La restructuration des banques publiques a permis de désigner de grands managers à leur tête, et ce que nous voyons aujourd’hui sur la scène financière prouve à quel point le processus activé et réalisé par feu Slim Chaker a été bénéfique pour ces banques.

Aujourd’hui, les contraintes de la Covid-19 bien gérées et avec un écosystème existant mais qui n’a jamais été exploité à sa juste valeur, Lotfi Debbabi, DG de la Société tunisienne de banque (STB) entre de plain-pied dans la transformation numérique.

Pour lui, le numérique n’est pas seulement un simple levier à forte valeur ajoutée mais l’acteur d’une mutation profonde du comportement humain. La Covid-19 a révélé la valeur du numérique dans les services bancaires et financiers. Elle a mis à nu les systèmes traditionnels fermés, ouvrant grandes les portes vers un nouveau système bancaire basé sur la réactivité, la rapidité et l’efficience.

«Il s’agit d’un modèle qui permet de passer d’une banque qui satisfait ses clients par des produits et services conventionnels à une autre qui rend le client épanoui à travers des parcours personnalisés», nous a-t-il déclaré dans un long entretien qui sera publié bientôt.

La STB, dirigée par Lotfi Debbabi depuis 2019, a réalisé en cette même année la meilleure performance du secteur, le meilleur taux d’évolution du PNB. «Nous avons réalisé un taux de croissance de 27% et le meilleur résultat avec 135% de plus que l’année 2018. Il est vrai que nous sommes une banque publique, mais j’ai toujours pensé que l’important n’est pas la forme de la structure du capital mais plutôt le mode de gouvernance et le management ».

Le DG de la STB explique qu’on peut diriger une structure privée, mais avec une gestion qui fait défaut et un mode de fonctionnement et de gouvernance défaillant, on obtient de mauvais résultats. Pour lui, il n’y a aucune différence entre banques publiques et banques privées. Et grâce à l’expérience réussie de la restructuration des banques publiques, celles-ci sont aujourd’hui des championnes qui concurrencent sérieusement les banques privées.

La STB se positionne aujourd’hui -et malgré un lourd passif- en troisième position après la BNA et la BIAT ; et en termes de productivité par unité, par ETP, elle a réalisé la deuxième performance du secteur. «A voir le rendement d’un haut cadre à la STB par rapport à d’autres et les résultats en termes relatifs, nous faisons des miracles. Nous avons beaucoup avancé en termes d’amélioration des niveaux des ratios prudentiels et du respect des standards de solvabilité, qu’il s’agisse de Tier 1, de Tier 2, du ratio LTD ou du ratio LCR. Nous avons dépassé tous les seuils normatifs relatifs à ces ratios. Et pendant la pandémie Covid-19, nous avons procédé à un stress test s’étalant sur six mois pour voir l’impact de cette situation exceptionnelle sur notre exercice et les répercussions qu’elle peut avoir ».

Lotfi Debbabi précise que, pour évaluer les risques de la pandémie sur la banque, avec ses équipes, il a examiné différents scénarios dont le fait de tomber à -25% du PNB suite au report des échéances et à l’accord de crédits de consolidation, la STB peut résister et reste à l’abri. Aujourd’hui, à la STB, on travaille sur des concepts avant-gardistes, sur le prévisionnel et l’anticipation des problèmes à aspects incertains et aléatoires.

De formation anglo-saxonne, le DG de la STB croit dur comme fer en l’importance de l’anticipation. «Je crois beaucoup au modèle anglo-saxon, je crois en la prospective, en notre capacité à imaginer ce qui peut arriver demain et nous préparer à l’affronter en élaborant les meilleures ripostes pour sortir gagnants. Je crois aussi à la transformation et à la culture numérique. Une culture que j’aimerais transmettre à mes collaborateurs qui valorise, de manière optimale, l’esprit de l’intelligence collective ».

Le maître mot du succès est une adhésion de tous dans une institution bancaire aussi importante que la STB. Et c’est le cas, témoigne Lotfi Debbabi qui a foi en l’engagement de ses collaborateurs et des différents personnels de la banque et pense que l’évolution du poste ne dépend plus de l’âge mais de la performance et de l’implication de chacun (e) dans sa mission. D’où l’importance d’agir dans le cadre d’un contrat-programme.

«Aujourd’hui, nous avons un conseil d’administration qui adhère complètement à cette philosophie et nous avons créée au sein du conseil une prime variable. Nous sommes dans le public mais nous avons adopté cette approche motivante et moderne. Aujourd’hui quand vous réalisez vos objectifs, votre salaire et vos primes ne sont plus comme les autres, donc la notion du public on ne la voit plus, dans ce sens».

Lotfi Debbabi, pur produit STB, précise que le secret du succès de la banque n’est pas seulement sa recapitalisation mais surtout son mode de gouvernance et sa capacité à évoluer au gré des mutations socioéconomiques et surtout technologiques.

«Le model d’intermédiation bancaire dans notre pays est à repenser. Même les SICAR n’appliquent plus la notion du capital risque et du capital développement et tout ce qui est Venture capital et Join capital n’existe plus. Nous devons changer cet état d’approches, nous devons apprendre à lire l’avenir, à anticiper ce qui peut arriver, oser prendre les bonnes décisions et être des acteurs effectifs dans le financement de l’économie ».