Catastrophistes les experts, les vrais économistes tunisiens ? Il faut reconnaître que 0,4% de croissance sur l’année 2023 avec un recul de croissance sur les deux derniers trimestres s’appelle une récession même si en haut lieu, on considère le fait d’honorer ses dettes à l’international comme un exploit digne des Nobels mondiaux de l’Économie !  Mais comment faire entendre raison à un État qui avance à l’aveugle en mettant en place des doctrines économiques adossées à des idées datant d’un autre siècle, réchauffées et qui ont prouvé leur inefficience !

L’économie communiste et en prime les kolkhozes ont été à l’origine du sous-développement économique de l’Union soviétique, laquelle depuis que devenue URSS, a remis en question ses politiques et s’est intégrée dans une économie plus libérale, plus encourageante pour l’initiative privée et plus soucieuse d’encourager des champions nationaux dans l’industrie et le service.

La Tunisie, elle, se complait dans l’autosatisfaction injustifiée ! “Les signaux émis cette semaine par la conjoncture témoignent des effets collatéraux de la démagogie et de la mésintelligence de la nature de la crise tunisienne. L’espoir d’une démocratisation de la Tunisie a bel et bien vécu. L’ill-libéralisme qui règne à tous les étages conduit le gouvernement à servir du réchauffé et l’économie vers la catastrophe. En témoignent, le crédit bancaire, cœur battant de l’économie est quasiment à l’arrêt et la persistance d’un sous-investissement agricole qui perdure bien avant la survenue de la sécheresse. La Tunisie continue de sacrifier l’investissement pour vivre au-dessus de ses moyens comme l’illustre la baisse depuis plus d’un an du prix de l’essence et la baisse des crédits budgétaires allouées aux « missions » éducation et santé. En vérité, le populisme qui sert de ligne d’horizon à la politique économique du pays est en train de desservir le « peuple » pour lequel la Tunisie est en train de se saigner et de sacrifier son avenir” annonçait Hechmi Alaya dans le dernier numéro d’Ecoweek.

“Le populisme qui sert de ligne d’horizon à la politique économique du pays est en train de desservir le « peuple » pour lequel la Tunisie est en train de se saigner et de sacrifier son avenir.” – Hechmi Alaya, Ecoweek

En fait, comment justifier le recul de croissance préoccupant de la Tunisie ? Par une saison agricole catastrophique à cause de la sécheresse ? Non répondent certains experts, cette saison a été sauvée par une récolte oléicole exceptionnelle avec des exportations en augmentation de 1,3 milliard de dinars ce qui a relativement compensé la baisse de la récolte céréalière.

Aucune chance de relance économique avec un climat d’affaires délétère caractérisé par le désinvestissement !

La question que nous devrions nous poser devrait plutôt être : l’investissement a-t-il repris pour renouer avec la croissance ? L’investissement est en baisse continue depuis 2020 et à ce jour, nous n’avons pas encore atteint le taux de récupération de 100% par rapport à l’année 2019 avant (COVID).

Il baisse dans les trois secteurs : dans l’industrie, les services et l’agriculture.

L’investissement est le plus grand mal d’une Tunisie où le climat d’affaires est de plus en plus en souffrance ! L’étude réalisée par l’Institut Tunisien de la Compétitivité et des Études Quantitatives (ITCEQ), sur l’indice de perception du Climat des Affaires (IPCA) au mois d’octobre 2023, montre que la Tunisie a perdu 15 points par rapport à son positionnement en 2015. Le score de la Tunisie ne cesse de baisser d’une année à l’autre. Aujourd’hui elle est à 45 points, alors qu’en 2015, elle était à 60 points !

Du coup, nous ne pouvons imputer la décroissance à la sécheresse uniquement mais plus aux politiques entreprises pour encourager l’investissement et lesquelles à ce jour n’ont pas montré leur efficience.

Les 0,4% de croissance ou plutôt de décroissance a donné lieu à plus de chômage. Un taux de chômage de 16,4% selon l’INS : “Au quatrième trimestre de l’année 2023, le nombre de chômeurs est estimé à 667,5 mille, contre 638,1 mille au troisième trimestre de la même année. Avec cette hausse du nombre des chômeurs, le taux de chômage augmente pour s’établir à 16,4 % (contre 15,8 % au troisième trimestre de l’année et 15,2 au quatrième trimestre de 2022). Le taux de chômage des hommes a augmenté, passant de 13,4% au troisième trimestre à 13,8 %, tandis que pour les femmes, le taux de chômage a atteint 22,2 % au cours du quatrième trimestre de l’année 2023, comparé à 21,7 % au troisième trimestre de la même année”.

Du coup, aucune chance de relance économique avec un climat d’affaires délétère caractérisé par le désinvestissement !

Les 0,4% ont aussi donné lieu à une augmentation du déficit budgétaire parce que les 7,7% fixés dans la loi des Finances ont été calculés sur la base d’un PIB de 159 milliards de dinars. La croissance ayant reculé de 0,9% à 0,4%, l’État tunisien ne va pas pouvoir atteindre l’objectif des 159 milliards de dinars. Le recul du PIB engendrera un déficit budgétaire plus exacerbé.

“L’investissement est le plus grand mal d’une Tunisie où le climat d’affaires est de plus en plus en souffrance!” – Etude de l’ITCEQ

Les réalisations budgétaires à fin novembre n’ont pas non plus été réalisées selon les objectifs prévus dans le cadre de la loi des finances complémentaires. Au niveau des rémunérations, ce fût conforme aux prévisions selon lesquelles, on devait être à 91,6%, les chiffres disponibles à ce jour évalue les réalisations à 86% ce qui est tolérable.

Pour les recettes fiscales et non fiscales, le gap ne doit pas non plus être important puisque le mois de décembre comporte deux échéances importantes, celle de la déclaration fiscale  et celle de l’acompte provisionnel. Le problème se situe plus au niveau des transferts et des subventions.

Concernant les emprunts on est déjà à 65% à fin novembre, c’est-à-dire que si on va être à 100% on doit engager de nouveaux emprunts, rien que pour ce mois de décembre soit 9 milliards de dinars pour boucler le budget 2023 selon les estimations. En attendant la publication des chiffres du mois de décembre.

Pour résumer, le pays souffre d’une croissance anémique, dont la conséquence est la récession comme le stipulent les experts. Il souffre aussi de gap important entre prévisions et réalisations dans le budget 2023, mais, l’État ne s’en soucie pas, du moment qu’il honore ses engagements internationaux. En ce mois de février 2024, 850 millions d’euros ont été remboursés alors pourquoi se préoccuper de recul du financement de l’économie et de l’état de léthargie des banques, pourquoi s’inquiéter de la baisse de l’investissement dans l’agriculture, ou de la désindustrialisation ?

Récession, Désinvestissement, peu importe ! L’honneur est sauf, la souveraineté est intacte : les dettes sont payées !