Déficits : Sapin veut discuter du “rythme” de réduction avec Bruxelles

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à Bercy, le 3 avril 2014 à Paris (Photo : Eric Piermont)

[03/04/2014 14:16:52] Paris (AFP) Le nouveau ministre des Finances, Michel Sapin, s’est inscrit jeudi dans les pas du président François Hollande en déclarant que “le rythme” de réduction du déficit public français serait “discuté” avec Bruxelles.

Pour sa première déclaration de nouveau ministre des Finances et des Comptes publics, M. Sapin a expliqué sur France Inter qu’il discuterait avec la Commission européenne “pour trouver le chemin de l’intérêt commun”, expliquant “ce n’est pas un pays qui implore les autres” mais que “l’Europe se portera mieux quand la France se portera mieux”.

Lundi le président Hollande avait amorcé ce principe, expliquant que le gouvernement dirigé par Manuel Valls “aura aussi à convaincre l’Europe que cette contribution de la France à la compétitivité, à la croissance, doit être prise en compte dans le respect de nos engagements”.

La France avait déjà obtenu l’année dernière un délai jusqu’en 2015 pour réduire ses déficits en dessous de 3% de son produit intérieur brut. Il ne s’agit d’ailleurs pas de revenir sur cet objectif, a prévenu M. Sapin, mais plutôt de le reporter.

“Les objectifs sont des objectifs que nous tiendrons”, a-t-il promis jeudi, mais sans prononcer le terme de “3%” ni mentionner le calendrier dans lequel il entendait inscrire ce considérable effort budgétaire.

La France s’est éloignée en 2013 de son engagement européen d’atteindre 3% fin 2015, enregistrant un déficit public (Etat, Sécurité sociale et collectivités territoriales) équivalent à 4,3% de sa richesse nationale, soit un “trou” de 87,6 milliards d’euros, selon l’Insee.

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éen chargé des Affaires économiques, Olli Rehn, àAthènes le 1er avril 2014 (Photo : Louisa Gouliamaki)

La Commission européenne a accueilli froidement mardi ce chiffre, qui plus est en léger dérapage avec les prévisions. Tenant à “rafraîchir les mémoires”, le commissaire européen chargé des Affaires économiques, Olli Rehn, a rappelé que “le délai donné à la France” avait déjà “été prolongé deux fois” et espéré que le pays allait agir “de manière décisive pour assurer la soutenabilité de ses finances publiques à long terme”.

“Réduire les déficits, il n’y a pas d’autres choix: c’est une question de crédibilité pour la France; notre dette, nous devons la maîtriser sinon nous perdons notre souveraineté nationale”, a déclaré mercredi Manuel Valls qui s’adressait pour la première fois aux Français en tant que Premier ministre.

– Gare aux taux d’intérêt –

M. Sapin s’est voulu un peu plus mesuré, cherchant à convaincre les partenaires de la France en zone euro que “la seule préoccupation qui vale” soit “plus de croissance pour plus d’emplois” et que le rééquilibrage des finances publiques pouvait dans ce cadre se faire “progressivement”.

La grande majorité des conjoncturistes reconnaissent les vertus de la croissance pour relancer l’emploi mais aussi pour augmenter les recettes de l’Etat qui a du coup une marge de manoeuvre pour réduire les déficits. A l’inverse, l’austérité a un effet considéré comme récessif puisqu’elle bride l’investissement et la consommation. Toute la question étant de ne pas pour autant laisser filer la dette, au risque de voir les taux d’intérêt s’envoler voire les prêteurs déserter.

Michel Sapin a insisté sur cette notion de “souveraineté nationale”, souvent citée mais rarement comprise. “Si on dit toujours: +il faut diminuer les déficits parce que nous devons respecter nos engagements vis-à-vis de l’Europe+, comment voulez-vous rendre aimable l’Europe?”, a-t-il interrogé lors de la passation de pouvoirs à Bercy avec Pierre Moscovici, ministre de l’Economie et des Finances sortant.

“Il faut respecter nos engagements en terme de déficit parce que ce sont des engagements par rapport à nous-mêmes, parce que c’est l’intérêt profond de la France”, a-t-il ajouté.

Un peu plus tôt à la radio, il avait rappelé que la France versait aux marchés financiers “45 milliards tous les ans” d’intérêts de sa dette. “La première manière d’éviter la finance folle, c’est d’éviter d’être dans sa main” et de payer d’énormes intérêts chaque année, avait-il justifié.

Il a à nouveau promis que plus aucun effort fiscal ne serait demandé aux Français. Estimant que les augmentations d’impôts entre 2011 et 2013 étaient “nécessaires, indispensables, indiscutables”, il a promis dans son allocution à Bercy de stopper la hausse “parce que ce n’est plus possible, parce que les Français n’en peuvent plus, parce que l’Economie n’en peut plus”.

“Il faut passer à quoi? A l’économie, l’économie en profondeur, à l’économie structurelle”, a-t-il plaidé, soucieux que les 50 milliards de réductions dans la dépense publique voulus par François Hollande ne fassent “pas peur”.