Le pouvoir d’achat du citoyen tunisien s’est dégradé de 88% entre 2010 et 2018, à cause, principalement, de la dépréciation de la valeur du dinar tunisien, selon des données de la Banque mondiale, a indiqué Ridha Chkoundali, professeur de l’enseignement supérieur en sciences économiques.

Intervenant, samedi 2 février, lors d’une rencontre organisée à Tunis par le Centre d’étude de l’Islam et de la Démocratie, sur la “dépréciation du dinar tunisien : Les causes et les solutions”, Chkoundali a souligné que pour retrouver un pouvoir d’achat du citoyen de la classe moyenne du même niveau que celui de 2010, il est indispensable de multiplier presque par deux le salaire de ce dernier, pour passer de 760 dinars actuellement à 1.500 dinars.

D’après lui, la dépréciation du dinar a eu des répercussions négatives également sur la société tunisienne, dans la mesure où elle a perdu de sa compétitivité, mais aussi sur l’Etat, en ce sens que le remboursement de ses dettes pèse lourd sur les finances publiques, notamment le remboursement des intérêts.

L’impact du dépréciation du dinars

Mettant l’accent sur les causes de la dépréciation du dinar, Chkoundali pointe du doigt l’aggravation du déficit commercial, lequel est passé de 4,8% du PIB en 2010 à 12,3% en 2018, du déficit courant (de 4,4% à 10,2%) et de l’inflation (de 3,4% à 7,5%).

Il estime, aussi, que c’est le résultat de l’injection de grandes liquidités sur le marché (15 milliards de dinars en 2018, contre 1 milliard de dinars en 2010), de l’augmentation du taux directeur de la BCT et de l’augmentation de la pression fiscale.

Abondant dans le même sens, Maher Belhaj, expert indépendant en économie et en finance, a fait savoir que la dépréciation du dinar est le résultat d’un déséquilibre entre la demande et l’offre sur le marché monétaire dû à l’importance de l’économie parallèle.

“La Tunisie fait face à 4 ennemis majeurs, à savoir la contrebande, l’évasion fiscale, le terrorisme et la corruption. Ces fléaux sont alimentés par le cashing, causant une fuite de liquidité qui n’a aucune trace dans les circuits officiels, a-t-il expliqué. La masse de liquidités circulant en Tunisie avoisine les 13 milliards de dinars, dont plus de 90% fuient les circuits bancaires”.

Dans ce cadre, l’expert estime impératif d’aller vers le decashing afin de surveiller les échanges et minimiser les liquidités circulant hors circuits organisés, ce qui est en mesure de contrer le marché parallèle et de renforcer la valeur du dinar tunisien.

Il recommande, également, de revoir la réglementation de change qu’il a qualifiée de “rigide” et de veiller à faire intégrer le circuit parallèle dans l’économie organisée, ainsi que d’appuyer le tissu économique, l’épine dorsale de notre économie, à travers, entre autres, la réduction de la pression fiscale et le lancement de mesures financières motivantes.

De son côté, l’ancien ministre des Finances, Slim Besbès, souligne que la dépréciation du dinar est la conséquence du déficit commercial, dû, surtout à la chute de la production de phosphates et de produits chimiques (3,5% en 2018, contre 10% en 2010), face à une importation excessive des produits énergétiques (1/3 du total de nos importations).

Besbès propose comme solution de mobiliser tous les moyens nécessaires afin de rétablir la production de phosphates et de produits pétroliers, de lancer de nouveaux projets se basant sur l’énergie renouvelable pour faire face à la demande excessive en énergie.