise économique.

De mémoire de journaliste, c’est du jamais vu ou vécu depuis l’indépendance du pays.

Amel Belhadj Ali