M. Donald Kaberuka interpelle la communauté scientifique africaine : “Au-delà de la géologie, l’Afrique doit gérer les risques et miser sur ses talents pour accélérer sa croissance’’

Par : Tallel
M. Donald Kaberuka interpelle la communauté scientifique africaine :”Au-delà
de la géologie, l’Afrique doit gérer les risques et miser sur ses talents
pour accélérer sa croissance”

Le président du Groupe de la
Banque africaine de développement (Bad), Donald Kaberuka, a exhorté les
chercheurs, les décideurs politiques, les scientifiques et les économistes
participant à la Conférence économique africaine d’entrer en émulation, au
sein même de leurs organisations ou de leurs centres de recherche, pour
intensifier leurs recherches autour de solutions adaptées à l’Afrique. C’est
là une des conditions pour que les progrès économiques actuels puissent être
soutenus sur le long terme.

 

S’adressant à la communauté
scientifique africaine pendant la conférence, qui s’est tenue à Addis-Abeba
du 15 au 17 novembre 2007, M. Kaberuka a déclaré que l’Afrique pourrait
réaliser son rêve si elle misait plus sur le développement de ses talents
plutôt que sur la géologie. Un sous-sol richement doté constitue de toute
évidence un avantage capital, mais il ne suffit guère à donner au continent
la croissance et la prospérité pour lesquelles il se bat.

 

«L’Afrique peut réaliser son
rêve, mais pour le réaliser pleinement elle aura bien plus besoin des
talents africains que de sa géologie. Un sous-sol richement doté constitue
de toute évidence un avantage capital, mais ce n’est pas suffisant.
Inversement, un pays sans ressources naturelles n’est pas condamné à la
pauvreté et à la dépendance», a martelé M. Kaberuka. Il a indiqué à cet
égard que « ni l’Inde ni la Chine ne [disposaient] d’un sous-sol
particulièrement riche. Mais ce sont là deux pays où règnent la paix et la
stabilité, qui peuvent compter sur une population très fortement qualifiée
et qui ont mis la science et la technologie au centre de leurs priorités
pour dépasser la pauvreté. »

 

Le temps est venu de se
remobiliser pour développer les talents africains et d’y puiser, a-t-il
préconisé. «Nous pouvons y arriver si nous prémunissons notre continent
contre l’instabilité et les conflits pour que le talent puisse s’y
épanouir», a-t-il insisté.

 

M. Kaberuka a mis l’accent à ce
propos sur l’importance de la paix et de la stabilité dans les efforts de
développement du continent, affirmant que l’Afrique pourrait devenir la
prochaine frontière du développement pour peu que la paix et la sécurité,
deux préalables à l’épanouissement du talent africain, y prévalent.

 

Afin de permettre aux pays
membres régionaux du Groupe de la Bad de développer le vivier de talents sur
lequel se fondent beaucoup d’espoirs, la Bad est en train de définir une
nouvelle politique sectorielle lui permettant d’aider les institutions
d’enseignement supérieur du continent à adopter la science et la technologie
comme domaines prioritaires, a signalé M. Kaberuka. Il a dans ce contexte
déploré la détérioration des universités africaines au cours des dernières
décennies.

 

«Après 50 années d’indépendance,
les institutions africaines d’enseignement supérieur se sont, sous le poids
de la demande et du laisser-aller, sérieusement détériorées. Si dans les
années 1950 certaines d’entre elles figuraient dans le cercle des meilleurs
établissements mondiaux, ce n’est guère plus le cas aujourd’hui.
L’intelligentsia africaine est du coup contrainte à se former à l’étranger,
où il est fréquent qu’elle reste», a déploré le président Kaberuka.
«Plusieurs pays n’en finissent pas de dépendre d’une assistance technique
«de courte durée» qui, bien que bien intentionnée, ne saurait se substituer
au talent local», a-t-il ajouté.

 

Se prononçant sur la performance
économique du continent, M. Kaberuka a estimé que les économies africaines
se sont graduellement raffermies au cours des cinq dernières années. Les
facteurs de cette croissance, a-t-il expliqué, sont aussi bien internes
qu’externes. Il a ajouté que sauf catastrophe interne ou extérieure, les
perspectives sont prometteuses pour l’année à venir. Il a toutefois rappelé
que des doutes subsistaient sur la capacité de croissance de certains pays
et que la stabilité des conditions d’emprunt et de prêt constituait encore
une source de préoccupation au même titre que l’inégale répartition de la
croissance. Il a indiqué que les flux d’investissement direct, abstraction
faite du secteur minier, demeuraient modestes dans les autres pays et que la
structure productive de plusieurs économies africaines n’avait pas
significativement évolué au fil des ans.

 

Il a invité les Africains à faire
preuve de circonspection malgré le boum des ressources naturelles dans le
continent. «La fébrilité ambiante ne doit pas nous faire perdre le sens de
la retenue et de la réflexion, a-t-il mis en garde. Ce n’est pas la première
fois que les économies africaines bénéficient d’une croissance tirée après
l’envolée des cours des matières premières. Cela s’était déjà produit dans
les années 1950 et dans les années 1970. Les risques d’accident à l’échelle
de l’économie mondiale sont toujours là et il va de soi que leurs effets, du
moins après leur impact immédiat, finiraient par toucher l’Afrique».

(Source: African Economic Conference website:
www.afdb.org/aec)