Tunisie – 22ème Congrès de l’UGTT à Tabarka : L’union sacrée des syndicalistes a prévalu

abassi-ugtt-1.jpgL’avant-congrès de Tabarka, l’hostilité déclarée de certains partis politiques au pouvoir, la montée des périls, au lendemain de la Constituante et les compagnes de presse, bien orchestrées sur les réseaux sociaux et les médias écrits et électroniques, mettant en cause l’intégrité morale et la ligne de conduite d’Abdessalem Jerad, secrétaire général de l’organisation syndicale, préfiguraient l’union sacrée des militants de la Place Mohammed Ali. Autour de la maison commune. Que les congressistes, d’ailleurs, n’ont pas démentie tout au long de leurs travaux, à l’hôtel Dar Ismaiel, à Tabarka.

Les sensibilités traditionnelles au sein de la Centrale ont obéi à des règles précises, susceptibles de donner matière à une analyse qui fera apparaître les combinaisons possibles. Le suspense a été bien entretenu autour de quelques candidatures emblématiques. Porteuses, nous dit-on, de polémiques et de discordes! Feront-t-elles parties du consensus souhaité? De la liste d’Hussein Abassi, favori des sondages? Parrainée par les ténors et la vieille garde de l’UGTT, soucieuse d’assurer ses arrières avant de rendre le tablier!

Apparemment, Abdelmadjid Sahraoui, secrétaire général-adjoint de l’Union Syndicale du Maghreb Arabe, fit l’objet d’intenses tractations. Entre les faiseurs des rois. Eh oui…! S’il jouissait de l’appui des délégués de Sousse et de Monastir avec le renfort d’Ali Romdhane, membre du BE et fidèle héritier de la ligne Achouriste Place Mohammed Ali, la défiance à son encontre était de mise parmi de larges franges de la base militante.

Le ton est donné

Tout de suite après le coup d’envoi des travaux du 22ème Congrès, des syndicalistes, dont la plupart appartiennent à des mouvances radicales gauchisantes, voulaient forcer la porte de l’hôtel et entrer en contact avec les congressistes. Pour présenter des doléances et mener leur campagne électorale. Après quelques tergiversations, le service d’ordre, qui a eu la main lourde sur les journalistes aussi, a réussi à les repousser au-delà du périmètre consenti. Ces échauffourées n’ont pas empêché la constitution de la commission des vérifications des mandats, du dépouillement et du contrôle financier. Cela dit, les coulisses ont la part belle des contacts. Des arrangements. Des compromis en gestation.

En effet, l’environnement de la salle du congrès était chargé de symboles. C’est qu’il s’agit de faire une campagne, de participer à une opération de guerre. De pacification. Se mettre en campagne, c’est «se mettre sur le pied de guerre», nous dit le Petit Robert. Les fantassins des uns et des autres parcourent tous les couloirs et occupent chacun, selon ses aptitudes, le terrain, le moindre recoin, tout en s’épiant, s’espionnant, sans scrupules. En y regardant de plus près, on voit comment se combine la métaphore guerrière et la référence à la territorialité… La parabole d’un savoir-faire typiquement syndicaliste.

Un candidat, qui fait campagne, est celui qui bat la campagne. Hfaid Hfaid, soutenu à bras le corps dans le secteur de l’enseignement de base, mais rejeté par le POCT, sa formation politique d’origine, qui lui a préféré Jilani Hammami, n’a pas pour autant baissé les bras et a même réussi, après un véritable quadrillage des délégués et de l’espace de l’hôtel, à figurer sur la liste de Hussein Abassi, le futur homme fort de l’UGTT.

C’est le temps des tractations

Autant dire que l’élection du nouveau Bureau Exécutif de la Centrale syndicale a mis en jeu un dispositif de conquête et de persuasion bien organisé. La machine électorale de l’appareil de l’UGTT se met en marche. Ratisse large. S’avance sur le mode du défi. Affiche une sérénité sans faille. Bien huilée, elle plonge, sans peine, dans ce grand enjeu où les tractations, les accords et les volte-face de dernière minute ne sont pas à exclure.

Au troisième jour, voici venu le temps de l’intox. De la guerre des tracts. Des ballons d’essai. De la pression. Des surenchères. Des menaces de retrait. Du congrès. Qui fusent des délégués du Sahel, attachés à la présence d’Abdelmadjid Sahraoui au sein de la liste consensuelle.

Cependant, prenant acte du rejet de la candidature de l’homme fort des délégations de Sousse et de Monastir, Ali Romdhane, soucieux de préserver les équilibres et inquiet de voir la prochaine direction virer à gauche, initie une autre liste. Appuie Sahraoui. Et essaie d’obtenir l’assentiment de la base syndicale. En vain.

Après divers avatars, les urnes, au bout d’une longue nuit d’attente, annoncent la victoire sans appel de la liste d’Hussein Abassi, fruit d’un compromis savamment élaboré depuis des mois. Dans les alcôves et les antichambres de la Place Mohammed Ali.