à Paris le 29 janvier 2014 (Photo : Kenzo Tribouillard) |
[30/01/2014 19:40:37] Paris (AFP) La France veut moderniser sa commande publique pour doper l’innovation en simplifiant le contact avec les PME innovantes, pour lesquelles elle est souvent un premier tremplin vital, et en tentant de lutter contre la frilosité de nombre d’acheteurs publics.
Pour faire valoir un nouveau produit ou proposer une solution innovante, start-up et PME doivent souvent chercher elles-mêmes dans les méandres de l’administration la personne susceptible d’être intéressée par une proposition ou se montrer sur des salons moyennant des coûts exorbitants.
Afin de remédier en partie à cette entrave, l’Etat va ouvrir fin février une plateforme internet destinée à fluidifier l’accès à la commande publique des petites et moyennes entreprises (PME) innovantes.
“Les entreprises réclament depuis longtemps un portail interministériel des achats innovants qui regroupe les besoins des ministères et des opérateurs. Ce portail sera ouvert dans quelques jours”, a annoncé le ministre de l’Economie, Pierre Moscovici, en ouvrant jeudi devant des responsables des achats publics et 80 représentants de PME innovantes une conférence consacrée à la commande publique.
Inspirée d’une plateforme créée par l’association Pacte PME, dont la vocation est de renforcer les relations entre PME et grands comptes, ce portail doit permettre, très en amont de la publication des appels d’offres, à une PME de répondre à des recherches précises de ministères et des établissements publics. En sens inverse, une PME pourra y afficher une proposition spontanée, explique Jean-Baptiste Hy, Directeur du service des achats de l’Etat.
En attendant, les ministères et établissements publics ont publié sur le site du Service des achats de l’Etat (SAE) des “feuilles de route” correspondant à leurs projets d’innovation les plus divers. On peut y trouver des annonces telles que “système automatisé d?analyse vidéo de la marche chez la souris et le rat”, à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) ou, pour les besoins de Météofrance en télédétection par laser, “acquisition de lidars aérosols et de lidars vent” ainsi que des “systèmes de comptage des visiteurs afin de maîtriser la jauge d’une exposition” pour les Musées nationaux.
Le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi lancé début novembre 2012 exige qu’au moins 2% de la commande publique de l’Etat, de ses opérateurs et des hôpitaux soit effectuée auprès d’entreprises innovantes à l’horizon 2020. Les critères sont un marché dont l’objet est innovant ou qui porte sur un produit qui n’existait pas il y a moins de deux ans et les entreprises éligibles sont des PME, précise M. Hy.
“Précautions excessives”
La commande publique représente “80 milliards d’euros par an dont la moitié pour l’Etat et ses établissements publics et un quart respectivement pour les hôpitaux et les politiques territoriales”, a indiqué M. Moscovici, en donnant le chiffre de 22,7% du montant des achats publics remportés en France par les PME.
“Les gouvernements britannique et américain ont fixé respectivement les objectifs de 25% et 23% pour leur administration”, compare-t-il. La France vise 25% en 2015, a précisé M. Hy à l’AFP.
“Mais il y a encore beaucoup d’acheteurs dans l’administration qui sont frileux” et prennent “des précautions excessives”, a lancé le responsable des achats de l’Etat lors de la conférence.
Pour Jean-Lou Blachier, médiateur des marchés publics, “il faut absolument dépénaliser ou moins pénaliser les acheteurs pour leur donner la possibilité d’avoir les coudées plus franches”. “La France est le seul pays au monde où l’acheteur est pénalement responsable trois ans après qu’un marché a été passé”, affirme-t-il. Ces acheteurs “vont alors vers le choix sans risque en prenant les prix le moins disant alors que le code des marchés publics va vers le mieux disant”, déplore le médiateur, qui compte proposer une modification de la loi à l’Assemblée nationale.
Philippe Berna, président du Comité Richelieu, association de PME innovantes, tout en voyant un “grand pas” dans les initiatives récentes, déplore cependant un manque de coordination et de dialogue entre acheteurs et responsables de projet dans les organismes publics.