Alimentation : la baisse des prix profite aux consommateurs, fragilise les producteurs

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ère agroalimentaire, agriculteurs en tête (Photo : Charly Triballeau)

[21/04/2015 14:40:39] Paris (AFP) La baisse des prix alimentaires en 2014, après plusieurs années de hausse, a avant tout profité au consommateur, malgré un effet minime sur son chariot de courses, mais fragilisé toute la filière agroalimentaire, agriculteurs en tête.

Dans cette affaire, “le consommateur est incontestablement le grand gagnant. Le drame est qu’il ne s’en rend pas compte”, a souligné mardi devant la presse Philippe Chalmin, président de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, en présentant son 4e rapport annuel.

Le document a été élaboré avec des représentant des agriculteurs, industriels, distributeurs et consommateurs.

Outre la baisse des prix pour le consommateur, il note que la distribution a commencé à reconstituer ses marges mais que les producteurs restent dans une grande précarité.

Dans le détail, les prix payés par le consommateur pour l’achat de produits alimentaires ont reculé en moyenne de 0,7% l’an dernier.

L’évolution risque de passer assez inaperçue sur le ticket de caisse, mais il s’agit de la “première baisse annuelle observée depuis plusieurs années”, souligne le rapport.

Dans le même temps, après un “plus haut” en 2013, les tarifs payés aux agriculteurs ont baissé de 5%, sous l’influence de la baisse des matières premières. Ceux qu’obtiennent les industries agroalimentaires de 2%.

L’évolution des prix dans le champ ne se répercute pas forcément jusqu’à l’assiette: pour la viande par exemple, les prix à la production ont baissé de 6 à 8% tandis que les prix au détail progressaient de 1%.

De fortes disparités existent: les viandes de boeuf et de porc, ainsi que les pâtes alimentaires baissent nettement. Mais les prix du lait augmentent, n’ayant pas encore pas encore répercuté la baisse des cours mondiaux de la fin 2014.

– ‘Le consommateur paye-t-il le juste prix ?’ –

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éphane Le Foll à Paris le 14 avril 2015 (Photo : LOIC VENANCE)

Globalement sur les 10-15 dernières années, les prix payés par les Français pour les aliments de base (jambon, pâtes, baguette, camembert…) sont restés stables, car l’industrie et la distribution “amortissent” les fluctuations des matières premières, un phénomène “caractéristique du système français”, explique M. Chalmin.

Mais derrière cette stabilité pour le consommateur, “tous les maillons sont fragilisés” dans la filière agroalimentaire.

“Au printemps 2015, il n’y a probablement pas un producteur agricole qui couvre l’intégralité de ses coûts de production”, estime M. Chalmin, dont le rapport souligne la “très grande précarité” des agriculteurs.

“Les agriculteurs ont aujourd’hui la corde au cou”, a d’ailleurs réagi la FNSEA. Le 1er syndicat agricole interroge: “Le consommateur paye-t-il le juste prix des produits ?”

Le rapport souligne aussi les difficultés de certaines entreprises de transformation, industrie de la viande en tête, dues à la “faiblesse des taux de marge nette”, à moins de 1% du chiffre d’affaires.

Côté distribution, la marge nette moyenne est “en baisse continue depuis trois ans”, à 1,1%, et même négative dans les rayons boucherie, marée et boulangerie-pâtisserie, souligne dans un communiqué la Fédération des entreprises de commerce et de distribution (FCD), regrettant que le rapport ne soit pas plus disert sur les marges des grands industriels.

M. Chalmin estime néanmoins que le recul des prix des matières premières agricoles a permis à la grande distribution de commencer à reconstituer ses marges en 2014, “ce qui peut expliquer les tensions dans les filières agricoles ces dernières semaines et mois”.

En réaction au rapport, l’Association des industries agroalimentaires (Ania) dénonce une nouvelle fois les effets de la “guerre des prix” entre distributeurs.

“Suite aux récents rapprochements des centrales d?achats fin 2014, cette tension sur les prix se poursuit en 2015, fragilise l’ensemble des acteurs de la filière agroalimentaire française et freine considérablement sa capacité à investir, à recruter, à innover et à exporter”, commente l’Ania.

Pour éviter que la production agricole “soit celle qui subisse le plus” la volatilité des prix, le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a rappelé qu’il avait choisi de “forcer au dialogue et à l’organisation des filières”, par exemple en facilitant la création de groupements d’agriculteurs.