ArcelorMittal, un chemin de croix en fer

ArcelorMittal, un chemin de croix en fer

arcelor-mittal-afp.jpgPlus dure sera la chute. En annonçant, vendredi 5 février, qu’il avait besoin de 3 milliards de dollars (2,7 milliards d’euros) d’argent frais, ArcelorMittal a concédé une forme de défaite. Après une décennie entière consacrée à grossir pour résister aux tempêtes qui secouent régulièrement le secteur de l’acier, le numéro un mondial doit reconnaître qu’il n’est pas mieux armé que ses concurrents face aux vents mauvais de la conjoncture.

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Pourtant, la société, née en 2006 de l’acquisition du champion européen Arcelor par le groupe Mittal Steel, propriété du milliardaire indien Lakshmi Mittal, a coché toutes les cases. Expliquant que les malheurs de cette industrie tenaient à l’émiettement des acteurs face à des fournisseurs peu nombreux et des clients très puissants, ArcelorMittal a racheté à tout va, aussi bien dans la production d’acier que, plus original, dans les mines de fer, afin d’échapper au diktat des géants du minerai brésilien ou australien. Objectif atteint : le sidérurgiste produit aujourd’hui deux fois plus d’acier que son concurrent immédiat Nippon Steel.

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Moins cher que Legoland

Mais tous ces puissants boucliers de fer sont devenus autant de boulets l’entraînant vers le fond. Le géant a annoncé pour 2015 des dépréciations massives et une perte de 7,9 milliards de dollars, consacrant sa cinquième année dans le rouge. Les trois quarts de ces dépréciations concernent justement les mines censées donner plus de flexibilité et de pouvoir au groupe. D’où l’augmentation de capital massive.

Comme le souligne perfidement l’agence Bloomberg, après avoir perdu près de 100 milliards de dollars de capitalisation boursière depuis 2008, le fournisseur de l’acier qui a permis de rebâtir la fameuse tour du World Trade Center à New York vaut désormais moins cher que l’opérateur des parcs à thème Legoland, où figure des répliques de la tour en briques de plastique.

C’est une fois de plus du côté de la Chine qu’il faut chercher le coupable. Le pays représente à lui seul la moitié de la production mondiale. Une réduction de 5 % de la consommation locale a suffi à créer des surcapacités massives dans un appareil industriel déjà surdimensionné. Les analystes cités par Bloomberg les évaluent à l’équivalent de deux fois la production mondiale d’ArcelorMittal.

Résultat, une inondation de produits chinois sur le marché mondial, dont les prix se sont effondrés, perdant en un an plus de 40 % de leur valeur. Américains et Européens ont alors recouru aux vieilles recettes des taxes antidumping. Cela n’a pas empêché les producteurs mondiaux de boire un solide bouillon.

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L’espoir du sidérurgiste européen, qui a très largement restructuré ses opérations, fermant des hauts fourneaux dans le monde entier, est que le secteur a touché le fond en 2015 et que ses efforts de rationalisation portent leurs fruits, avec un retour aux bénéfices en 2016. Faute de quoi, la question de la cession des mines reviendra sur le tapis, détruisant un peu plus l’édifice de fer patiemment construit par Lakshmi Mittal. Un beau gâchis.

 

AFP