Quand l’Asie rebat les cartes du jeu énergétique mondial

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est de la Chine, le 21 mai 2012 (Photo : AFP)

[15/10/2013 15:53:35] Daegu (Corée du Sud) (AFP) Du pétrole au nucléaire en passant par le gaz, le charbon ou les renouvelables, l’Asie donne désormais le la dans le concert énergétique mondial, ouvrant de nouvelles perspectives au secteur, réuni cette semaine en Corée du Sud.

“Les économies émergentes d’Asie sont rentrées dans une phase historique d’industrialisation et d’urbanisation, et le rythme d’évolution est presque inconcevable”, comparé à la révolution industrielle européenne, a lancé mardi Peter Voser, PDG de Shell, au Congrès mondial de l’énergie à Daegu (sud-est).

Selon les scénarios du géant pétrolier anglo-néerlandais, la demande d’énergie dans la région pourrait doubler en 50 ans. “Cela ne transforme pas seulement le système énergétique asiatique, mais celui du monde entier”, a souligné M. Voser, prévenant qu'”à elles deux, la Chine et l’Inde alimenteront la majeure partie de la croissance de la demande mondiale d’énergie dans les vingt ans qui viennent”.

Les conséquences de ce basculement des enjeux énergétiques vers l’Asie se font d’ores et déjà ressentir dans l’ensemble du secteur.

Ainsi, l’agence énergétique américaine (EIA) a annoncé la semaine dernière que la Chine avait détrôné les Etats-Unis en tant que premier importateur mondial de pétrole. Et le cabinet Wood Mackenzie a calculé cet été que la facture pétrolière chinoise pourrait flamber à 500 milliards de dollars par an en 2020, modifiant ainsi en profondeur les échanges commerciaux planétaires.

C’est vrai aussi dans le gaz naturel, où la demande des nations asiatiques pousse les énergéticiens à développer leur offre de gaz naturel liquéfié, transportable par bateaux et donc accessible aux marchés non desservis par des gazoducs.

“Dans le gaz, nous avons recentré notre centre de gravité du bassin Atlantique vers l’Asie-Pacifique, en passant des accords commerciaux avec de grands acteurs asiatiques”, a expliqué à l’AFP Gérard Mestrallet, PDG de l’énergéticien français GDF Suez.

Le groupe a ainsi installé des infrastructures dans la région, notamment en Inde et en Chine, et participe à un terminal d’exportation de gaz naturel liquéfié en construction aux Etats-Unis, qui lui permettra de desservir les marchés asiatiques en passant par Panama.

Le malaisien Petronas va quant à lui investir près de 26 milliards d’euros dans des terminaux d’exportation de gaz au Canada.

La demande asiatique de charbon est toute aussi spectaculaire. La Chine absorbe déjà plus de la moitié du charbon produit mondialement, et, toujours selon Wood Mackenzie, ce vénérable combustible devrait (re)devenir en 2018 l’énergie la plus consommée dans le monde, devant le pétrole. La faute à cet appétit chinois, qui pèsera pour les deux-tiers de la hausse de la demande houillère entre 2010 et 2020.

Le nucléaire n’est pas non plus épargné par cette onde de choc. Malgré les incertitudes déclenchées par la catastrophe de Fukushima au Japon, le continent fait aujourd’hui figure de principal moteur des projets de centrales atomiques, Chine et Inde en tête, avec 30 et 7 réacteurs respectivement en construction, et des dizaines d’autres dans les tuyaux, selon l’Association mondiale du nucléaire.

Enfin, l’Asie, dans sa quête éperdue d’énergie, mise de plus en plus sur les renouvelables, éolien et solaire, pour compléter son bouquet énergétique. Même si, vu leurs coûts encore très élevés, surtout par rapport au charbon, leur place restera limitée.

Une étude de la Banque asiatique de développement publiée à Daegu montre que leur part dans la production d’énergie du continent passerait de 1,9% en 2010 à 7,1% en 2035, dans son scénario de base.

Mais cela n’a pas empêché les industriels chinois de s’imposer ces dernières années sur le marché des panneaux solaires, au grand dam des pionniers européens.

Et la même histoire pourrait se répéter dans l’éolien, où deux chinois sont désormais solidement installés sur le podium des plus grands fabricants mondiaux d’éoliennes, derrière le danois Vestas, d’après la société spécialisée Cleantech Investor.