Les deux rives de la Méditerranée devraient coopérer face aux défis croissants liés à l’eau, ont souligné la majorité des intervenants à l’ouverture du 5ème Forum méditerranéen sur l’eau, dont les travaux ont été ouverts, lundi, à Tunis et se poursuivront jusqu’à mercredi, 7 février 2024.

La région arabe est l’une des régions les plus exposées au problème de rareté de l’eau. Les ressources en eau disponibles dans cette région s’établissent à 260 milliard de m3 contre des besoins beaucoup plus élevés, a fait savoir Nasreddine Elabid, directeur général du Centre arabe pour l’étude des zones arides et des terres sèches.

« A l’horizon 2030, les pays arabes, dont les besoins en eau sont en croissance continue, feront face à un gap hydrique estimé à 127 milliards de M3 ».

D’après le responsable, en 2023, la part moyenne d’eau disponible par habitant dans la région arabe est aux alentours de 550 m3. Cette part évaluée à peine à 400 m3 en Tunisie, ne dépasse pas 200 m3 dans 8 pays arabes et 100 m3 dans six autres pays.

Cette pénurie, exacerbée par l’impact des conflits dans la région et des changements climatiques, selon Elabid, est devenue une véritable menace pour la sécurité de la région.

Par ailleurs, si l’eau est un bien commun et si le sixième objectif des ODD vise « un accès universel et équitable à l’eau potable, à l’hygiène et à l’assainissement d’ici 2030, en particulier pour les populations vulnérables », certaines populations sont totalement privées de ce droit.

C’est le cas de la population à Gaza, dont la situation est qualifiée de « catastrophique » par le secrétaire général adjoint au secrétariat de l’Union pour la Méditerranée, Almotaz Abadi.

Abadi a souligné à cet effet l’importance d’une mobilisation régionale pour défendre le droit humain d’accès à l’eau pour tous.

«Des milliers de personnes dépourvues d’eau et menacées par la prolifération des eaux polluées. Des personnes, n’ayant aucun accès à l’eau, se lavent directement à l’eau de pluie pour faire la prière », a-t-il dit.

Le responsable a fait entendre que la gestion de la question de l’eau à l’échelle de la région « ne doit laisser personne pour compte », appelant à « donner une autre chance à l’humanité en prenant soin les uns des autres ».

Le président de l’Institut méditerranéen de l’eau, Alain Meyssonnier, a souligné, pour sa part, l’impératif pour les deux rives de coopérer pour faire face aux défis liés à l’eau.

« En quelques années, nous sommes passés de l’abondance à la pénurie. La différence se rétrécit entre le nord et le sud de la Méditerranée en matière de ressources en eau, d’où l’importance de se mettre ensemble au travail pour faire face à cette pénurie »

Malgré la situation alarmante des ressources hydriques dans la méditerranée, Meyssonnier, a dressé trois constats encourageants. « Les solutions existent, sachons les prioriser ensemble pour réussir à les mettre œuvre. Une prise de conscience est de plus en plus manifeste quant à cette situation aussi bien par les entreprises que par les citoyens des différents pays. L’implication de la jeunesse dans la résolution des défis liés à l’eau est aussi un facteur très important, car c’est à la jeunesse qu’appartient la mise en œuvre des solutions et des réponses » a-t-il noté.

Pour Loïc Fauchon, Président du Conseil mondial de l’eau «  l’eau est actuellement attaquée. Et si l’eau est attaquée, c’est toute la planète qui est en souffrance ».

« Pour de nombreuses années on a départagé l’homme et la nature et on s’est adonné à un pillage prolongé des ressources. Aujourd’hui nous sommes face à trois priorités : trouver l’eau nécessaire pour la nature, l’eau nécessaire pour la santé et l’eau nécessaire pour la nourriture », a-t-il souligné.

«Pour ce faire, il va falloir accroitre l’offre à travers plusieurs techniques, dont le dessalement, le recyclage des eaux usées et mieux maitriser la demande (digitalisation des modes de gestion, évolution des comportements…), a encore précisé la même source.

Fauchon plaide aussi pour un traitement horizontal de l’eau en se basant sur trois piliers  à savoir l’innovation technologique, le financement des infrastructures et de leur maintenance ».

Selon lui «  nul ne doit être privé de son droit d’accéder à l’eau. L’eau est aujourd’hui politique et c’est aux politiques qu’incombe la responsabilité de donner la priorité à l’eau et de trouver des solutions ».