Economie mondiale : Mauvaises prévisions pour une cinquantaine de pays en 2009

Selon une évaluation
révisée du Fonds monétaire international (FMI) dont nous avons reçu une
copie, une cinquantaine de pays en développement resteront vulnérables à la
hausse des prix des denrées alimentaires et des carburants jusqu’à la fin de
l’année 2009. Le Directeur général de l’institution, Dominique Strauss-Kahn,
a déclaré que si la communauté internationale se soucie aujourd’hui
principalement de la crise financière dans les pays avancés, «il est
important de ne pas perdre de vue ‘l’autre crise’ : la persistance des
effets néfastes du renchérissement des denrées alimentaires et des
carburants sur certains des pays les plus pauvres du monde».

«Si les prix des denrées alimentaires et des carburants ont reculé quelque
peu ces derniers mois, ils restent largement supérieurs à ce qu’ils étaient
avant leur montée récente», a noté M. Strauss-Kahn. «Pour un grand nombre de
pays, surtout en Afrique, il s’agit d’un choc considérable». Le patron du
FMI appelle à une «action plus énergique» de la communauté internationale,
sous la forme d’un surcroît d’aide en faveur des pays vulnérables.

Selon l’évaluation révisée du FMI, les répercussions des hausses des prix
des denrées alimentaires et des carburants sur les pays en développement,
loin de s’atténuer, ont continué de s’aggraver depuis le rapport précédent
de l’institution en juin dernier. À la mi-septembre, les cours du pétrole
étaient inférieurs d’environ 40% au niveau de prix de la mi-juillet, mais
quand même deux fois plus élevé qu’à la fin de 2006. Les prix des produits
alimentaires ont, quant à eux, reculé de 8 % par rapport à leur niveau
maximal du mois de juin, mais ils restent supérieurs à ceux de la fin 2006.

En conséquence, le FMI prévoit que les pays à faible revenu importateurs
nets de carburants vont enregistrer une augmentation de leur facture
énergétique équivalant à 3,2% de leur PIB, soit 60 milliards de dollars.
Pour 43 pays importateurs nets de denrées alimentaires, la hausse de la
facture alimentation s’établit à 0,8% du PIB, soit 7,2 milliards de dollars.

«D’un point de vue macroéconomique, nous observons en conséquence un
affaiblissement des positions de la balance des paiements et des budgets
nationaux, ainsi qu’une accélération de l’inflation», a noté M.
Strauss-Kahn. Le taux d’inflation moyen dans les pays à faible revenu a
progressé de près de 3 points de pourcentage au deuxième trimestre de 2008
et devrait dépasser 13% d’ici la fin de l’année. «Comme nous le savons
tous», a souligné M. Strauss-Kahn, «l’inflation touche tout le monde, mais
en particulier les pauvres».

Le coût des mesures budgétaires qui sont prises pour faire face à ce
renchérissement de l’alimentation et des carburants continue d’augmenter
aussi. Les pays ont réagi principalement en réduisant les taxes et les
droits de douane, en relevant les subventions universelles, en développant
les programmes de transferts et en augmentant les salaires dans le secteur
public. Selon l’évaluation révisée du FMI, le coût budgétaire combiné de la
hausse des subventions à l’alimentation et aux carburants devrait dépasser
2% du PIB dans 24 pays. En outre, ces subventions sont presque toujours mal
ciblées et ne profitent donc pas à ceux qui en ont le plus besoin.

Appel à l’action

M. Strauss-Kahn a déclaré que «face à ces statistiques alarmantes, le monde
doit redoubler d’efforts. Nous devons unir nos forces au niveau national et
international pour éviter des tensions inflationnistes et budgétaires
excessives, tout en aidant les pauvres».

Deux priorités s’imposent pour les pays touchés, selon l’étude du FMI.
Premièrement, il s’agit de maîtriser de nouveau l’inflation : à cet effet,
il faudra mener une politique monétaire robuste, et la durcir si nécessaire,
et éviter des augmentations salariales insoutenables. Deuxièmement, il
convient de mieux cibler les programmes de protection sociale afin de
protéger les pauvres de manière plus efficace et plus économique.

M. Strauss-Kahn a appelé aussi les donateurs à redoubler d’efforts. «L’aide
extérieure, de préférence sous la forme de dons dans le cas des pays à
faible revenu, reste vitale pour alléger la charge de l’ajustement et
limiter les répercussions sur le revenu réel et la pauvreté».

En collaboration avec d’autres organisations internationales, le FMI a accru
son aide à 15 pays touchés, pour un total de 264 millions de dollars jusqu’à
présent. Le FMI, la Banque mondiale et l’Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE) se sont réunis le 23 septembre au siège du
FMI pour traiter des moyens d’améliorer la coordination de leurs programmes
de travail afin d’aider les pays membres à relever les défis du
renchérissement des produits énergétiques et alimentaires. En outre, le
Conseil d’administration du FMI a approuvé la semaine dernière la réforme
d’une ligne de crédit existante (la facilité de protection contre les chocs
exogènes) pour que les pays touchés reçoivent une aide financière plus
facilement et plus rapidement.