Nous allons vers une nouvelle redistribution des cartes en Afrique. Politiquement du moins. Ce scénario est envisagé par plusieurs experts, dont en premier ceux du Centre d’analyse, de prévision et de stratégie (CAPS).

En effet, selon le site agenceeconfin.com, dans une “note diplomatique” ayant pour titre “l’effet pangolin, la tempête qui vient en Afrique?”, le CAPS, think tank lié à la diplomatie française”… prédit un effet quasi-apocalyptique du COVID-19 sur les Etats africains”.

Et le think tank de préciser: « vu d’Afrique, le Covid-19 se présente sous la forme d’un chronogramme politique qui va amplifier les facteurs de crise des sociétés et des Etats ».

A première vue, l’hypothèse est défendable, en ce sens que le continent africain, même avec la dislocation des deux blocs (Est et Ouest), n’a toujours pas fini avec ses régimes clientélistes.

Du coup, on a sovent devant nous des Etats défaillants dans tous les domaines, ce qui fait que cette épidémie aura sans doute un énorme impact socioéconoique en Afrique plus qu’ailleurs. Autrement dit, “le coronavirus devrait révéler l’incapacité des Etats africains à protéger leurs populations”, souligne la note du CAPS.

Les experts du CAPS estiment qu’une crise politique pourrait provenir d'”un nombre trop élevé de décès, ou encore l’infection d’un dirigeant âgé. Dans ce cas de figure, les Etats les plus exposés à une déstabilisation seraient ceux du Sahel et de l’Afrique centrale, caractérisés par des politiques publiques défaillantes au contraire d’autres pays aux institutions plus solides tels que le Rwanda ou le Sénégal”.

Voici ce qu’indique le Quai d’Orsay: « En Afrique de l’Ouest, les mesures de confinement saperont l’équilibre fragile de l’informel, économie de survie quotidienne essentielle au maintien du contrat social. En Afrique centrale, le choc pourrait précipiter la crise finale de la rente pétrolière au Cameroun, au Gabon et au Congo-Brazzaville là aussi au cœur des équilibres sociaux », rapporte agenceecofin.

Le CAPS pour son analyse et prévoit “un scénario quasi-hollywoodien”, indiquant que les besoins essentiels liés à la crise sanitaire devraient faire apparaître des phénomènes de panique urbaine dans les villes africaines: « La question de la sélection ne portera pas sur les personnes à sauver médicalement (faute de capacités d’accueil), mais sur les besoins de premières nécessités : quel quartier ravitailler ? quelles autorités locales crédibles peuvent être les relais d’organisation de la distribution ? quels produits de première nécessité fournir dans une phase attendue de pénurie ? ».

Conséquence: la hausse des cas de délinquance, ce qui rendra encore plus fragile l’autorité de l’Etat.

Et puisqu’on est dans la diplomatie, où parfois l’art de prévoir est extrêmement important, le CAPS suggère au ministère des Affaires étrangères français de « se tourne vers de nouveaux interlocuteurs avec qui coordonner les efforts de gestion de la crise en Afrique ».

Le think tant a déjà identifié quatres catégories d’acteurs: les autorités religieuses, les artistes populaires, les diasporas et les  entrepreneurs économiques.

En tout cas, pour les experts du CAPS convaincus que la nouvelle pandémie entraînera une révolution politique dans certains pays africains, «anticiper le discrédit des autorités politiques signifie accompagner en urgence l’émergence d’autres formes d’autorités africaines crédibles pour s’adresser aux peuples afin d’affronter les responsabilités de la crise politique qui va naître du choc provoqué par le Covid-19 en Afrique ».

Pour conclure, le document du Quai d’Orsay proclame : « L’immanquable détournement de biens publics (à commencer par des masques) et de l’aide sanitaire internationale à venir (déjà dénoncée sous le terme « Covidbusiness ») peut facilement cristalliser l’ultime perte de crédit des dirigeants ».

Alors, est-ce que le scénario des experts du CAPS est plausible? Théoriquement, oui, mais en pratique, ce n’est pas évident, et cette pandémie risque même d’entraîner un renforcement de certains régimes autoritaires africains.

Donc, à ce stade, tout est permis, aucun scénario ne doit être écarté ou minimisé.