Rail, route : la France revoit ses ambitions à la baisse

65161023ed21b3f51e4de81457d8efa39d900426.jpg
édéric Cuvellier (g) aux côtés du maire de Caen Philippe Duron, le 27 juin 2013 à Paris (Photo : Bertrand Guay)

[27/06/2013 18:16:22] Paris (AFP) Le gouvernement a tiré un trait sur le “tout TGV” et les politiques de transport pharaoniques, avec la remise jeudi du rapport de la commission Mobilité 21, dont les orientations en faveur de l’entretien du réseau existant sont déjà largement approuvées par l’exécutif.

Les branches Ouest et Sud de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône ou encore la ligne Toulouse Narbone sont repoussées à un “horizon lointain”, après 2050. Comme l’autoroute A26 entre Troyes et Auxerre ou l’A51 entre Gap et Grenoble, entre autres.

La commission, dirigée par le député PS du Calvados Philippe Duron, a revu à la baisse les ambitions de l’Etat qui figuraient au Schéma national des infrastructures de transport (Snit), fort de 70 grands projets pour une enveloppe de 245 milliards d’euros sur 25 ans.

Le ministre des Transports, Frédéric Cuvillier, s’est félicité que ce rapport mette un terme à une “liste à la Prévert (…) impossible à financer”.

Il a également salué le retour d’une “certaine forme de planification” et “de l’Etat stratège”.

Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a approuvé ce constat, estimant dans une interview à L’Usine Nouvelle que le rapport “fait un diagnostic précis de nos besoins de transports”.

Le rapport abandonne le “tout TGV” et les grands projets d’autoroutes auxquels la France s’était habituée (quatre lignes à grande vitesse sont actuellement en construction, entre Tours et Bordeaux, Le Mans et Rennes, Metz et Strasbourg et le contournement de Nîmes et Montpellier). Il met l’accent sur une priorité : l’entretien du réseau existant.

Un scénario optimiste retenu

Ce réseau (routes, rail et ports), jugé “de haute tenue” par la commission, se dégrade depuis plusieurs années. Le rapport propose d’injecter 25 à 30 milliards d’euros d’ici à 2030, quoi qu’il arrive, pour assurer sa régénération.

Une fois cet entretien garanti, la commission esquisse deux scénarios pour financer les grands projets. Le premier, a minima, sans dépenses nouvelles de la part de l’Etat. L’autre “plus ambitieux”, a été retenu par le gouvernement. Il prévoit une contribution supplémentaire de 400 millions d’euros par an au budget de l’Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF).

f8276180deafa1f3be249904982386c944f22559.jpg
à Paris (Photo : Bertrand Guay)

“Nous allons retenir un projet autour du scénario deux”, a déclaré Frédéric Cuvillier à l’AFP, en marge de la conférence de presse organisée pour la remise officielle du rapport de la commission Mobilité 21.

Ce plan affecte entre 28 et 30 milliards d’euros aux grands projets à l’horizon 2030, contre huit à dix milliards prévus dans le scénario plus modeste.

La version optimiste du rapport Duron maintient le lancement des travaux de la ligne à grande vitesse (LGV) Bordeaux-Toulouse avant 2030. Les autres LGV sont renvoyées après 2030, sans être condamnées : la commission préconise une révision de ses priorités tous les cinq ans en fonction des marges budgétaires.

Egalement au programme, de nombreux chantiers “ingrats mais nécessaires”, a expliqué Philippe Duron à l’AFP. La commission recommande d’investir dans de grands “noeuds ferroviaires”, destinés à désengorger de nombreuses gares, comme celle de Lyon et celle de Saint-Lazare à Paris, la Part-Dieu à Lyon ou Saint-Charles à Marseille.

La route et le fluvial font également partie des priorités avec notamment un passage à deux fois deux voies de la route Centre Europe Atlantique entre la Saône-et-Loire et l’Allier, ou l’amélioration de la desserte entre certains grands ports et la zone alentour.

“Discours de vérité”

Les nombreuses fuites du rapport dans la presse cette semaine ont polarisé le débat sur l’abandon du TGV pour mailler le territoire, au grand dam de certains élus.

“Le problème, c’est qu’on a laissé croire que le TGV était l’horizon indépassable du transport ferroviaire”, estime Philippe Duron, pour qui “ce n’est pas le projet de prestige qui est le plus utile pour la population mais plutôt celui qui permet de se rendre plus rapidement au travail ou au lycée chaque jour”.

De sonc côté, le président de l’UDI, Jean-Louis Borloo, a dénoncé “la vision court-termiste” de l’aménagement du territoire livrée par le rapport Duron.

“En privilégiant la nécessaire modernisation du réseau existant et en renvoyant aux calendes grecques la quasi-totalité des grands projets d?infrastructures, le gouvernement sacrifie la croissance de demain sur l?autel des déficits d?aujourd?hui”, regrette l’ancien ministre de l’Ecologie, qui avait supervisé l’élaboration du Snit en 2007.

Le rapport doit être présenté en juillet devant les commissions parlementaires.