Désabusée, Athènes a cessé de suivre le feuilleton des négociations

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ènes, le 26 juin 2015 (Photo : LOUISA GOULIAMAKI)

[26/06/2015 13:38:23] Athènes (AFP) Alors qu’à Bruxelles, les négociations continuent entre la Grèce et ses créanciers, à trois heures d’avion de là, des Athéniens “lassés” de ces péripéties et “effrayés” de l’avenir ont cessé de suivre ce feuilleton, attendant juste de voir à quelle sauce ils vont être mangés.

“Si nos partenaires voulaient nouer un accord, ils l’auraient déjà fait. Il semble que quelque chose d’autre se passe que nous, citoyens, ne comprenons pas et nous ne savons pas où la situation nous mènera”. A l’instar de ce retraité rencontré place Syntagma, devant le Parlement, de nombreux Grecs se demandaient vendredi où en était leur pays.

?Il y a 90% de chances qu’il y ait un accord demain. Ok. Mais nous ne savons pas exactement quelles en seront les conditions”, s’interroge Andonis Mardelis, historien et guide touristique. “Ce qu’on entend ici, c’est qu’ils (les institutions) reviendront sur certaines de leurs positions car ce qu’ils demandent est hors de toute logique”.

Les Européens ont fixé un ultimatum, jusqu’à samedi, pour que la Grèce trouve avec ses créanciers un accord permettant de reprendre son renflouement et de lui éviter ainsi un défaut de paiement.

Cette nouvelle réunion, qualifiée de “cruciale” sera la cinquième en moins de dix jours, nouvel épisode d’une série dramatique que les Grecs ont cessé de regarder.

“Chaque jour, une autre réunion…Je suis lassée”, commente Diana, la soixantaine, cheveux gris coupés courts et yeux clairs. Cette enseignante retraitée ne voit “pas de sortie” à la crise: “Certains espèrent en Tsipras (le Premier ministre, ndlr), moi je crois pas en lui, ni en personne. Il a tout promis et n’a rien fait.”

– ‘Tragédie ‘-

“Je suis désespérée, très désespérée. Et très effrayée”, lâche cette élégante sexagénaire qui héberge toujours ses deux fils de 31 et 34 ans, au chômage.

A presque 40 ans, Evi aussi dépend de ses parents et de son grand-père qui l’aident à subvenir à ses besoins. Journaliste dans un magazine de décoration, cette mère de deux jeunes enfants a été licenciée il y a deux ans et n’a, depuis, pas retrouvé de travail. “Je voudrais, si c’est possible, quitter le pays” et “j’élève mes enfants dans cette perspective”, raconte cette brune aux cheveux tirés en arrière.

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à une manifestation à Athènes, le 26 juin 2015 (Photo : LOUISA GOULIAMAKI)

Evi suit les débats à Bruxelles de loin. “Nous espérons qu’une solution soit trouvée”, commente-t-elle tout en avouant qu’elle n’est “pas optimiste”: “C’est une tragédie et ce sera une encore plus grande tragédie”. En attendant, elle soigne sa déprime en engloutissant un cornet de glace.

Dans les allées du grand marché couvert, Ioana, une jeune livreuse de 19 ans, slalome entre les étals, ignorant les tentatives de drague des garçons bouchers. “La crise, je m’en fous. Oui c’est difficile. Nous n’avons rien”, lâche-t-elle, mais la jeune livreuse ne lit pas les journaux, et dit que, comme elle, “les gens en ont marre”.

“C’est la faute de l’Allemagne”, l’interrompt un vendeur tandis qu’un autre, tablier ensanglanté noué à la taille, accuse Tsipras: “Nous avons tout donné pour ce pays et le gouvernement n’a rien fait pour nous”. La perspective de nouvelles mesures d’austérité ? “Nous sommes déjà étranglés !”, s’offusque-t-il, portant sa main à la gorge.

“Tout ça c’est un jeu politique”, balaie Petros Christopoulos, 37 ans, visage grignoté par une barbe. “Ici les gens continuent à sortir, aller boire un verre, danser. Mais ils n’ont pas le même salaire qu’avant”, nuance cet employé dans une droguerie. Lui a vu sa paie passer de 1.500 à 600 euros pour cause de crise. 600 euros, un mois de salaire pour lui, le prix d’un smartphone pour d’autres, compare-t-il.