Le Supply Chain Management

Par : Tallel
 

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rajel1.jpgLe cabinet
MKC a organisé récemment une série de séminaires sur la gestion de la chaîne
logistique (Supply Chain Management). Un thème très attendu dans la mesure
où il s’inscrit dans un vaste mouvement de recomposition de la Logistique en
Tunisie, dont l’ambition affichée est de devenir à court terme une
plateforme logistique régionale. Interview avec M. Mondher Khanfir,
fondateur et directeur de MKC, qui se positionne comme conseil en logistique
en Tunisie, avec à son actif de nombreuses études sur la performance
logistique, aussi bien au niveau micro que macroéconomique.

WMC : Pourquoi avoir choisi ce
thème, et dans quelle mesure il est d’actualité pour les entreprises
tunisiennes ?

Mondher Khanfir : Nous croyons fermement que la Supply Chain ou la
Logistique Globale sera au cœur des grands chantiers de restructuration de
l’ensemble des filières économiques dans les prochaines années en Tunisie.
C’est dans cet esprit que nous avons organisé notre premier séminaire sur le
Supply Chain Management en Tunisie dès 2002, grâce notamment au soutien de
l’Utica et de la Fondation Konrad Adenauer. Cette première action nous a
permis de sensibiliser les dirigeants et managers et de défricher le terrain.
Trois ans plus tard, nous sommes heureux de constater la multiplication de
projets logistiques, que ce soit à l’échelle de l’entreprise, qu’à l’échelle
du pays avec des programmes nationaux tels que le PDE II* qui donne à la
logistique une large part.

A notre niveau, nous veillons à entretenir cette dynamique, en offrant de
services très pointus, qui vont de la formulation de stratégie logistique,
jusqu’à l’implantation des lignes de process, le dimensionnement et
l’organisation des entrepôts, l’audit logistique, etc.


Quelle est la place actuelle de la
logistique en Tunisie et quels sont ses enjeux ?

Du fait de la globalisation et de la libéralisation du commerce, avec ce que
cela induit en terme de multiplication des sources d’approvisionnement et de
diversification des débouchés, nous observons aujourd’hui, dans pratiquement
toutes les filières, une recomposition de la logistique, avec à la clef un
passage de chaînes logistiques simples à des chaînes logistiques complexes.

Dans ce contexte, il est normal de voir la logistique prendre une place
prépondérante dans les stratégies de développement.


Concrètement, qu’est-ce que cela
engage comme investissements pour le pays …

Du fait de l’accélération de nos échanges commerciaux, qui évoluent
rappelons-le plus vite que la croissance de notre PIB, on fait face
actuellement à un débordement en terme de charges de travail généré par la
multiplication des flux (physiques et d’information) qui dépassent les
ressources administratives allouées, d’une part, et d’une saturation de nos
infrastructures d’autre part.

Se contenter d’une approche séquentielle de la logistique conduira très
vite, si ce n’est pas déjà le cas, à des frictions, voire des entraves dans
la chaîne d’approvisionnement.

Bien sûr des initiatives ont été entreprises pour prendre en compte cette
évolution, notamment avec des projets tels que Tunisie Trade Net et la
facilitation du commerce. Reste que du point de vue processus opérationnels,
que ce soit au niveau de la prise en charge ou la manutention des marchandises,
du dédouanement et de contrôle technique,… un reengineering total, tenant
compte d’objectifs stratégiques globaux, est rendu nécessaire afin de
répondre à l’impératif de productivité. Il ne s’agit pas de travailler plus
ou plus vite, mais de travailler mieux et plus efficacement.

…et au niveau de l’entreprise ?

Au niveau des entreprises, il s’agit de mettre en œuvre une gestion
logistique rigoureuse afin de maintenir la fluidité, la continuité, et de plus
en plus la traçabilité des différentes étapes de la chaîne
d’approvisionnement, depuis le fournisseur jusqu’au client. Ceci nécessite des investissements importants, aussi bien en
terme d’acquisition de connaissances et compétences, de réorganisation et
refonte des processus qu’au niveau de l’intégration d’outils technologiques.

Qui est concerné par le Supply Chain
Management ?

Tout le monde est concerné par le Supply Chain Management (SCM). Le moindre
acte transactionnel, tel que faire ses courses dans un marché, est
conditionné par la mise en œuvre de chaînes logistiques performantes. S’il y
a des défaillances, donc des ruptures et des surcoûts dans la chaîne, c’est
le consommateur final qui en paye le prix.


Du point de vue de la lecture économique,
qu’apporte le Supply Chain Management ?

Le fait d’intégrer l’approche SCM donne une nouvelle lecture de la
performance économique et de la compétitivité. A titre d’exemple, on se
plaint souvent en Tunisie de la prédominance du marché parallèle, qu’on
cherche à traiter essentiellement par des dispositifs juridiques, sans grand
succès.

Pour nous logisticiens, le problème est simple. Le marché parallèle
subsistera tant que la chaîne d’approvisionnement informelle sera plus
performante (en terme de coûts du moins) que la chaîne d’approvisionnement
officielle.

En identifiant les entraves générés soit par l’administration soit par les
opérateurs économiques eux-mêmes, nous pourrons les neutraliser ou du moins
réduire leurs effets afin de favoriser la fluidité et l’efficience des
chaînes d’approvisionnement officielles. C’est ce qui fera naturellement
barrage aux filières parallèles.


Quelles sont, d’après vous, les
perspectives qui se profilent à l’horizon?

La logistique étant à la base une invention militaire, lorsqu’on parle de
logistique, on fait souvent le parallèle avec la guerre. La rude compétition
à laquelle nous assistons aujourd’hui a basculé nos entreprises dans une
logique de «guerre économique non conventionnelle». Concrètement, il ne
s’agit plus pour les entreprises de protéger seulement leurs territoires,
mais de faire les bonnes alliances pour pouvoir attaquer n’importe où et à
tout moment. Ceci nécessite de formuler des stratégies de conquêtes
extraterritoriales, et une plus large implication et concertation entre les
différentes parties pour mettre en place un système logistique performant au
service de nos entreprises dont la mission est de faire à gagner à la
Tunisie le pari de la mondialisation.