“Aujourd’hui, la réalisation par le secteur privé de projets de construction écologique et de développement durable a devancé de loin la réglementation mise en place par les pouvoirs publics”, a indiqué Lotfi Rejeb, architecte et expert international en éco-construction lors d’une conférence sur le thème “Urbanisme-architecture et villes durable”, tenue mardi, à l’ouverture des 10èmes journées de l’éco-construction et de l’innovation, qui se tiennent du 13 au 14 février 2018, au siège de l’UTICA, à Tunis.

Il constate “une non conformité entre les stratégies nationales de promotion de l’éco-construction et la réglementation actuelle régissant ce domaine”.

A cet égard, Rejeb a proposé la mise en place “d’une charte d’urbanisme qui constituera une étape intermédiaire entre l’amendement du cadre réglementaire et la concrétisation de la volonté des opérateurs privés”, recommandant que “des chartes soient élaborées au niveau de chaque commune, dans le cadre d’ateliers de réflexion auxquels participeront les représentants de la société civile, les responsables des communes, les promoteurs et les professionnels du domaine”.

“Cette charte donne une marge d’intervention à l’échelle de la communauté, en matière de réalisation de projets écologiques. L’autonomie du pays est le mot clé dans ce dossier, d’autant plus que la Tunisie recèle d’importantes ressources naturelles. Il est illogique que le pays importe de l’énergie alors qu’il devrait être exportateur de l’énergie solaire, puisqu’il bénéficie de 4.800 heures d’ensoleillement par an”.

De son côté, Taoufik Chabchoub, avocat à la cour de cassation, a indiqué que “le législateur tunisien ne cible pas le développement durable et la construction écologique, mais plutôt la lutte contre la pollution et la maîtrise de la consommation d’énergie. Notre cadre juridique manque d’un référentiel technique pour concrétiser le développement durable et nous sommes très en retard par rapport aux autres pays”.

Selon lui, la proposition de mettre en place une charte urbaine pourrait être une solution, néanmoins cette charte doit être adoptée par les pouvoirs publics, car si elle n’a pas la force comminatoire d’un texte juridique, elle va rester au stade des vœux pieux.

Il a souligné la non harmonisation entre le cadre juridique régissant le domaine de l’éco-construction et du développement durable (article 1 du code de l’urbanisme et articles 12 et 45 de la constitution) et les nouveaux concepts dans ce domaine.

Faouzi Ayadi, l’organisateur de ces journées, dira pour sa part, que la place de l’éco-construction dans l’économie nationale reste encore restreinte, étant donné la réticence des pouvoirs politiques à adopter cette nouvelle notion.

De son côté, le ministre des Affaires locales et de l’Environnement, Riadh Mouakher, a relevé, lors de l’ouverture des 10èmes journées de l’éco-construction et l’innovation, que son département œuvrera à solutionner les problèmes des professionnels, à la lumière des propositions qui seront issues de ces journées, d’autant plus que l’éco-construction constitue une solution économique aux problèmes liés à la maîtrise de l’énergie et à la pollution.

Aujourd’hui, l’administration doit être réactive et suivre le secteur privé, qui est très avancé dans ce domaine, pour ne pas constituer un obstacle. L’objectif est de généraliser ce concept et de ne pas rester au niveau des expériences pilotes, a-t-il affirmé.

La 10ème édition des journées de l’Eco-construction et l’innovation est une occasion de réunir les décideurs et experts de la construction et du bâtiment et les représentants des différentes entreprises dans le but de stimuler la réalisation de futurs projets économiques et écologiques.

Près de 30 exposants participent à cette édition, dont cinq start-up.