L’affaire de concession de l’espace culturel de l’Acropolium a connu une suite favorable au profit de l’Etat tunisien, représenté par le ministère des Affaires Culturelles et ses institutions en charge du patrimoine, qui a définitivement récupéré les lieux par la justice.

Amel Hachena, Directrice générale de l’Agence de mise en valeur du patrimoine et de la promotion culturelle (AMVPPC) a annoncé, mardi, que ” le monument est actuellement entre les mains de l’AMVPPC “.

Dans une déclaration à la TAP, elle a fait savoir que ” l’ancien locataire a livré, définitivement, le monument, et ce, en attendant de récupérer la clé par huissier de justice”. Elle confirme ainsi l’information contenue dans un communiqué publié la veille, le lundi soir 15 février, sur le réseau social facebook de l’Amvppc annonçant: “l’évacuation effective de l’église Saint Louis à Carthage, communément connu par l’Acropolium, a bien eu lieu aujourd’hui”.

Mme Hachena indique que cette ultime étape intervient “en application d’une décision judiciaire d’urgence contre l’exploitant du monument, sommé à quitter les lieux, au terme d’un long litige de près de dix ans”.

Un litige oppose, depuis 2009, le ministère des affaires culturelles représenté par l’Amvppc au promoteur de l’Espace culturel de l'”Acropolium” qu’abrite l’ancienne Cathédrale de Carthage qui devra connaître un large plan de restauration.

Baptisée l’Acropolium en 1993, la Cathédrale Saint Louis, cédée à l’Etat tunisien en 1974, a été construite entre 1840 et 1845 à Carthage suite à une donation d’un terrain au roi de France par le bey de Tunis en 1830. Cet édifice, à l’architecture byzantino-mauresque qui surplombe la colline de Byrsa, a été pris en concession par le promoteur Mustapha El Okbi, pour en faire un espace culturel et artistique.

Hachena a rappelé que l’évacuation des lieux s’est déroulée en quatre phases avant que la nouvelle décision de la justice ne soit rendue. Sa mise en œuvre a commencé le 06 janvier 2021 avec un délai de grâce pour l’exploitant afin de lui permettre de libérer les lieux.

Dans un premier temps, il avait jusqu’au 27 janvier pour partir. A sa demande, il a pu bénéficier de trois nouveaux délais, pour les 3, 10 et 15 février, avant de remettre le monument en bon état sous la supervision d’un huissier notaire.

L’Amvppc a publié des photos qui montrent la dégradation des lieux, faisant savoir qu’à la suite de l’évacuation, une inspection préliminaire des lieux indique l’existence de graves fissures qui constituent une menace pour la sécurité du monument “. Ce constat a été récemment évoqué par l’Amvppc qui fait état d’un édifice en manque de maintenance et des ” travaux arbitraires sans consulter l’INP (Institut national du patrimoine) ni l’Amvppc “.

Hachena souligne qu’une équipe de travail conjointe composée d’experts de l’Amvppc et de l’INP doit procéder, à partir de ce mercredi 17 février, à l’inspection minutieuse du monument. Elle présentera un rapport détaillé en vue de procéder aux interventions urgentes pour le sa restauration et sauvegarde.

“L’opinion publique sera informée de tous les développements à temps”, a encore affirmé la Directrice générale de l’AMVPPC.

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Un plan de restauration et de maintenance et un appel d’offres sont prévus

A ce stade, Amel Hachena a annoncé un plan de restauration et de maintenance de l’ancienne église qui devra aussitôt démarrer moyennant des financements inclus dans le budget de l’année en cours.

Cependant, la responsable précise que la restauration et la maintenance de l’Acropolium ne rentrent pas dans le cadre du projet de réaménagement et de mise en valeur du musée de Carthage et des zones avoisinantes du site de Carthage. Ce projet en cours s’insère dans le cadre du programme Tounes Wejhetouna financé par l’UE.

Rappelons que le Comité de pilotage du projet de réaménagement et de mise en valeur du musée de Carthage et des zones avoisinantes du site de Carthage ainsi que la rénovation de bâtiments remarquables en Tunisie est composé de représentants du ministère des Affaires Culturelles (la Direction générale du patrimoine), l’Institut national du patrimoine (INP) et l’Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle (AMVPPC).

Outre le rôle des autorités tunisiennes, l’implication d’associations, ONG et entrepreneurs s’effectue à travers l’accompagnement des porteurs de projets pour la reconversion des sites patrimoniaux et par le biais de la valorisation d’initiatives innovantes (portées par des start-ups notamment) dans le champ culturel et patrimonial.

Au sujet de l’Acropolium, Hachana a parlé de l’appel d’offres qui va être lancé au courant de l’année 2021, pour une exploitation dans le cadre d’une nouvelle concession, selon un nouveau cahier de charges garantissant la préservation du monument et le respect des engagements financiers.

Cet appel d’offres sera ouvert pour tous les investisseurs et porteurs de projets culturels dont l’ancien promoteur.

Les travaux de restauration seront réalisés à l’Acropolium dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie du ministère de la Culture en matière de partenariat secteur public/privé.

Les réactions mitigées, sur internet et dans les médias, se poursuivent depuis l’annonce, récente, de la fin de concession de l’Acropolium. Cette affaire a fait couler beaucoup d’encre ces derniers temps et un collectif de soutien, à l’Acropolium et à son ancien locataire, a été également constitué sur les réseaux sociaux.

L’Amvppc est revenu sur les dessous de cette affaire. Le 10 janvier 2021, l’agence avait précisé que cette concession a été effectuée en vertu d’une convention en date du 9 octobre 1992 et entrée en vigueur le 26 octobre de l’année 1996 pour une durée de dix ans.

A la demande du promoteur et avec l’accord du ministère des affaires culturelles, la concession a été renouvelée pour une durée de trois ans. Après la fin des délais fixés, le promoteur refusait de quitter les lieux à l’amiable.

A ce sujet, l’Amvppc rappelle avoir saisi la justice qui a donné gain de cause le 29 novembre 2019 au ministère des Affaires culturelles en ordonnant le promoteur de quitter les lieux pour fin de concession. En vue de lui permettre de payer les dettes cumulées dans des conditions assez raisonnables, un accord de conciliation a été signé le 26 août 2020 en vertu duquel le promoteur devrait payer ses dettes sur plusieurs tranches avant de quitter les lieux le 31 décembre 2020.

Ainsi, une page se tourne dans cette affaire, en attendant de voir débarquer un nouvel exploitant de l’ancienne cathédrale située au coeur du site de Carthage, une zone du patrimoine mondial de l’UNESCO qui est au cœur d’un large programme d’appui à la diversification du tourisme, au développement de l’Artisanat et à la valorisation du patrimoine culturel tunisien.