Jour de vérité pour Obama au Congrès sur le libre-échange

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à Washington, le 9 juin 2015 (Photo : Saul Loeb)

[12/06/2015 13:53:13] Washington (AFP) Les parlementaires américains devaient voter vendredi pour accorder ou non à Barack Obama les pouvoirs étendus de négociation commerciale qu’il convoite, mais la résistance des élus protectionnistes de son propre parti démocrate risquait de faire couler l’initiative.

La Chambre des représentants votera vers 15H30 GMT sur une série de textes déjà approuvés par le Sénat; le suspense reste entier sur l’issue, à tel point que le président américain s’est rendu en personne au Capitole vendredi matin pour une réunion de la dernière chance avec les représentants démocrates.

Le match oppose le président américain et la majorité républicaine du Congrès, d’une part, et la minorité démocrate, d’autre part. L’alliance inédite entre Barack Obama et les républicains se noue autour de la conviction que les exportateurs américains ne peuvent que profiter de l’ouverture des frontières. A l’inverse, les démocrates craignent que l’ouverture croissante des frontières ne soit coûteuse en emplois dans les filières les plus fragiles.

Barack Obama veut finaliser au plus vite, avant la fin de son mandat en janvier 2017, le partenariat transpacifique, connu à Washington sous ses initiales TPP, entrées dans le vocabulaire courant de la politique américaine – jusque dans les rues de la capitale fédérale, où des affiches publicitaires s’en prennent au futur accord.

Ce gigantesque accord commercial approfondirait l’association entre les Etats-Unis et 11 pays en bordure du Pacifique, notamment le Japon, l’Australie, le Chili, mais pas la Chine.

Pour y parvenir, Barack Obama ne veut pas que le Congrès puisse désosser l’accord multilatéral négocié confidentiellement et à grand peine avec ses partenaires. Il souhaite que les élus votent d’abord une loi dite de procédure accélérée, TPA en anglais (“Trade Promotion Authority”): un mécanisme qui forcerait le jour venu le Congrès à approuver ou rejeter sans possibilité d’amendement tout accord négocié par l’exécutif d’ici 2018 (2021 en cas de prolongation).

C’est cette loi que les élus de la Chambre étaient appelés à adopter vendredi (le Sénat l’a fait le 22 mai), sans se prononcer aucunement sur le futur partenariat transpacifique.

Quinze accords commerciaux ont été approuvés sous une procédure similaire par le Congrès depuis 1979. L’accord en négociation avec l’Union européenne (TTIP) bénéficierait aussi de cette procédure.

Toute la Maison Blanche s’active pour gagner le vote de vendredi. Outre sa rare venue au Congrès vendredi, Barack Obama a effectué une visite surprise jeudi soir au match annuel de baseball parlementaire pour rallier quelques voix supplémentaires.

– Résistances à gauche –

La cause est soutenue avec force par le patronat. La fédération d’entreprises informatiques SIIA souligne par exemple que la loi de procédure accélérée aidera les entreprises américaines sur les marchés numériques.

“Mon père, JFK, était pour le libre-échange. Les démocrates d’aujourd’hui devraient aussi l’être”, a aussi écrit dans une tribune la fille de l’ancien président et héros démocrate John F. Kennedy, l’ambassadrice au Japon Caroline Kennedy.

Mais Barack Obama a perdu nombre de ses alliés progressistes dans la bataille, à commencer par la plus grande fédération syndicale américaine, AFL-CIO.

Le syndicat a lancé une virulente campagne pour faire échouer le “TPA”. Dans une publicité, un ouvrier d’une aciérie de Baltimore licencié avec 2.100 autres en 2012 appelle Barack Obama à venir constater sur place les ravages de la mondialisation.

“Nous voulons que les Américains comprennent que les mauvaises politiques commerciales ont des conséquences terribles pour les ouvriers”, dit le président de l’AFL-CIO, Richard Trumka –qui en période électorale met d’habitude la force de frappe du syndicat au service du parti démocrate.

Même rejet chez nombre d’ONG écologistes: “voter pour la procédure accélérée, c’est voter contre la propreté de l’air, la propreté de l’eau et la protection du climat”, a dit Michael Brune, directeur de la grande ONG Sierra Club.

Côté humanitaire, Médecins Sans Frontières a aussi pris position contre le futur TPP, qui selon l’association pourrait rendre plus difficile le recours aux médicaments génériques contre la tuberculose, le paludisme ou le VIH, en renforçant les protections de brevets des entreprises pharmaceutiques.