Saumon fumé : pour rebondir, les professionnels lorgnent vers la truite et l’aquaculture

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é de Bretagne Saumon emballe du poisson dans une usine à Châteauneuf-du-Faou le 4 avril 2014 (Photo : Fred Tanneau)

[08/05/2014 11:08:36] Bruxelles (AFP) Pour les professionnels français du saumon fumé, truite et aquaculture pourraient être des solutions pour rebondir dans un contexte tendu par la flambée des prix et les polémiques sur les conditions d’élevage.

Avec un marché qui a reculé de 5% depuis le début de l’année, “tout le monde est tendu dans la profession. On a dépensé beaucoup d’énergie pour rétablir nos marges”, explique Jean-François Floch, directeur commercial saumon de l’entreprise bretonne Guyader, présente au salon SeafoodExpo à Bruxelles. Le saumon, poisson le plus consommé au monde, occupe une large place de l’événement.

Malgré de bonnes ventes à Noël, le secteur a été profondément marqué en 2013 par la diffusion en novembre d’un reportage d’Envoyé Spécial très critique sur les élevages de saumon norvégiens, d’où viennent la majorité des poissons ensuite fumés en France.

Mais surtout, les industriels souffrent de la forte hausse des prix de la matière première ces deux dernières années, liée à une demande en forte progression. Or le prix du saumon frais représente entre 50 et 75% du prix du produit fumé.

“Beaucoup d’industriels en France n’ont pas réussi à répercuter sur leur prix”, d’où la fragilité et la concentration du secteur, expliquait récemment à l’AFP Jacques Trottier, directeur général de Labeyrie, et président du Syndicat français des industries du saumon et de la truite fumés (STF).

Le norvégien Marine Harvest, n°1 mondial du saumon, est en passe de supprimer 400 postes en Bretagne pour doper sa rentabilité.

Pour certains, le salut pourrait passer par la truite, qui “a une belle image (…) et a pu bénéficier de transferts” en raison des suspicions sur le saumon, selon M. Trottier.

Les ventes ont augmenté de 25% début 2014 par rapport à 2013, selon des données transmises par Labeyrie.

Aqualande, qui produit 10.000 tonnes de truites par an dans ses élevages du Sud-Ouest, a constaté “une explosion des ventes” sur les six à huit derniers mois, se réjouit son directeur commercial Eric Mezrich.

“L’origine locale joue beaucoup”, estime-t-il. La truite consommée en France provient en grande majorité de l’Hexagone.

– Ferme pilote –

La filière truite mise sur pied en Bretagne par Guyader bénéficie aussi des évolutions récentes.

“A produit identique, la truite coûte 15% moins cher à produire que le saumon”, souligne M. Floch, qui estime que les prix élevés du saumon risquent de se maintenir faute d’une augmentation suffisante de la production norvégienne.

Meralliance, 3e producteur de saumon fumé après Marine Harvest et Labeyrie, espère de son côté se lancer dans l’aquaculture, quasiment inexistante pour le saumon en France.

Avec une production d’un million de tonnes par an, la Norvège est dans une telle position de force qu’il est difficile d’exiger des gages de qualité, reconnaît Vincent Gelamur, responsable de l’innovation chez Meralliance.

Pour redorer l’image du saumon en France, l’idée serait donc d’élever les poissons dans une ferme sur le sol et non dans des cages en mer.

La technique permettrait “d’éliminer les problèmes de rejets, de stress, d’attaque de la faune sauvage” qui sont reprochés aux saumons norvégiens, explique M. Gelamur.

Construite à côté du port breton du Guilvinec, l’installation profiterait de l’eau de mer pompée par le port pour la criée et surtout des coproduits de la pêche (déchets de poissons), qui seraient réutilisés pour fabriquer de la nourriture pour les saumons.

L’objectif de production reste modeste: 800 tonnes, quand Meralliance en importe 20.000 chaque année de Norvège et d’Ecosse. Mais le modèle pourrait ensuite être répliqué dans deux autres sites en France, voire à l’étranger où seules deux fermes de ce type existent, au Danemark et au Canada.

Le projet, dont le financement n’est pas encore bouclé, s’élèverait à 12,5 millions d’euros. S’il se concrétise, la ferme pilote pourrait produire ses premiers saumons début 2017.