
Coup de théâtre lors du panel inaugural des JES. Amine ben Ayed, président de l’IACE ainsi que Sahbi Mahjoub, commissaire des journées, ont renoncé à leurs interventions. C’est un geste élégant pour laisser du temps et du champ à leurs deux invités d’honneur.
Il s’agit de Samir Abdelhafidh, ministre de l’économie et du plan ainsi que Dominique de Villepin, ex-Premier ministre français. Il est le troisième Premier ministre français à se rendre aux JES.
Chacun d’entre eux a laissé une citation remarquable. Ainsi Raymond Barre, convié à se prononcer sur la dévaluation, avait dit sans ambiguïté : ‘’c’est une perte de substance’’. Jean-Pierre Raffarin, à son tour, sollicité sur le meilleur timing pour lancer les réformes, avait répondu : ‘’ ça se fait à chaud dès l’arrivée aux affaires car l’usure du pouvoir ne manquera pas de l’entraver’’.

Un monde en perte de repères
Dominique de Villepin laisse entendre que le monde est confronté à un désordre économique. Le conférencier évoque un moment décisif de transformation historique rapide. Il est irrité par la fureur américaine pour maintenir une asymétrie avec le reste du monde.
Par ailleurs, la Chine, anciennement mécano manufacturier et marchand dit ‘’Atelier du monde’’, devient une puissance technologique. Elle surclasse les États-Unis dans 9 domaines technologiques essentiels. Notamment pour les batteries électriques et les algorithmes. Cela sonne le glas de la mondialisation libérale qu’on a connue sous l’égide de l’OMC. De plus, l’ordre monétaire fiduciaire est durement challengé par la crypto et la blockchain. Tout cela concourt à tourmenter le management des entreprises.
La course à la suprématie technologique
Dominique de Villepin pense que le monde ne tardera pas à se réorganiser différemment. Les pays du Sud-Est asiatique finiraient sur orbite chinoise. Et l’Amérique latine serait de plus en plus sous l’aile des États-Unis.
L’Europe, pour sa part, serait encore plus autocentrée, comprenez plus enclavée. Dans cette configuration, le commerce intra-zone sera prépondérant. Et la course à la suprématie technologique rythmera la compétition mondiale.
Dans ce cadre, il existe une forte opportunité de rapprochement entre l’Europe, l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient et par extension le reste du continent africain. Naturellement, la sphère technologique sous ses différentes déclinaisons technologiques et notamment l’IA sera en pointe.
Une vision de rupture
Dans ce cadre multipolaire coexisteront le capitalisme d’État à la chinoise, le capitalisme de plateforme à l’américaine, enfin le capitalisme de consommation de masse européen.
L’entreprise devra se développer sur son marché domestique et celui de proximité. Les entreprises tunisiennes pourront naviguer dans un espace économique européen, moyen-oriental et africain. C’est une orientation plausible.
Il convient que les entreprises procèdent à une pause stratégique, une forme de ‘’Reset’’ pour recaler leur trajectoire en cohérence avec le nouvel ordre économique.
ALI DRISS
EN BREF
- Les JES s’ouvrent sur un panel recentré autour de Dominique de Villepin et du ministre de l’Économie.
- L’ancien Premier ministre décrit un monde en désordre économique et technologique.
- La montée en puissance technologique de la Chine bouleverse la mondialisation libérale.
- La compétition mondiale se structure autour de la suprématie technologique.
- Les entreprises sont appelées à une pause stratégique pour s’adapter au nouvel ordre économique.
La course à la suprématie technologique

