La trouille

caricature-wmc-liberte-14janvier-680.jpg L’avantage des voyages c’est que ça vous permet de voir d’autres choses, d’autres gens, et surtout d’écouter d’autres sons de cloches, et de s’éloigner du train-train quotidien et du stress des ordures qui débordent et du pugilat qu’on observe dans un Palais du Bardo transformé en ring!

Dès qu’on prend l’avion, on s’installe près de gens inconnus, on habite à l’hôtel et on croise des gens inconnus, ce n’est plus le cheminement journalier et du train-train journalier où vous croisez votre voisin qui emmène son gamin à l’école et autre voisine qui n’a toujours pas réparé le garde-boue de sa voiture…

Pour ces inconnus, vous êtes aussi un inconnu quel que soit votre emplacement dans l’échelle sociale, et j’avoue que c’est pour cette raison que j’adore le hammam où l’on croise des inconnues dans le plus simple appareil ou presque; ce qui permet de voir ce qu’on ne voit pas une fois que l’artifice a repris le dessus. Je pense que du côté mâle, ça doit être la même chose!

Tout ce préambule un peu pour exprimer ma surprise devant la réaction de beaucoup de gens de différents niveaux que j’ai croisés dans un pays arabe où, pour des raisons professionnelles, je me suis déplacée, et cela va du chauffeur de taxi –cet «outil» de mesure universel de l’ambiance d’un pays– au garçon du bar de l’hôtel 4* qui ressemble à tous les 4* du monde aux dysfonctionnements près –en général l’ascenseur et la piscine sont HS, et en allant au cadre supérieur et à l’homme d’affaires privé, ces gens-là ont la même ou presque réaction!

– Ce qui se passe en Tunisie les inquiète et ils ne comprennent pas pourquoi ils font ça “vous avez tout“, «alors pourquoi vous avez tout fait pour perdre ces acquis» –d’ailleurs ils l’ont vu à la télé, ce qui donne une idée du ravage qu’exerce une certaine chaîne!

– L’arrivée des intégristes au pouvoir ne les étonne pas outre mesure, ils sont partout, disent-ils avec un air de dépit et ce tout en torturant nerveusement leur portable toutes options et dernier cri.

– Par contre, ils sont désolés et surpris de ces batailles rangées du palais du Bardo –cela veut dire qu’ils suivent ces débats– et souvent n’en mesurent pas l’impact et se posent la question: «pourquoi vous en êtes arrivés la?», et quand je réponds s’ils préfèrent aux bagarres inter-députés aux voitures piégées de Bagdad, j’ai droit à un long soupir.

– Et cerise sur le gâteau, beaucoup ont carrément peur de l’effet de ce qui se passe dans ce petit pays –où la CIA a déclenché la révolution!-, de la liberté «exagérée» de la presse, des débats qui n’en finissent pas, où plus rien n’est respecté, on sent une perte totale de repères dans des pays où l’on nait sous la coupe de son père, ensuite on passe sous la coupe de son maître, ensuite son patron, et le tout sous la coupe d’un roi ou d’un dictateur! Et on est choqué qu’il existe un pays arabe où le président est ridiculisé par LofTi abdelli, ça n’existe pas pour eux! D’ailleurs, j’ai dû m’expliquer sur le sens du mot «kémia»!

On finit par me poser la sempiternelle question: «vous n’étiez pas mieux avant?», et j’ose espérer que les Tunisiens ne leur donnent pas raison comme semble le démontrer le fameux sondage de 3C qui a considéré qu’un Tunisien sur 3 regrettait ZABA.

Messieurs les politiciens de tous bords, ne décevez pas vos compatriotes, quitte à décevoir tous ces gens et surtout leurs dirigeants qui espèrent et qui n’attendent que tout s’y écroule afin qu’ils aient raison contre leurs peuples!.