Parmi les atouts d’attractivité du site Tunisie que le gouvernement tunisien s’était employé à promouvoir lors de la tenue de la Conférence internationale sur l’investissement “Tunisia 2020”, figurait la décongestion du Port commercial de Radès, centre névralgique de l’économie exportatrice tunisienne, et surtout l’élimination des surestaries qui représentaient plus de 300 MDT de manque à gagner pour l’Etat.

Tous les acteurs économiques en étaient fiers. Même le président de la République, Béji Caïd Essebsi, n’a pas manqué de s’attarder, lors de ses manifestations publiques, sur cet exploit.

Tout le monde a cru que le calvaire de la gestion archaïque de ce port était révolue. Mais, c’était crier trop tôt à la victoire. Pour preuve.

La mauvaise gouvernance du Port est toujours là

Vingt-cinq jours après “Tunisia 2020”, le directeur du bureau frontalier des opérations commerciales au port de Radès, le général colonel Idriss Gharbi, annonce, au public, que les agents de la douane à Radès ont réussi à saisir un conteneur rempli de cigarettes de contrebande, dont la valeur est estimée à plus d’un million de dinars (25 décembre 2016).

“Le propriétaire du conteneur a voulu faire croire aux agents que le conteneur transportait des pièces de rechange”, a précisé le colonel avant d’ajouter la panacée miracle pour enterrer et faire oublier à la tunisienne ce genre de délit: “la Direction des investigations douanières s’est chargée d’enquêter sur l’affaire”.

Une douzaine de jours après cette saisie (7 janvier 2017), la Douane annonce avoir saisi un autre conteneur en provenance de Chine, contenant des produits cosmétiques de contrefaçon. La valeur de la marchandise est estimée à deux millions de dinars.

Si on salue dans l’absolu ces saisies et l’effort déployé, à cet effet, par les douaniers, on ne peut s’interdire d’imaginer la possibilité de sortie illégale d’autres qui auraient pu échapper à la vigilance des douaniers intègres.

Des experts étrangers au chevet du Port de Radès

Moralité: la mauvaise gestion du port prévaut toujours au Port de Radès qui assure 80% de nos échanges avec l’extérieur. Nous ne sommes plus certes en 2013 avec l’affaire du vol spectaculaire d’une cargaison de “moteurs utilisés” par le biais de deux tracks (bien deux tracks), mais apparemment le mal persiste encore.

Pourtant, le port a fait l’objet de plusieurs études de redressement dont une financée par un don français de 185.000 euros et un audit allemand. Ce dernier a été entamé, depuis le mois de juin 2016, par deux experts allemands. L’objectif de leur mission vise à développer, avec les responsables tunisiens, un plan d’action tendant à «optimiser la situation au port avec les compétences et le know-how nécessaires».

Cette mission fait suite à des doléances formulées par des entreprises exportatrices allemandes installées en Tunisie et de prestataires de services logistiques.

Les deux experts, qui ont visité le port et effectué des réunions avec les institutions tunisiennes partenaires (direction générale du transport maritime et des ports maritimes de commerce, Stam, Douane et OMMP), sont appelés à proposer des approches de solutions concrètes à court et moyen-terme. Celles-ci devaient être publiées en principe vers la fin de l’année 2016. Ils sont encore dans les normes. Espérons que les solutions à proposer seront à la mesure des attentes.

L’idéal serait toutefois, comme l’avait proposé Hakim Ben Hammouda alors ministre des Finances, de ne plus axer tous les efforts sur le Port de Radès. Selon lui, le moment est venu pour engager une réforme sur la modernisation de tous les ports commerciaux du pays (Bizerte, Sousse, Sfax, Zarzis…). Nous pensons, effectivement, pour notre part que la décentralisation de la logistique portuaire et l’institution de la concurrence sont les meilleurs mécanismes pour contenir la mauvaise gouvernance du Port de Radès et pour le pousser à se moderniser.