Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Slim Khalbous, l’implémentation du savoir-faire des compétences tunisiennes dans les entreprises, en particulier, et dans l’économie, en général, constitue aujourd’hui un enjeu de taille.

C’est en tout ce qu’il souligné lors d’une conférence organisée à Tunis, vendredi 19 juillet, sur la transition numérique, entre l’économique, le social et le sécuritaire : apport de la formation, de la recherche et de l’innovation.

Il assure qu’il existe un problème d’opérationnalisation, car “nous n’avons pas encore trouvé ni la façon de faire, ni l’état d’esprit, ni le mode de financement pour implémenter ce savoir-faire dans les entreprises…”.

Pourtant, il estime que la Tunisie compte aujourd’hui des compétences de très haut niveau et dispose de structures de recherches performantes.

En effet, explique-t-il, le pays compte 190 licences dans le domaine des TIC et de l’informatique, soit 18% de l’offre pédagogique de l’université tunisienne. En 2018, 300 thèses ont été soutenues en matière de TIC et de nouvelles technologies, qui s’ajoutent aux 400 articles indexés publiés, outre l’augmentation du budget de la recherche scientifique de 50%.

Mais, regrette le ministre de l’Enseignement supérieur, “la valeur ajoutée de toute cette production scientifique est en deçà des espérances”.

Revenant à la conférence proprement dite, Khalbous indique que celle-ci vise, justement, à approfondir la réflexion autour de stratégie à adopter et le mode opérationnel pour profiter de ces savoir-faire.

Khalbous a mis l’accent sur l’importance de renforcer la collaboration entre les différents départements ministériels pour mieux répondre aux nouveaux besoins et créer des cellules de recherche et développement entre les structures de recherche et les entreprises.

Il a, en outre, souligné la nécessité de garder des liens étroits avec les compétences tunisiennes à l’étranger pour profiter de leur expertise au service du développement du pays.

Abondant dans le même sens, Hichem Elloumi, vice-président de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA), a souligné que l’enjeu aujourd’hui est l’interaction, la synergie indispensable entre la recherche et développement et la production industrielle et entre l’université et l’entreprise.

“La transition numérique impacte potentiellement toute l’activité économique et concerne toutes les fonctions des entreprises, a-t-il déclaré. Toutes les tâches automatisables sont concernées par la transition numérique qui entraîne indéniablement une transformation plus ou moins rapide de certains métiers, voire la disparition de certains d’entre eux, imposant aux entreprises et aux différents acteurs concernés d’anticiper ces changements, au plus près des bassins d’emploi et cela même si la nature de ces évolutions et l’appréciation de leur ampleur est encore difficile à apprécier”.

Elloumi souligne toutefois que les données personnelles et celles des entreprises doivent être protégées pour que les utilisateurs puissent décider de leur devenir, y compris quand elles sont transférées d’un service à un autre, d’où la nécessité de protéger les systèmes industriels et les lignes de fabrication critiques contre les menaces de cybersécurité qui augmentent de façon spectaculaire.

Il pense également nécessaire de garantir des communications sûres et fiables, ainsi qu’une gestion sophistiquée de l’identité et de l’accès des machines et des utilisateurs

La Tunisie doit accélérer la mise en place d’une stratégie digitale qui couvre des institutions publiques et privées de tous secteurs, estime-t-il. “Il faut aussi déclencher et finaliser une fois pour toute la digitalisation de l’administration, promouvoir et mettre en place des Smart Cities dans diverses régions du pays, consacrer définitivement le rôle transversal du numérique pour l’ensemble des secteurs économiques”.

Pour lui, la Tunisie dispose bien de ressources humaines de haut niveau, d’un réservoir de compétences reconnues mais, concrètement, l’économie digitale reste vraiment à la traîne.

Dans cette optique, Elloumi estime urgent de faire la réforme de l’enseignement supérieur voire de l’éducation nationale pour introduire le digital dans l’état d’esprit et les pratiques de chaque élève ou étudiant, futur professionnel dans un secteur économique.

Il appelle donc à tenir compte, dans les programmes d’enseignement et de manière permanente, des nouveaux métiers dans le monde d’aujourd’hui et former pour cela de nouveaux diplômés ayant les compétences nécessaires, techniques ou humaines qui vont permettre à ces jeunes diplômés d’exercer réellement ces métiers.

D’après Elloumi, il faut développer l’innovation à travers la promotion des startups innovantes et toutes les initiatives de recherche et développement collaboratives entre universités et entreprises, développer la recherche et développement pour la création de pôles de compétitivité dans les secteurs prometteurs et renforcer le partenariat entre l’université, l’entreprise et les centres de recherche.