Relaxe d’un producteur de foie gras poursuivi pour “acte de cruauté”

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élevage du Bas-Rhin, en 2014 (Photo : Frederick Florin)

[19/03/2015 14:24:34] La Roche-sur-Yon (AFP) Un producteur de foie gras vendéen, poursuivi pour “actes de cruauté” par une association militant contre le gavage, a été relaxé jeudi par le tribunal correctionnel de La Roche-sur-Yon, conformément aux réquisitions du ministère public.

Le 22 janvier, le procureur de la République, Hervé Lollic, avait estimé qu’il n’y avait “pas d’élément suffisant” pour condamner la société Ernest Soulard, fournisseur de grandes tables parisiennes, dont le Fouquet’s et le George V, et avait qualifié d'”instrumentalisation de la justice” la citation directe émise par l’association de défense des animaux L214 pour faire de ce procès celui du gavage.

Cette procédure, sans enquête de police, où le tribunal juge sur les pièces produites par les parties, avait été lancée pour “sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux” et pour “mauvais traitements envers un animal”.

L214 s’appuyait sur une vidéo où on voyait des canards cantonnés dans des cages individuelles, ne pouvant pratiquement pas bouger, et des animaux agonisant, dans le but de dénoncer les conditions de gavage dans des fermes sous contrat avec la société Ernest Soulard.

A la suite de la mise en ligne de la vidéo sur le site de l’association en octobre 2013, de grands chefs, dont le multi-étoilé Joël Robuchon, mais aussi le Britannique Gordon Ramsay, avaient décidé de suspendre leurs approvisionnements chez le producteur vendéen.

– Images ‘falsifiées’ –

“Je suis extrêmement satisfait puisque la société Ernest Soulard a été mise totalement hors de cause. Il a été démontré que les images qui ont fait grand bruit sur Internet étaient falsifiées (…) donc justice est rendue”, a réagi peu après le prononcé du jugement le directeur général de l’entreprise, Roland Tonarelli, remerciant “tous (les) clients qui nous ont soutenus pendant cette période un peu délicate”.

Pour l’avocate de l’association, Me Hélène Thouy, “les preuves” de l’authenticité des images, fournies par une personne ayant eu accès aux différentes salles de gavage de la société, et dont le nom n’avait pas été dévoilé, ont été “apportées au tribunal”.

“C’est une décision décevante (…) Mais ce n’est qu’une étape dans le long processus de la prise en compte de la souffrance animale et de l’interdiction du gavage qui en découlerait. C’est une défaite ponctuelle qui ne présage pas de l’avenir”, a-t-elle déclaré à l’AFP.

“Le gavage a déjà été condamné dans d’autres pays et il est interdit pour cruauté dans de nombreux États. Ce procès était une première en France, où la contestation du foie gras gagne du terrain (…) Un jour, en France aussi, on regardera l’alimentation forcée des animaux comme une pratique barbare à ranger au musée des horreurs”, a renchéri la porte-parole de L214, Brigitte Gothière, dans un communiqué.

“Même si certains peuvent ne pas être d’accord avec cette méthode de production, pour autant (le gavage) est quelque chose de tout à fait légal (…) Le bien-être de l’animal, c’est notre métier, c’est aussi notre raison d’être. Un animal en bonne santé fait un bon produit”, a mis en avant Roland Tonarelli, assurant que sa société poursuivait son travail de mise aux normes.

L’Union européenne avait interdit en 2011 les cages individuelles mais a donné aux producteurs jusqu’au 31 décembre 2015 pour les remplacer par des cages collectives.

L’association L214 a par ailleurs été relaxée dans un autre volet du dossier, concernant des dégradations commises dans les bâtiments de l’entreprise, où des trous avaient été percés pour réaliser les images.

Pour cette procédure, qui a fait l’objet d’une enquête pénale, le ministère public avait requis des amendes de 10.000 euros à l’encontre de L214 et de 2.000 euros contre son porte-parole pour “recel de dégradations”.