Le Terrorisme en Tunisie : Phénomène et lutte

Les experts militaires résument la pensée qui guide l’armée nationale dans son objectif de garantir “la Sécurité Globale“ laquelle consiste à protéger las frontières, les individus et l’économie. La question est de savoir comment l’armée tunisienne peut bâtir une capacité dissuasive pour démobiliser les terroristes. Si sa démarche est convaincante, elle gagnera sur les deux tableaux: le retour de confiance et la sécurisation de la transition.

alquaida-wmc-680.jpgLes membres de l’Association des anciens officiers de l’Armée nationale ont beau être à la retraite, ils n’en constituent pas moins une structure de propositions, qui est capable d’appuyer l’état major d’active. Issus d’une armée profondément nationale et populaire, ils se conforment à leur morale de base: servir, en toutes circonstances.

L’Association s’est penchée sur le phénomène d’actualité qui l’interpelle le plus en ce moment, à savoir le terrorisme. Ses membres ont organisé une conférence publique à la BN, pour expliquer leur approche du problème. Deux angles sont privilégiés: l’identification du phénomène et la stratégie de lutte à adopter.

L’approche théorique, précise et minutieuse…

L’approche du terrorisme dans son cadre mondial est minutieuse. Des origines à sa forme idéologique et “spirituelle“, le terrorisme, cette guerre en temps de paix ainsi que le qualifient les cadres militaires, s’attaque d’abord à l’Etat. Il est sanglant et criminel. Le terrorisme frappe fort, et de manière spectaculaire.

Sa technique est que sa violence, hélas relayée par les médias –certains médias-, doit inspirer la terreur chez la population. L’objectif étant qu’en tétanisant la population il arrive à déstabiliser l’Etat et à l’affaiblir pour le rendre encore plus vulnérable.

Cette capacité de déstabilisation lui a été savamment cultivée pendant la Guerre froide de la part des deux superpuissances de l’époque. Cette période de mise en valeur du terrorisme, qui a légitimé la course à l’armement, sous la pression évidente du complexe militaro-industriel, a été l’occasion d’un “transfert de technologies“ au terrorisme. Il en a tiré une grande capacité d’organisation lui procurant une redoutable force de frappe.

…mais peu pertinente…

Nos cadres militaires savent dans le détail comment le terrorisme s’incruste, hiberne, communique, recrute, réseaute au plan local et international, opère, puis se replie. Comment expliquer que le terrorisme ait pu disposer de temps et de clémence pour prendre ses quartiers dans le pays? Passons. Qu’est-ce qui explique que l’armée, qui devait être, a priori, en posture de veille, se laisse prendre par surprise à plus d’une fois? On comprend que l’armée tunisienne veuille rester en réserve de la politique, soit. Mais elle a bien pris la mesure des risques sur terrain. Elle a vu la contrebande, autorisée pour des produits civils sous Ben Ali, muter vers le trafic des armes sous la Troïka sans crier au loup.

La collusion entre les despérados du terrorisme et les caïds de la contrebande prend la forme d’un complot contre l’Etat national car, in fine, cela ruine le secteur organisé. Le rapport de Davos a fait une large part à cet aspect des choses et il nous a déclassés en conséquence.

Il y a bien une volonté manifeste et délibérée de détricoter l’Etat national via la contrebande et la violence.

…Et des non-dits

Que les cadres de l’armée ne veuillent pas interférer avec la sphère politique, cela se comprend. Qu’ils ne veuillent pas s’attarder sur la relation des réseaux terroristes avec la confrérie des Frères musulmans, cela reste pour nous un mystère.

Pourquoi ne pas évoquer également les méfaits des néoconservateurs américains? Ils constituent une officine qui donne sa raison d’être à la nébuleuse terroriste. Puis, en matière de renseignement, faut-il oui ou non mettre sur pied une structure nationale, une sorte de NSA? C’est vrai que nos frontières avec l’Algérie et la Libye sont longues et poreuses, respectivement de 950 et 450 km avec des accès nombreux et difficiles à contrôler. Mais alors que l’on dise comment convenir d’un plan commun de riposte conjointe.

On pense que si on doit attendre d’étudier la question dans l’urgence des assauts terroristes, on serait tenté de recourir à des secours de fortune et Africom n’est jamais bien loin. Et là on tomberait dans une situation kafkaïenne, tel que le remède serait pire que le mal. Avec un ennemi qui ruse, ne faut-il pas prendre les devants?

Jusque-là on se contente d’une logique d’endiguement, de ‘’containment’’, disent les Américains. Cela veut dire que l’on attend que l’ennemi passe à l’attaque et là on se défend. Ne vaut-il pas mieux passer à une logique d’éradication? Il nous semble que c’est à ce prix qu’on pourrait dégager une visibilité pour le pays.